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Histoire vivante

Le Montreux Jazz, une fête sans fin

Le festival organisé dès 1967 par Claude Nobs a gagné rapidement une renommée mondiale

Claude Nobs and Aretha Franklin_1972

Jean-Philippe Bernard

Jean-Philippe Bernard

17 mars 2022 à 23:15

Temps de lecture : 1 min

Festival » Cette folle histoire démarre dans une ville endormie sur les bords du Léman. Au milieu des années 1960, Montreux, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, cherche un second souffle en songeant avec nostalgie au temps où la grande bourgeoisie britannique profitait du microclimat et faisait du canotage en attendant l’heure du thé. Tout cela est révolu lorsqu’un certain Claude Nobs, ex-cuisinier et désormais jeune employé de l’office du tourisme local, décide de rallumer la lumière dans sa ville natale en organisant un festival de jazz. Depuis son plus jeune âge, Nobs (1936-2013) est un mélomane passionné.

En 1966, il assiste au concert du saxophoniste Charles Lloyd au festival d’Antibes Juan-les-Pins. Complètement subjugué par la performance de l’Américain, le Vaudois décide de créer un festival à Montreux l’été suivant et d’inviter Lloyd en vedette. Quelques heures plus tard, il croise sur la plage René Langel (1924-2021), un journaliste neuchâtelois féru de jazz. Les deux hommes ne se connaissent pas mais sympathisent rapidement. Ils décident de s’associer avec Géo Voumard (1920-2008), un pianiste et animateur de radio pour mener leur projet à bien, en dépit d’un modeste budget de 10’000 francs!

Spécimen rare

De fait, quelques mois plus tard, le 18 juin 1967, Charles Lloyd et ses prestigieux complices (Keith Jarret au piano, Ron McClure à la contrebasse, Jack DeJohnette à la batterie) enflamment le Casino de Montreux en clôture d’un week-end durant lequel se sont succédé différents orchestres affiliés à des radios européennes. Yvan Ischer, musicien, journaliste, producteur et animateur d’émissions de jazz passionnantes, était là. La rumeur prétend d’ailleurs qu’il n’a pas manqué une édition depuis, ce qui fait de lui un spécimen rare.

Lorsqu’on le lui rappelle, il rigole: «Je ne suis pas le seul dans ce cas. En revanche, ce qui me distingue sûrement des autres vétérans, c’est que j’ai commencé très jeune. Je n’avais que 6 ans en 1967 mais j’étais présent à Montreux ce dimanche 18 juin. Après, il est très difficile pour moi de savoir si mes souvenirs sortent réellement de ma mémoire où s’ils sont induits par des photos prises en cette occasion. Ce que je sais, c’est que mes parents, en fervents mélomanes, étaient enthousiastes à l’idée qu’un nouveau festival voie le jour près de chez eux. Je conserve d’ailleurs précieusement les billets qu’ils avaient acquis pour l’événement… En ce qui me concerne, l’après-midi du concert, j’ai eu l’occasion de me rendre sur place pour faire dédicacer un disque, ou peut-être un programme, à Charles Lloyd. Il ne m’a pas embrassé mais presque, tout heureux de voir un si petit garçon figurer parmi ses admirateurs. Il m’a raconté des trucs fantastiques auquel je n’ai strictement rien compris mais c’était merveilleux: j’avais capté l’attention de ce monsieur aussi charismatique que Jimi Hendrix qui était courtisé par tout le monde. Nous nous sommes croisés de nombreuses fois depuis et sommes toujours amis…»

Provocation rock

Galvanisés par l’accueil réservé à Lloyd, Nobs et ses complices repartent à l’aventure l’année suivante. Du 12 au 18 juin 1968, 20 concerts sont programmés, dont ceux de Bill Evans, Brian Auger, Jan Garbarek et Nina Simone. Douze mois plus tard, Nobs «provoque» les amateurs de jazz en programmant du rock. Ainsi, quelques semaines avant de passer à la postérité sur la scène de Woodstock, Ten Years After fait rugir les amplis avec son hymne I’m Going Home. Ouvert à toutes les musiques, «Monsieur Claude» va profiter de la morte-saison pour inviter à Montreux des groupes pop en vogue tels que Pink Floyd, Black Sabbath ou Led Zeppelin.

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