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Vaud

L’«affaire Beaulieu» devant la justice

L’ex-secrétaire général de l’ancienne fondation lausannoise se défend de tout enrichissement.

L’affaire liée à l’ancienne Fondation de Beaulieu avait éclaté en décembre 2017.

 Jean-François Schwab

Jean-François Schwab

9 août 2023 à 04:01

Procès à Nyon » Le procès de l’affaire de l’ancienne Fondation de Beaulieu à Lausanne s’est ouvert mardi au Tribunal d’arrondissement de La Côte à Nyon. Jugé pour gestion déloyale, son ex-secrétaire général a dit n’avoir jamais voulu profiter de la situation ni s’enrichir.

«Je regrette ce qui est arrivé. C’est dommage. Je ne referais jamais ce travail. Je n’ai jamais eu l’impression de profiter de la situation», a déclaré le prévenu Marc Porchet. Il a aussi rappelé avoir été «décapité sur la place publique de façon assez abjecte sur la base d’un audit qui a créé la confusion». Et s’être endetté de plusieurs centaines de milliers de francs.

L’«affaire Beaulieu» avait éclaté en décembre 2017. Le Conseil d’Etat vaudois et la Municipalité de Lausanne avaient déposé une plainte pénale contre Marc Porchet pour malversations. Il était soupçonné d’avoir attribué des mandats à des proches ou des membres de sa famille, sans appels d’offres, et d’avoir surfacturé certains travaux.

Non-lieu en 2019

Mais le Ministère public avait prononcé un non-lieu en 2019, blanchissant complètement M. Porchet, reconnaissant au pire une gestion chaotique du site lausannois, et dégonflant ainsi l’affaire. Cette ordonnance de classement avait été cassée par le Tribunal cantonal en 2020, priant alors le procureur de compléter son enquête.

Après un total de cinq ans et demi d’instruction, seule une partie des faits a été finalement retenue, à savoir le chef d’accusation de gestion déloyale pour six cas de refacturations. Et c’est toute la question des marges bénéficiaires, légales ou non, et d’un éventuel conflit d’intérêts, qui a été au centre de l’audience de mardi, liée à la double casquette de Marc Porchet.

En effet, la fondation n’ayant pas de salariés et fonctionnant sur de nombreux mandats confiés en externe, M. Porchet était à la fois chef de sa fiduciaire (société individuelle et bureaux sis à Saint-Prex) dont Beaulieu était son principal client, et secrétaire général de 2001 à 2017 de cette même fondation. Une fiduciaire qui a compté jusqu’à 70 personnes, dont cinq sous-traitants indépendants.

Seuls six cas retenus

Il lui est reproché d’avoir «privilégié ses propres intérêts, en refacturant à la Fondation de Beaulieu, avec une marge bénéficiaire indue, les services prestés par différents indépendants». Les seuls six cas retenus concernent des personnes payées 100, 85, 75 voire 45 fr. de l’heure par sa fiduciaire, avec refacturation au tarif horaire «quasi généralisé» de 135 francs à la Fondation de Beaulieu.

Le prévenu a expliqué qu’il n’avait «jamais anticipé ni calculé de marges» éventuelles et que ces 135 francs étaient «un tarif horaire moyen, équilibrant des prestations parfois plus chères et parfois moins chères». Il a surtout souligné que ce tarif comprenait les «charges d’infrastructures», à savoir «la non-facturation à Beaulieu du loyer des locaux de sa fiduciaire, des coûts d’électricité, du parc informatique, du mobilier et différents équipements».

Le tribunal a essayé de démêler une comptabilité jugée «opaque» par le Ministère public dans une audience très technique. Alors que le procureur François Danthe estime la refacturation telle qu’effectuée illicite pour les six cas, l’avocat de M. Porchet, Me Stefan Disch, sans les contester, estime au contraire que ces marges étaient «légitimes et acceptables» économiquement, car notamment «liées au risque entrepreneurial» pris par son client.

Le prévenu a aussi évoqué «un moment-charnière» lorsque la fondation a dû reprendre l’exploitation des infrastructures du site «au pied levé et dans l’urgence» vers la fin 2014 et le début 2015. «C’était une période chahutée. On était tous à courir de tous les côtés», a-t-il raconté, évoquant une nette multiplication des tâches et des activités.

Plaidoiries jeudi

Le Parquet n’a pas évalué le préjudice subi par la fondation. «On n’arrive pas à reconstituer les montants et les prestations de vingt ans d’activités à Beaulieu», a affirmé le procureur. Selon les chiffres articulés dans l’acte d’accusation, le montant pourrait avoisiner les 150 000 francs.

Interrogé dans l’après-midi en tant qu’expert, un consultant en comptabilité a pour sa part relevé que le processus manuel de facturation de la fiduciaire était «peu efficace et peu efficient».

Des témoins ont été auditionnés, dont une ancienne assistante de direction de M. Porchet indiquant que ce dernier était «extrêmement impliqué pour la fondation, tant professionnellement que personnellement». «Cela lui tenait à cœur», a-t-elle dit. D’autres témoins ont aussi souligné l’«énorme engagement» de l’ex-secrétaire général, parfois sur tous les fronts, notamment pour «trouver des solutions afin de ne pas devoir fermer Beaulieu».

Le procès se poursuit et le réquisitoire du procureur ainsi que les plaidoiries des avocats auront lieu jeudi. Le verdict est attendu le 21 août. ATS

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