Logo

Roues et route

Le crash en pleine gloire… suisse

Disparition • Chevrolet, l’ami Louis, doit se retourner dans sa tombe. General Motors a décidé de retirer la marque du marché européen fin 2015 pour sauver Opel. Des explications et des regrets.

Les Chevrolet purement américaines comme la Corvette seront toujours vendues en Suisse. ldd

Pierre-Alain Brenzikofer

Pierre-Alain Brenzikofer

11 mars 2014 à 04:11

Il faut sauver le soldat Opel! Fort de ce credo, GM a tranché dans le vif: Chevrolet disparaîtra du marché européen en 2015. Daewoo, plutôt, rétorqueront les cyniques. Il est vrai que la marque coréenne avait été rebadgée il y a dix ans pour doper ses ventes. Sacrée réussite! Paradoxalement, elle était pourtant éclatante en Suisse. Peut-être grâce à un certain Louis Chevrolet, Chaux-de-Fonnier et Ajoulot à la fois. Une marque, enfin, dont le 100e anniversaire avait été célébré en grande pompe en 2011 à LaChaux-de-Fonds par l’importateur.

Inutile, dès lors, d’ajouter que pour ce dernier, la nouvelle a fait l’effet d’une bombe. Une fois de plus, que peut faire la petite Suisse face à l’Europe? Et à GM?

«Depuis 2009, nos ventes n’ont cessé de croître, constate, dépité, Daniel Schneller, patron du marketing et des relations publiques auprès de Chevrolet Suisse. Et en 2013, nous avons littéralement atteint des sommets. Ce qui nous rend tristes et heureux à la fois. Sûr, personne ne s’attendait chez nous à une telle décision.»

 

Pragmatisme

Du côté d’auto-suisse, l’association des importateurs d’automobiles, l’histoire, récente ou pas, incite au pragmatisme: «Ici, les marques vont et viennent. Que reste-t-il de toutes ces anglaises présentes dans les années 70?» nous interpelle Max Nötzli. Le président d’auto-suisse juge aussi que la décision de rebaptiser du nom de Chevrolet les Daewoo comportait un risque: «De toute façon, Chevrolet n’était pas une marque connue en Europe, à l’exception de la Suisse. On savait que Louis Chevrolet était d’ici et sa griffe a été très populaire dans les années 50-60, notamment.»

Par contre, le marché helvétique fait vraiment figure d’exception. «Nos compatriotes aiment bien retrouver une part de leur pays dans une voiture. C’est pour ça qu’ils ont tout de suite adopté la Smart. Parce que l’idée venait de Nicolas Hayek. Ils s’en sont un peu détournés, puisqu’il s’agit maintenant d’une Mercedes.»

 

Quel gain pour Opel?

Histoire d’en revenir à Chevrolet, Max Nötzli note que pour General Motors, la Suisse ne joue aucun rôle et que le marché européen de cette marque est tout sauf important par rapport aux deux Amériques et à l’Asie.

«Par contre, je ne suis pas sûr que l’opération va profiter à Opel, comme c’est planifié, vu que la majorité des Chevrolet vendues en Europe étaient quasiment des Opel.»

Exemple? La Volt et l’Ampera. Mais il y en a d’autres.

Au fait, d’autres marques pourraient-elles connaître ce funeste destin? Eh bien notre interlocuteur n’en sait rien. Il constate que Lancia a finalement été sauvée et que Fiat se révèle «too big to fail», comme on dit chez les requins de la finance. Fisker est en faillite, mais il s’agit d’un marché de niche pour chihuahuas. «Les temps sont durs et la concurrence est impitoyable, relève cependant Max Nötzli. Alors, oui, des marques vont disparaître, mais pour être intégrées dans des groupes plus grands.»

 

Le marché le plus ouvert

Cela dit, le marché suisse restera bel et bien le plus ouvert du monde. Ici, le protectionnisme n’a pas cours, et pour cause. Enfin, comme le relève le boss d’auto-suisse, les Helvètes adoptent très vite les nouvelles marques apparues sur le marché. Ce fut le cas pour les japonaises et les coréennes, «ce le sera aussi pour les chinoises, prédit Max Nötzli. Oui, nous possédons véritablement le marché le plus complet et le plus neutre du monde.»

Pendant ce temps, chez Chevrolet Suisse, on entend se glisser dans la peau de l’orchestre du Titanic. Quitte à jouer «El Degüello» comme les Mexicains devant Fort Alamo? Ce qui est sûr, c’est qu’on ne fera pas de quartier. Pour le plus grand bien de la clientèle, les soldes ont commencé avec des slogans chocs. «Celui qui change de voiture actuellement a tout intérêt à acheter une Chevrolet», soutient un Daniel Schneller cajoleur. Avis aux amateurs, 1500 bolides doivent encore trouver preneur. Mais pas question de miser sur de nouveaux modèles. Certes, la Corvette poursuivra sa carrière européenne. Bon, que les propriétaires de Cruze, Trax, Captiva ou autres Spark se rassurent: «Ils n’auront aucun problème à trouver des pièces de rechange. La loi oblige chaque constructeur à assurer un minimum de dix ans de maintenance. Et puis, pas de panique! il y aura toujours des garages et des agents pour assurer l’après-vente, en Suisse comme en Europe. En tout cas, nous nous battrons jusqu’au bout pour nos agents. Nous avons des relations extraordinaires…»

Le mot de la fin? «Eh bien, eu égard à nos offres, je maintiens qu’acheter une Chevrolet serait une excellente idée dans le contexte actuel», glisse encore Daniel Schneller.

Sûr qu’il le répétera à Genève.

 

***

 

L’exemple de Daihatsu et… Subaru

Roland Hüsser, directeur de Daihatsu, aujourd’hui passé chez Subaru avec la même fonction, a dû gérer la disparition de la première marque citée.

 

On lui a demandé s’il a été difficile de maintenir l’intérêt de la clientèle et du réseau d’agents après l’annonce du retrait d’Europe. Et quelle fut sa stratégie adoptée pour finir en beauté.

«Finalement, ce ne fut pas trop difficile, car nous avons obtenu de bonnes possibilités dans le groupe Emil Frey. Nous avons d’abord prolongé la garantie de 3 à 5 ans dans l’ultime année de vente pour rassurer la clientèle. Puis, nous avons établi une organisation de service après-vente et pièces détachées qui peut fonctionner 10 ans ou plus, si nécessaire. Cela a été possible grâce à la collaboration avec Toyota Suisse. Enfin, tous nos collaborateurs ont retrouvé une place de travail au sein du groupe Frey. Ainsi, on a toujours accès à leur savoir-faire au cas où. Tous les concessionnaires Daihatsu ont par ailleurs accepté de conserver leur contrat de service. Et donc de s’imbriquer pour assurer le service après-vente. Nous nous sommes enfin engagés à trouver si possible une solution alternative en remplaçant la vente de Daihatsu par une autre marque du groupe.»

 

Et Subaru? Pareille mésaventure pourrait-elle arriver à une marque comme Subaru?

«L’évolution galopante de la réglementation de la construction et de la production des voitures en Europe rend effectivement la participation d’un constructeur qui n’a pas sa base et son marché principal en Europe toujours plus compliquée et plus chère. Mais si l’on compare Subaru avec Daihatsu, il y a quand même une grande différence.

»Daihatsu n’a guère connu d’activités en dehors de l’Asie et de l’Europe de l’Ouest. Ni en Russie, ni dans les pays d’Europe centrale et surtout pas en Amérique de Nord.

»Subaru est bien placé en Amérique du Nord (avec actuellement des chiffres records) et est également présent en Russie. Donc, ses activités sont beaucoup plus diversifiées. Vu que les préférences des acheteurs américains sont actuellement assez proche de celles des Européens (tendance SUV/crossover de taille moyenne), nous n’avons pas de raisons de nous interroger sur l’engagement de Subaru en Europe pour le futur.»

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus

L’auto de demain déjà aujourd’hui

Opel • Juste avant Francfort, l’importateur suisse a dévoilé la nouvelle Astra. Efficacité, innovation et performances en sont les trois concepts directeurs.

Gigantesque à l’intérieur

Skoda Superb - Les deux déclinaisons de la Skoda Superb de 3e génération ont été présentées à deux mois d’intervalle. La berline est commercialisée en Suisse depuis fin juin, tandis que le modèle Combi le sera dès septembre.