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Suisse

Barrage à l’homophobie

Les citoyens suisses condamnent sans équivoque toute discrimination liée à l’orientation sexuelle

Codirectrice de la campagne du oui.

 Christiane Imsand

Christiane Imsand

9 février 2020 à 23:11

Homosexualité » «J’avais la boule au ventre en attendant les résultats; c’est un énorme soulagement», s’exclame le conseiller national Mathias Reynard, la voix un peu rauque à force de sollicitations médiatiques. Une initiative parlementaire du socialiste valaisan est à l’origine de l’extension à l’homophobie de la norme pénale contre le racisme, approuvée hier par 63,1% des suffrages. «Le résultat est plus net qu’au parlement où il a fallu longuement batailler, souligne-t-il. C’est un signal magnifique pour une Suisse de la tolérance, des droits humains et du vivre-ensemble.»

La communauté LGBT+ (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres) se réjouit du signal donné. «Cela montre qu’il n’y a pas de place dans notre société pour certains comportements», souligne Muriel Waeger, codirectrice de la campagne du oui. Mais il ne s’agit pour elle que d’une victoire d’étape. Le prochain combat portera sur l’ouverture du mariage civil aux couples homosexuels, en lieu et place du partenariat enregistré. Le Conseil national en débattra le mois prochain.

Mieux que le racisme

A l’exception d’Uri, Schwytz et Appenzell Rhodes-Intérieures, toute la Suisse a jugé qu’une norme pénale est nécessaire pour protéger les homosexuels contre les appels à la haine et les discriminations. Indice de l’évolution des mentalités, l’approbation est plus nette que pour la norme antiraciste qui avait été acceptée par 54,6% des suffrages en 1994. On note cependant des différences régionales. Le durcissement du Code pénal a particulièrement bien passé la rampe dans les régions urbaines et en Suisse romande. Le canton de Vaud détient le record avec un taux d’acceptation de 80,2%.

Le référendum avait été lancé par l’Union démocratique fédérale (UDF), un petit parti chrétien conservateur, avec le soutien peu actif de l’UDC. «Il faut protéger les libertés individuelles», explique Marc Früh, responsable de l’UDF en Suisse romande. «Je suis éducateur et j’estime que la prévention passe par l’information et l’éducation. Pas par le Code pénal.»

Avec modération

Selon la cheffe du Département de justice et police Karin Keller-Sutter, la norme antiraciste actuelle a été appliquée avec modération et il devrait en aller de même pour son extension à l’homophobie. «La nouvelle norme pénale est directement applicable. Elle devrait entrer en vigueur le 1er juillet.» La conseillère fédérale ne s’attend pas à de nouvelles demandes d’extension à d’autres minorités. «Il existe déjà des lois spécifiques pour protéger les handicapés et les femmes.»

L’UDF se console de son échec en notant qu’elle a permis au peuple de s’exprimer. Elle sera à nouveau au rendez-vous quand il sera question du mariage pour tous. «Si ce projet passe la rampe au parlement, je m’associerai au référendum, annonce Marc Früh. Le mariage est l’union d’un homme et d’une femme. Il a été défini par Dieu. L’ouvrir aux couples de même sexe serait un changement de paradigme contre nature.»

Don de sperme discuté

Cette opinion est de plus en plus minoritaire, la communauté LGBT+ en est persuadée. «Le vote de ce week-end montre que la population est prête pour la discussion», estime le conseiller national Angelo Barrile (ps, ZH) qui ne fait pas mystère de son orientation sexuelle. Mais il faut d’abord que le parlement se mette d’accord sur le contenu de ce mariage. Pour des questions d’opportunité politique, le Conseil fédéral estime qu’il ne faut pas inclure l’accès des couples de femmes à la procréation médicalement assistée (PMA) avec don de sperme. Actuellement, le don de sperme est réservé aux couples hétérosexuels mariés, tout comme la fécondation in vitro.

Pour Mathias Reynard, cette politique des petits pas est une erreur stratégique. «La population vient de démontrer qu’elle était plus ouverte que le parlement. Il faut jouer carte sur table au lieu de pratiquer la politique du salami.» Selon la PLR bernoise Christa Markwalder, vice-présidente de la Commission des affaires juridiques, l’avis de la commission s’est modifié depuis les dernières élections. La majorité est aujourd’hui convaincue qu’il faut ouvrir le mariage en une seule étape.

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