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Canton

Kevin, chasseur de cambrioleurs

Fraîchement installée à Fribourg, la start-up Mitipi SA développe un simulateur de présence


 Thibaud Guisan

Thibaud Guisan

28 juin 2021 à 04:01

Technologie » C’est un petit boîtier qui doit son nom au film Maman j’ai raté l’avion. Baptisé Kevin, l’appareil a pour mission de faire fuir les cambrioleurs, comme y parvient le jeune héros de la comédie sortie en 1990. La technologie est développée par la start-up Mitipi SA, qui vient de s’installer à Fribourg, sur le site de Bluefactory.

Placé dans une maison ou dans un appartement, Kevin est un simulateur de présence, avec des sons, ainsi que des effets de lumière et d’ombre. Mis sur le marché en avril 2019, l’appareil a déjà été écoulé à un peu plus de 3000 exemplaires en Suisse. «Le prochain pas, c’est de nous implanter en Allemagne et en France, où nous espérons vendre 50’000 appareils dans les deux ans à venir», ambitionne Patrick Cotting, directeur de la start-up.

Faillite évitée

Le projet est né en 2016, à l’initiative de la compagnie d’assurances Helvetia, qui cherchait une solution pour réduire le nombre de cambriolages. Le groupe de développeurs a fini par prendre son indépendance, en créant Mitipi, en 2018 à Zurich. «Avec la pandémie, la start-up a connu de grosses difficultés financières et est presque tombée en faillite. Je trouvais dommage que cette super innovation suisse disparaisse en quelques mois. Il fallait la sauver», raconte Patrick Cotting, qui est entré dans l’actionnariat de la start-up à travers sa société, CCI Cotting (lire plus bas).

3000

exemplaires de «Kevin» ont déjà été vendus en Suisse

Le Singinois établi dans le canton de Zurich décide alors de transférer la petite entreprise des bords de la Limmat, vers ceux de la Sarine, à Fribourg. Mitipi est attirée sur le site de Bluefactory par la présence du Smart living lab, le centre de recherche sur l’habitat du futur de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, la Haute Ecole d’ingénierie et d’architecture de Fribourg et l’Université de Fribourg. «Nous pourrons nous intégrer dans les recherches et développer des synergies avec d’autres start-up. L’objectif est d’employer une vingtaine de collaborateurs d’ici à 2024 à Fribourg», annonce Patrick Cotting, qui salue l’accueil qui a été réservé par le canton à Mitipi, soutenue notamment par Fri Up, l’association qui accompagne les jeunes entreprises fribourgeoises.

Technologie brevetée

Un autre lien existait avec le canton, puisque le bureau d’ingénieurs Sdataway, à Châtel-Saint-Denis, est fortement impliqué dans le développement de la technologie qui fait fonctionner le simulateur de présence. «Pour le moment, la conception du produit et le software se font en Suisse, mais la production de l’appareil est réalisée en Chine. A l’avenir, nous aimerions que Kevin devienne un produit Swiss made. Dans ce but, nous cherchons un producteur dans le canton de Fribourg», annonce Patrick Cotting, qui note que 5 millions de francs ont déjà été investis dans le développement de la technologie. Deux brevets protègent par ailleurs la technologie.

«Nous avons interviewé des cambrioleurs. Ce qu’ils redoutent le plus, c’est d’être confrontés aux habitants d’un logement.»
Patrick Cotting

Concrètement, Kevin, qui peut également être utilisé comme haut-parleur à connexion Bluetooth, simule la présence des résidents, accomplissant leurs activités quotidiennes, non seulement la nuit, mais aussi le jour. A cet effet, l’appareil dispose de 70 heures de sons préprogrammés (conversations, bruits de vaisselle, d’animaux, brossage de dents…), tout en étant capable de produire différents effets de lumière aléatoires (lampes, ombres, télévision…). «Nous avons interviewé des cambrioleurs. Ce qu’ils redoutent le plus, c’est d’être confrontés aux habitants d’un logement. Quand ils ont le moindre doute, ils iront plutôt chez le voisin», rapporte Patrick Cotting, en indiquant que deux tiers des cambriolages ont lieu durant la journée.

L’appareil, qui peut être programmé à l’aide d’une application pour téléphone portable, a évolué depuis ses débuts. Dans une nouvelle version, Kevin 2.0, il est possible de personnaliser des sons. «Car ce n’est pas très crédible de diffuser des gammes de piano si personne n’en joue à la maison», illustre le directeur de Mitipi. La start-up, qui réunit une dizaine de collaborateurs, travaille actuellement au développement de Kevin 3.0. «Le but est de renforcer la technologie en la rendant encore plus intelligente et réaliste. De nouvelles fonctionnalités sont envisageables. Kevin pourrait communiquer avec d’autres appareils», note Qui Cung, chef de projet.

Effets psychologiques

Les solutions de sécurité sont nombreuses sur le marché: caméras, vidéosurveillance, alarmes, etc. «La plupart des systèmes permettent la détection d’intrusions. Avec Kevin, nous sommes actifs dans le domaine de la prévention, ce qui nous distingue. A la fin, le but est d’éviter les cambriolages. Car, finalement, tout le monde a une assurance contre le vol. Par contre les effets psychologiques d’un cambriolage sont énormes. C’est un sentiment très étrange de savoir qu’un intrus s’est introduit dans votre maison et votre quotidien», souligne Patrick Cotting, qui note que Kevin a remporté plusieurs prix lors d’événements internationaux.

Outre les ménages, Mitipi espère convaincre les régies immobilières d’acquérir Kevin, proposé au prix de 299 francs ou, depuis peu, en location, sous la forme d’abonnement. La start-up ambitionne de s’imposer comme un nouvel acteur dans le domaine de la sécurité. Elle a notamment conclu un partenariat avec une start-up berlinoise, qui propose Livy, un système d’alerte et de détection de fumée. Des synergies ont déjà été mises en place avec les services de conseil du groupe Securitas, qui compte parmi les actionnaires de Mitipi.

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