10 août 2023 à 21:20
L’abondance de biens conduit à une impasse. C’est ce qu’on se dit lorsqu’on est un indécis de mon espèce et qu’on arrive chez ce marchand de glaces qui propose 120 parfums! Les papilles turgescent tandis que les pupilles balaient les congélos comme des essuie-glaces un soir d’orage. «Servez d’abord la p’tite famille là, ça me laissera un peu de temps pour choisir.» Quinze familles plus tard, on a juste réussi à faire une présélection de 50 arômes. On élimine moka, noisette et chocolat: trop commun. On évite vanille-fraise: trop suisse-alémanique. Puis on bute sur l’inattendu: poulpe, roquefort, Rivella, huile d’olive, encre de seiche, Aromat ou cervelas. On jette un coup d’œil furtif dans les angles du magasin pour voir s’il y a une caméra cachée qui cherche à nous piéger. Personne ne nous filme mais on comprend pourquoi Tripadvisor a mis 5 points verts dans la catégorie «originalité». Nous, on mériterait aussi un 5 sur 5 pour l’option «pigeons de première classe».
L’hyperchoix, pour certains, est une fenêtre ouverte à tous les possibles. Pour moi, c’est un volet clos. Des barrières de péage placées tous les 50 mètres sur l’autoroute de mon indécision. A chaque hésitation, des digues qui se dressent dans le flux de ma journée, mettant parfois plusieurs fuseaux horaires entre deux prises d’initiative. En effet, ces hésitations sont autant de défaites face au temps, elles nous butinent le ciboulot, valsant à contretemps entre ses deux hémisphères. Du matin au soir, elles nous cinglent les neurones. Espresso ou allongé? Slip ou boxer? Ici tout commence ou Demain nous appartient? Jogging ou canapé? Tartare ou wok-légumes? Tisane ou déca? Plus de 10 000 décisions sont prises chaque jour par notre cerveau. Une toutes les sept secondes, sommeil compris! Aussi fréquent que le clignement des yeux ou qu’une youtubeuse téléversant un selfie.
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