Payerne. La saveur de la nostalgie fait un carton aux Brandons
La reconstitution du Restaurant de la Reine Berthe évoque des souvenirs chers aux fêtards d’un certain âge. Les organisateurs remettront le couvert l’année prochaine.
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18 février 2024 à 22:00
La cuvée 2024 des Brandons de Payerne s’achemine vers un succès populaire. La fête, qui doit se prolonger ce lundi, a attiré des dizaines de milliers de personnes dans le chef-lieu broyard (lire ci-dessous). L’attraction phare de cette 129e édition de l’un de plus gros bastringues carnavalesques romands est sans aucun doute l’éphémère Restaurant de la Reine Berthe, fermé depuis l’an dernier et que le Comité des masqués a reconstitué dans des conteneurs au pied de l’abbatiale. L’endroit ne désemplit pas depuis vendredi. «Je me sens nostalgique, cette reconstitution est vraiment bluffante», dit Philippe Motta, un sexagénaire qui a grandi à Payerne.
«Marie-Jeanne Zurkinden, qui a tenu la Reine Berthe pendant plus de vingt ans et son mari» Zuzu «ont carrément marqué ma vie. C’était la dernière pinte traditionnelle de Payerne, avec des mets de brasserie comme autrefois. Heureusement que les Brandons ont racheté la décoration et ont ressuscité l’endroit!» Egalement habitués du défunt restaurant, Jacques et Françoise Lador affirment «sortir moins souvent au restaurant à Payerne depuis que la Reine a fermé.» Michel Erard s’était déguisé lui-même en Reine Berthe avec quelques copains l’an dernier pour aller fêter une dernière fois avant la fermeture de l’enseigne: «On a ressorti le costume et on a pu chanter la chanson qu’on avait composée en l’honneur de la Reine Berthe.»
«Vrai beau souvenir»
Ce parfum de nostalgie au milieu des guggenmusiks et des confettis n’est pas pour déplaire à l’ancienne députée Jacqueline Rostan. «J’adorais ce restaurant et j’allais y manger la langue aux câpres tous les jeudis. Je trouvais le jardin fascinant avec sa verdure et ses dizaines de sculptures de chats. C’est un vrai beau souvenir», ajoute celle qui avait réservé sa place avec quatre amies. «Bravo les jeunes!» lance une équipe de vieux brandonneurs, anciens barbouilleurs des vitrines de la cité. «La Reine c’était le patrimoine de Payerne, un peu comme nous», rigolent Pipi, Briquet et leurs potes, s’apprêtant à faire un sort à une assiette de charcuterie.
Après quelques verres, la Reine Berthe reconstituée fait office de «machine à remonter le temps» pour l’ancien municipal André Jomini. «On y allait souvent quand j’étais à la Société de jeunesse, il y a quarante ans. Le tenancier de l’époque nous faisait descendre à la cave pour nous écouler ses vieilles bouteilles de blanc. Il était content de s’en débarrasser et nous, on avait de la peine à remonter.» Chez Marie-Jeanne, après l’heure de fermeture, on fermait les rideaux et les soirées privées se prolongeaient, se souvient Christiane Cartoni. «Je me souviens avoir dansé une fois jusqu’au bout de la nuit. C’est comme si c’était hier.» Marc-Henri Savary, de Sassel, venu déguster quelques souvenirs en compagnie de son épouse, sent encore l’odeur des tripes qu’on y servait. «A se relever la nuit! Pour le menu de la Saint-Martin, il fallait réserver une année à l’avance.»
La Reine reviendra
Président des Brandons, Vincent Marcuard, alias «Mizou», se dit heureux du succès de cet endroit éphémère. «J’ai carrément vu certains anciens pleurer en se souvenant des bons moments qu’ils avaient passés dans cet endroit mythique de Payerne. Nous allons sans doute pérenniser cette Reine Berthe éphémère pour les prochaines éditions des Brandons. Oui, la Reine reviendra!» Marie-Jeanne Zurkinden, à la retraite depuis quelques mois, est allée elle-même souper dans le vrai-faux restaurant dimanche soir avec son ancienne brigade de service. «Ils ont fait un travail formidable», assure l’ancienne tenancière, qui servira lundi soir des plats concoctés en cuisine par Fabrice Bersier, ex-tenancier de la Pinte communale.
Les Brandons c’est aussi le cortège du dimanche. Celui-ci a vu défiler pas moins de 26 groupes et chars dans la cité de Berthe. L’un des équipages célébrait à sa manière les soixante-cinq ans d’existence de la poupée Barbie avec ce slogan: «Pour la troisième rente AVS de Barbie.» Plusieurs groupes ont épinglé l’actualité, de «L’Aéropôle qui reste vide» au rachat du Credit Suisse en passant par les punaises de lit en France. Un char dédié à ChatGPT affichait les réponses supposées de l’intelligence artificielle à certaines questions. Exemple: «Comment intégrer les Adélaïdes au Tirage de Payerne? - Arrêter d’être des immenses débiles» (sic).
Les Brandons n’ont pas non plus failli à la tradition du barbouillage des vitrines, avec des inscriptions dont toutes ne pourraient pas être publiées ici. Sur la devanture d’une entreprise de placement de personnel, il est écrit: «Postes ouverts: chasseur de loup - entraîneur au FC Sion - président de la Fondation Gianadda.» Les Brandons, «c’est un mélange de nouveautés et de traditions que nous respectons aussi à la lettre. C’est la raison de leur succès et de la participation des aînés. C’est pour cela aussi que la Reine Berthe a toute sa place», dit Mizou, qui tenait pour la première fois cette année les rênes de la manifestation sans le soutien de l’ancien président, Sylvain Hostettler.
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