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Signature terroir

Pays-d’Enhaut. Mathias Lecocq redonne vie au bois

Sculpteur et tourneur sur bois, le jeune homme façonne des objets du quotidien ou crée des reliefs. Un artisanat et un art qu’il transmet volontiers par le biais de stages. Rencontre dans son atelier des Moulins.

Tilleul et noyer pour la sculpture, hêtre, frêne et érable pour le tournage.Antoine Vuilloud

Sophie Roulin

Sophie Roulin

3 octobre 2024 à 08:41, mis à jour le 9 octobre 2024 à 07:30

Temps de lecture : 3 min

Copeau après copeau, il extirpe, ici toute la puissance d’une vache, là toute la délicatesse d’un sabot-de-Vénus. D’aussi loin qu’il s’en souvienne, Mathias Lecocq a toujours été fasciné par le bois et son travail. Après un apprentissage de polydesigner, il se dirige logiquement vers son matériau de prédilection et devient tourneur sur bois, puis sculpteur.

Depuis cinq ans, il a pignon sur rue dans le Pays-d’Enhaut.

«En parallèle à mon CFC, suivi dans une école d’arts appliqués, j’avais monté mon petit atelier dans la cabane de jardin, chez mes parents, à Coppet», explique le jeune homme de 28 ans. Son diplôme en poche, il se lance comme designer indépendant. «Dès lors, chaque franc gagné a été réinvesti dans des machines pour travailler le bois, jusqu’à ce que je m’achète un tour.»

Dans la Cité des Meubles

Mathias Lecocq décide alors de compléter sa formation par un CAP (certificat d’aptitude professionnelle) en art du bois, en France voisine. «Je pensais m’arrêter là, mais mon maître de tournage m’a poussé à poursuivre et à devenir sculpteur sur bois.» A raison d’une semaine par mois durant deux ans, il se rend au Pont-de-Beauvoisin, dans l’Isère, surnommé la Cité du Meuble. Il y apprend la sculpture au côté de Philippe Gilbert, sacré meilleur ouvrier de France (MOF) en 1994.

C’est avec ce bagage que l’artisan rejoint le Pays-d’Enhaut, attiré par cette région où le travail du bois est resté essentiel. Il connaît le coin pour y être venu en vacances durant son enfance. Embauché par une entreprise active dans la menuiserie et l’ébénisterie, à Rougemont, il apprend sur le tas les rouages du métier.

Dès son arrivée, il loue une boutique dans la Grand-Rue, à Château-d’Œx, et y vend les objets, essentiellement artistiques, produits jusqu’ici. «Cette visibilité m’a permis de me faire un nom dans la région», estime Mathias Lecocq.

Du bois local

Une fois bien implanté, il se met en quête d’un atelier où poursuivre son travail et trouve un espace dans une halle dédiée à l’artisanat, à l’entrée des Moulins. «J’y ai installé tous mes outils et mes machines.» Les planches et les morceaux de bois sont soigneusement empilés près de la porte. La plupart viennent de la région ou du pied du Jura. Tilleul et noyer pour la sculpture, hêtre, frêne et érable pour le tournage.

Le jeune homme un peu lunaire trouve une bonne part de son inspiration dans la nature et se balade volontiers dans sa région d’adoption. «Je récupère des branches lorsque j’aperçois des agriculteurs qui taillent des arbres fruitiers, comme des cerisiers, des pommiers ou des poiriers.» Il en extrait des pièces plus créatives.

Mathias Lecocq a rejoint le Pays-d’Enhaut, attiré par cette région où le travail du bois est resté essentiel

Stagiaires de tous horizons

Au fond, devant la fenêtre, s’alignent des dizaines de gouges. Et, sur le côté droit, deux tours sont calés contre le mur. «Je peux recevoir deux stagiaires pour le tournage et même trois pour la sculpture.» Car, si le jeune homme aime s’exprimer, il apprécie également transmettre son art: «Je reçois aussi bien des professionnels, qui souhaitent se perfectionner, que des jeunes désireux de s’initier ou des retraités à la recherche d’un nouveau hobby.»

Après deux ans et demi à Rougemont, il quitte son emploi pour pouvoir passer davantage de temps dans son atelier des Moulins. Il ne s’y consacre cependant pas à 100% puisqu’il exerce depuis un an et demi un autre métier: celui d’affineur, au sein des caves de L’Etivaz. «C’est un monde que je découvre et je trouve ça passionnant!» lance-t-il avec enthousiasme.

Mais le Vaudois ne cache pas qu’il aspire un jour à vivre de ses activités liées au bois. Pour l’heure, d’autres professionnels lui confient la réalisation de pièces spéciales, comme des pieds de table tournés ou des travaux en relief pour des portes ou d’autres éléments sculptés. «J’ai la place pour un troisième tour qui me permettrait d’accueillir un stagiaire de plus, mais je tiens à garder une taille raisonnable et à rester avant tout un artisan.»