Logo

Scènes

La fable étrange d’Anouk Werro

La Fribourgeoise monte Vultures lors de la deuxième édition de Weekend Prolongé

Patric Reves est l’un des acteurs de la création d’Anouk Werro.

 Tamara Bongard

Tamara Bongard

16 septembre 2021 à 04:01

Fribourg » C’est une fable troublante qu’a imaginée Anouk Werro. On y trouve bien quelques animaux, comme dans celles d’Esope, mais ils ne sont pas les protagonistes de Vultures (vautours en français) et ils ne parlent pas. La pièce écrite et mise en scène par la Fribourgeoise montre une femme en train de mourir dans le désert, tandis que les charognards commencent à la dévorer. Deux témoins se demandent que faire, alors qu’en parallèle un cow-boy essaie de se souvenir de l’histoire d’une bête sauvage et qu’une jeune femme errante tente d’attirer l’attention du public. Cette création sera jouée pour la première fois en français dans le cadre de la deuxième édition de Week-end Prolongé, un festival d’art vivant pour l’émergence fribourgeoise qui démarre mercredi sur le site de Bluefactory (lire ci-dessous).

Anouk Werro a rédigé ce texte en anglais il y a cinq ans, lorsqu’elle suivait une formation de comédienne à Londres. «Cette parabole est sortie de moi», dit-elle. Facilement. «La douleur est venue après. Je me suis demandé pourquoi j’avais écrit cela», constate-t-elle. Elle laisse alors de côté ce Vultures, mais à la fin 2019, sur le conseil d’une amie, elle le propose au concours en ligne Creative Art Plateform, qui le sélectionne. Des lectures de son œuvre ont alors lieu à Bogota et en Russie. Puis un metteur en scène colombien s’empare du texte et le monte dans son pays (depuis le texte a aussi paru en russe dans un magazine). «Cela m’a bouleversée, d’abord parce qu’il a fait une interprétation superspécifique de ma pièce par rapport à son contexte socioculturel, puis du fait que la vie de cette pièce pouvait être si multiple. Cela m’a incitée à la monter moi-même», explique Anouk Werro.

Sable du Sahara

Elle la modifie toutefois un peu. Lors d’une semaine de travail, l’an dernier, les didascalies épiques de Vultures deviennent un personnage (l’écriture s’est faite en collaboration avec les comédiennes et comédiens) et le rôle de la jeune femme est agrandi pour tracer sa propre route. «C’est un travail sur la notion de résonance, sur la manière dont certaines choses peuvent révéler une autre temporalité de nous, et sur l’impossibilité de raconter une histoire en entier quand il n’y a qu’un seul point de vue, d’où cette juxtaposition de fils narratifs», explique la metteuse en scène.

Pour incarner son propos, elle a choisi des acteurs qu’elle a croisés dans le cadre professionnel ou lors de sa formation. Agathe Fellay avait ainsi joué dans sa première pièce, Les trois Ophélies, écrite lorsqu’elle avait 20 ans. Patric Reves est en revanche un artiste avec qui elle a souvent collaboré dans le cadre de la compagnie Opus 89. Elle a rencontré Chloë Lombard via des amis communs et des collègues, puis travaillé avec elle, alors qu’elle a côtoyé Samuel Perthuis à La Manufacture, où elle a également étudié.

La scénographie a été pensée par Fleur Bernet. «Elle était présente lors de notre résidence artistique à la Tour Vagabonde, installée sur le terrain vague de Bluefactory. Elle travaille beaucoup avec la charge des lieux», explique Anouk Werro. Le lieu semble avoir répondu à cette attention lorsque en février le sable du Sahara s’est invité en Suisse et a alors créé une ambiance vraiment désertique à Fribourg.

Prolifique, Anouk Werro, qui est montée sur scène lors du dernier festival du Belluard avec une autofiction flirtant avec la performance (Chakra de la gorge en surexploitation), vient également de présenter au public de La Manufacture Bains en famille, une collaboration avec Mélissa Rouvinet. L’auteure, comédienne et metteuse en scène dit avoir un rêve, celui de pouvoir naviguer entre ces trois fonctions et celle d’assistante d’autres créateurs, afin de se mettre au service de leurs projets. Un éclectisme lui permettant de rester dans le travail, la découverte, la recherche, la pratique. «Pour moi, la créativité est très cyclique. Valser entre les projets permet d’expulser ce que j’ai à dire, puis de me remplir à nouveau, et d’expulser à nouveau. Je trouve cela plus riche», souligne Anouk Werro.

Sa 25 septembre 18 h et 21 h 30 Fribourg

Bluefactory, en extérieur.

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus