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Canton

Incendie de Vuisternens-en-Ogoz. fromagers à la recherche de solutions

Les fromagers victimes de l’incendie de jeudi dernier recherchent des places dans des caves d’affinage

Suite au sinistre de jeudi dernier à Vuisternens-en-Ogoz, les fromagers locataires de la halle détruite doivent répartir leur production chez leurs collègues de la région.

 Sylvain Cabrol

Sylvain Cabrol

9 mars 2023 à 02:01

Gruyère AOP » Le calme règne dans le village de Vuisternens-en-Ogoz, théâtre jeudi dernier d’un important incendie qui a détruit une cave d’affinage de Gruyère AOP (La Liberté des 3 et 4 mars). Plus de 10’000 meules parties en fumée, offrandes involontaires à des dieux capricieux. Sous la pluie glacée qui arrose la localité, il faut cependant avoir le nez fin pour percevoir les derniers relents du récent sinistre. Mais la vue de la halle calcinée, visible depuis la route de Villarlod, constitue un rappel frappant.

Maintenant que les flammes se sont éteintes et tandis que les stigmates du feu demeurent, les artisans locataires de l’installation doivent trouver des solutions de remplacement pour poursuivre l’affinage de leurs fromages. A cet égard, tous ne sont pas logés à la même enseigne.

Vuisternens-en-Ogoz: grande opération de nettoyage en vue

Pour rappel, le local détruit, propriété de Procimmo Real Estate SICAV, était loué, d’une part, par Mifroma, filiale du groupe Migros, et, d’autre part, par deux fromagers de la région. Mifroma s’en servait pour l’affinage de Gruyère AOP et de Gruyère AOP d’alpage entre trois et dix mois, tandis que Nicolas Charrière et Jérôme Raemy, respectivement patrons des fromageries d’Ogoz et de Farvigny, se chargeaient de l’affinage de Gruyère AOP durant les trois premiers mois.

Affinage à durée variable

«L’idée, c’est de trouver des gens qui ont de grandes caves»
Nicoals Charrière

Il peut être utile de clarifier ici les rapports de la première et des seconds. Et de comprendre dans les grandes lignes le fonctionnement de la filière gruyère. En début de course, les producteurs de lait livrent leur production, dans la région délimitée par le label AOP, aux fromagers, qui se chargent de la première phase d’affinage. «Le fromager garde chez lui, en principe dans une cave attenante, les jeunes meules jusqu’à environ quatre mois», explique Jean-Marie Droz, directeur de CASEi, société de conseil en industrie laitière sise à l’Institut agricole de Grangeneuve. «Au terme de cette première phase, l’affineur prend en charge les meules. Il poursuit l’affinage pour des durées qui peuvent aller de 5 mois minimum à 24 mois pour les gruyères d’exception, la grande majorité étant vendue autour de 10 mois. Puis il en assure la commercialisation auprès des distributeurs.»

A Vuisternens, les deux fromagers sont donc des fournisseurs de Mifroma, qui est elle aussi impliquée dans le processus d’affinage. Or, Mifroma est de loin la victime la moins affectée par cet incendie, dans la mesure où, selon Tristan Cerf, porte-parole de Migros, l’enseigne orange «utilisait les caves de Vuisternens-en-Ogoz comme cave d’affinage secondaire durant la saison d’été». La cave principale, située à Ursy, est l’une des plus importantes du canton.

4’000

environ, le nombre de places d’affinage dont les formagers sinistrés ont besoin 

Pour les fromagers, en revanche, la situation est plus délicate. Il y a certes des places vacantes chez les grands affineurs. A titre d’exemple, Ralph Perroud, directeur général de Fromage Gruyère SA à Bulle, estime le taux d’occupation actuel de ses installations à 68% pour une capacité de 130’000 meules de 35 kg. Un taux qui continuera de baisser jusqu’à l’été avant de repartir à la hausse.

Mais ces infrastructures ne sont pas adaptées pour accueillir de jeunes meules. Aussi, Nicolas Charrière et Jérôme Raemy doivent trouver de la place chez leurs confrères. Les deux hommes ont pris l’habitude de travailler ensemble et souhaitent poursuivre leur collaboration malgré les circonstances. «L’idée, c’est de trouver des gens qui ont de grandes caves», explique le patron de la Fromagerie d’Ogoz, voisine immédiate de la cave sinistrée. «Il nous faudrait 3’500 à 4’000 places à nous deux, mais ce sera difficile à trouver sur un seul site. Ces dernières années, beaucoup de sociétés se sont mises ensemble pour créer des projets communs. Et quand ils conçoivent leurs installations, nos confrères pensent en fonction de leurs besoins, pas au cas exceptionnel où des collègues se retrouveraient dans notre situation. Il y a bien un tournus, mais, quand des places sont libres, il faut en profiter pour enlever les planches sales, les nettoyer, les laisser sécher. Ça réduit encore plus les disponibilités.»

Solidarité de la filière

A ce stade, les deux artisans cherchent encore où et comment répartir leur production. Sachant qu’une jeune meule doit, dans un premier temps, être salée quotidiennement, ils espèrent trouver de la place chez des fromagers à la fois proches de chez eux et disposant d’un nombre de places suffisant, afin de ne pas multiplier les déplacements. «On va peut-être pouvoir utiliser 1000 places chez un collègue», précise Nicolas Charrière. «On n’a pas encore toutes les réponses, mais il y a une bonne solidarité au sein de la profession.»

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