Dépressions en hausse
L’état psychologique des jeunes est au plus bas. Dominique de Quervain revient sur la situation
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Igor Cardellini
7 février 2021 à 22:03
Pandémie » L’état de santé mentale des Suisses empire tandis que la pandémie s’inscrit dans la durée. Et en Suisse romande, là où les mesures ont été plus dures, les dépressions graves sont aussi plus nombreuses. Les contours du profil des personnes qui les subissent commencent à être dessinés. Une étude réalisée à l’Université de Bâle en trois volets permet de montrer que les jeunes de 14 à 24 ans souffrent plus de la situation. Trois questionnaires soumis en avril, en mai et en novembre à plus de 10 000 répondants chaque fois scrutent une évolution inquiétante. Dominique de Quervain, responsable de la série de sondages, directeur du département de neurosciences cognitives à l’Université de Bâle et membre de la task force scientifique Covid-19 revient sur les résultats de l’étude et défend des contre-mesures plus fortes de la part de la Confédération.
Le nombre de personnes souffrant de symptômes dépressifs graves s’est multiplié par six en un an (jusqu’à 18% des répondants de votre étude). A-t-on une idée de combien de personnes cela représente dans le pays?
Dominique de Quervain: Non, nous ne pouvons dire avec précision combien de personnes souffrent de symptômes dépressifs dans le pays. Avant la pandémie, les dépressions modérées à graves étaient estimées à 2% de la population. Notre étude, réalisée sur la base d’un questionnaire en ligne, n’est pas représentative mais suffisamment de personnes y ont participé pour refléter un large spectre de la population suisse. L’intérêt de notre démarche réside dans ce que l’on apprend de l’évolution de la situation entre le premier lockdown où 9% des répondants indiquaient des symptômes de dépression sévère contre 18% en novembre.
Quels facteurs induits par la pandémie agissent particulièrement sur le moral des gens?
Le poids des pertes financières est un des facteurs principaux mentionnés par les répondants. Deux autres raisons importantes sont l’augmentation des conflits au sein du foyer et l’anxiété face à l’avenir. Ceci notamment en raison des changements de situation à l’école, dans la formation professionnelle ou au travail. Pour tous ces facteurs, les répondants signalent qu’ils sont plus pesants par rapport au premier confinement. Le seul facteur ayant diminué depuis le premier lockdown est le poids lié à la prise en charge des enfants. La pression provoquée par les restrictions sociales et la crainte de voir des proches tomber malades et mourir du Covid-19 sont restées stables à un niveau élevé.
Les symptômes dépressifs touchent plus les 14 à 24 ans. C’est une période où il est important de pouvoir se projeter dans l’avenir…
Oui, c’est une phase très sensible de l’existence où les jeunes vivent de nombreux changements qui induisent déjà à la base un niveau élevé de stress. Les résultats pour ce groupe d’âge, le plus affecté relativement aux autres, nous préoccupent. Ils indiquent une perte d’intérêt pour les choses, un sentiment d’abattement, des problèmes de sommeil, de la fatigue, des difficultés à se concentrer. A l’inverse, ce sont les 65 ans et plus chez qui nous notons les plus faibles niveaux de symptômes dépressifs. C’est une catégorie moins touchée financièrement et dont les activités sont beaucoup moins affectées.
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