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Économie

Bâle-Campagne. Plainte déposée contre l’entreprise Prime Energy Cleantech

Une première plainte pénale a été déposée dans le canton de Bâle-Campagne, après que l’entreprise bâloise Prime Energy Cleantech a annoncé sa prochaine faillite à ses investisseurs.

L’entreprise, qui a pignon sur rue à Genève, a annoncé le 18 octobre sa faillite par courriel à ses investisseurs (archives).KEYSTONE/GAETAN BALLY

ATS
AWP

ATS et AWP

Aujourd’hui à 15:07, mis à jour à 17:45

Temps de lecture : 4 min

Parmi ceux-ci figurent des centaines de Romands qui ont souscrit des obligations auprès de cette société spécialisée dans les panneaux photovoltaïques. La plainte concerne plusieurs millions de francs investis dans Prime Energy Cleantech qui pourraient ne jamais être récupérés suite à l’annonce de la débâcle, a indiqué à l’agence AWP une source proche du dossier. Contacté, le Tribunal pénal de Bâle-Campagne n’a pas souhaité confirmer ou démentir cette information.

L’entreprise, qui a pignon sur rue à Genève, a annoncé le 18 octobre sa faillite par courriel à ses investisseurs, ont révélé jeudi plusieurs médias romands. Pour financer ses investissements dans des installations photovoltaïques en Europe, elle émettait jusqu’alors des obligations dites «vertes» auprès de particuliers.

Bertrand Piccard pour ambassadeur

Avec l’explorateur suisse Bertrand Piccard pour ambassadeur, Prime Energy Cleantech a suscité l’engouement auprès de centaines d’épargnants, qui s’estiment désormais grugés. «La majorité d’entre eux ont investi des dizaines, voire des centaines de milliers de francs. Certains ont même perdu une bonne partie de leur retraite», a indiqué à AWP Jérôme Fontana qui, avec d’autres investisseurs, a formé un groupe de soutien sur WhatsApp et Facebook, dans le but d’organiser la réaction des victimes.

«Nous avons déjà récolté pas mal de données et nous estimons que les obligations émises se montent, pour l’heure, à environ 10 millions de francs. Les actions atteignent elles entre 2 et 5 millions de francs», détaille-t-il, tout en s’estimant heureux de n’avoir acheté qu’une seule obligation, au prix de 10’000 francs.

Les investisseurs, qui sont chaque jour plus nombreux à se faire connaître à travers les réseaux sociaux, viennent de Suisse romande, mais aussi de France. Dans leurs commentaires, ils expriment leurs inquiétudes et demandent des explications.

«Aucun membre de la direction, ni l’actionnaire principal de Prime Energy Cleantech, Laurin Fäh, ne nous a donné plus d’information», déplore M. Fontana. Selon lui, le fait que la société n’ait pas encore organisé de réunion avec ses actionnaires et investisseurs «suscite toutes les suspicions».

Dans le courriel adressé aux investisseurs et vu par AWP, l’entreprise explique que l’actionnaire majoritaire, des sociétés affiliées ainsi que des parties proches de cet actionnaire sont devenus des débiteurs déterminants, rencontrant actuellement «des difficultés financières et ne pouvant plus faire face à leurs obligations».

En conséquence, la trésorerie et les liquidités de la société ont été «gravement affectés».

Des prêts contraires à la loi

«La direction était au courant de ces prêts excessifs, ou alors fermait les yeux, puisqu’ils avaient été identifiés comme contraires au code des obligations dans un rapport d’audit de PWC datant de 2022», s’étonne M. Fontana, qui souhaiterait des éclaircissements de la part de Khalid Belgmimi, le directeur général (CEO).

Dans ce document, on peut constater que les prêts accordés à l’actionnaire et à des sociétés liées sont passés de 37,3 millions fin juin 2021 à 70,5 millions fin 2022. PCW y relève que le prêt de 19,5 millions accordé à l’actionnaire malgré le manque de réserves disponibles «représente une restitution interdite de capital au sens de l’art. 680 al. 2 du code des obligations».

Contacté, Laurin Fäh, refuse d’endosser la responsabilité de la débacle: «Le prêt en question a par la suite été garanti et est donc conforme à la loi. J’ai remboursé 3,2 millions en cash et plus de 6 millions sous forme de compensations», relate-t-il. Il soutient en outre que 6 millions auraient été réinjectés dans une entreprise du groupe Prime Energy au Portugal, à l’instigation de M. Belgmimi, «un ami de longue date».

Des erreurs «partagées»

«Je n’ai peut-être pas fait tout juste, mais je ne suis pas le seul à avoir fait des erreurs», concède-t-il. Il reproche notamment à M. Belgmimi de ne pas avoir vendu des immeubles du groupe l’an dernier, desquels il aurait pu tirer des liquidités.

Le problème vient également de l’Autorité de surveillance des marchés financiers (Finma) qui a bloqué l’émission des obligations, selon lui. «La Finma a également constaté des fautes graves de la part de M. Belgmimi», confie-t-il.

Interrogé sur le sujet, Bertrand Piccard, affirme de son côté «conserver sa confiance» dans le CEO. Il souligne que les filiales de Prime Energy continuent à ramener des bénéfices à la société. «Les actifs semblent aussi pouvoir être mobilisés. Cela devrait permettre de rembourser progressivement les investisseurs».

M. Piccard, qui est lui-même actionnaire et investisseur, s’étonne tout de même que M. Fäh ait pu «puiser des sommes très importantes pour son usage personnel, sans réaction de l’organe de contrôle.»

Le groupe Prime Energy, maison mère de Prime Energy Cleantech, est implanté dans toute l’Europe et compte une quinzaine de sociétés dédiées aux centrales solaires, exploitant une centaine de ces installations en Suisse et sur le continent. Il possède également une dizaine de firmes dans l’immobilier.