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Société

Une sociologie des «antimasque»

Entre revendications politiques, défiance des autorités et théories complotistes, analyse d’un mouvement


Gilles Labarthe

Gilles Labarthe

21 septembre 2020 à 19:43

Temps de lecture : 1 min

Covid-19 » Sur la lancée de manifestations qui se succèdent depuis des mois aux Etats-Unis, réunissant contestataires de tous bords, corona-sceptiques et souvent, adeptes de théories du complot, les premières manifestations dites «antimasque» ont eu lieu ces dernières semaines en Europe et depuis quelques semaines, en Suisse. Le profil des participants est bien plus complexe qu’il n’y paraît, et leurs revendications parfois difficiles à cerner. Interview d’Olivier Fillieule, professeur de sociologie politique à l’Université de Lausanne.

Vos recherches portent entre autres sur les mouvements sociaux et le militantisme. Comment percevez-vous les récentes manifestations «antimasque» en Suisse?

Olivier Fillieule: Elles ne se distinguent pas des manifestations du même type qui, aux USA, en Allemagne ou encore en France, s’opposent aux politiques de lutte contre le Covid-19. Car parler de «manif antimasque» n’est pas correct. Cela tend à réduire le mécontentement à un rejet irrationnel du masque. Ces mouvements sont bien plus complexes.

Ce qui les motive et les nourrit renvoie d’abord à la gestion souvent mensongère, chaotique, contradictoire et affolée de la pandémie par les gouvernements, lors de la première vague. Ensuite, ces mobilisations ont tout de caravansérails hasardeux où se rassemble une foule bigarrée: en Angleterre, le British National Socialist Movement; Identitäre Bewegung Deutschland et AfD, en Allemagne; en France, militants d’extrême droite issus de Génération identitaire… On y trouve aussi des activistes antivaccins et des conspirationnistes convaincus. Mais encore, dans une bien moindre mesure, des militants d’extrême gauche. A quoi vous pouvez ajouter toutes celles et ceux qui désirent, à travers la contestation des politiques de santé anti-Covid, marquer une défiance et une opposition aux dirigeants politiques, plus généralement aux élites, qu’elles soient politiques, intellectuelles et scientifiques. La manière dont les gilets jaunes ont endossé quasiment comme un seul homme ces questions en est l’éclatante démonstration.

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