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Histoire vivante

Un monde oublié au fond de la Manche

Débarquement • Le documentaire de Marc Jampolsky aborde le «Jour-J» sous un angle inédit: partir des vestiges qui reposent au fond de la Manche pour mettre en évidence le travail des stratèges et des ingénieurs.

L’expédition sous-marine a permis de cartographier la position de 400 épaves, dont ce tank.

Kessava Packiry

Kessava Packiry

7 mai 2014 à 20:47

Le débarquement, dont on célèbre cette année le 70e anniversaire, fait l’objet dimanche d’un passionnant documentaire diffusé dans le cadre d’«Histoire vivante», sur RTS Deux. Signé Marc Jampolsky, le film aborde le «D-Day» sous un angle inédit: partir des vestiges reposant au fond de la Manche pour raconter le défi technique et militaire que les stratèges ont dû relever pour rendre possible la plus formidable opération maritime de l’Histoire.

Le 6 juin 1944, près de 7000 navires en tout genre convergent vers les côtes normandes avec, à leur bord, 150 000 hommes: 4000 d’entre eux y laisseront leur vie ce jour-là. Quant aux embarcations, nombre d’entre elles reposent aujourd’hui au fond de la mer. Sylvain Pascaud, spécialiste des fonds marins, a voulu en dresser l’inventaire. L’an dernier, une expédition sous-marine, filmée par les caméras de Marc Jampolsky, est donc partie explorer la baie de Seine, au large des cinq plages du débarquement (Utah, Omaha, Gold, Juno et Sword). Grâce à des moyens sophistiqués, elle a pu réaliser une carte dressant la position de 400 épaves, allant de la barge de débarquement au char d’assaut, en passant par des cuirassés, des chalutiers, des sous-marins… Un monde oublié. Un vaste musée.

«Opération Neptune»

C’est à partir de ces vestiges que le documentaire nous fait remonter le temps. A l’époque où la décision est prise de lancer l’«Opération Neptune», le volet maritime et sous-marin du débarquement. Près d’un an avant le «D-Day», des submersibles sont envoyés dans la baie de Seine pour évaluer les obstacles installés par les Allemands dans la Manche et sur les côtes. Les Alliés poussent le détail jusqu’à prélever du sable, pour définir quel genre de bateau pourra accoster.

Les ingénieurs mettent alors au point des barges à fond plat, sortes de boîtes à chaussures avec une rampe, inspirées des embarcations utilisées dans les bayous de Louisiane. Deux jours avant le débarquement, il faut aussi penser à dégager des corridors d’accès, en nettoyant la Manche de ses nombreuses mines: des chalutiers feront l’affaire. Enfin, il y a la météo, l’énorme inconnue… Comment prévoir le temps en 1944, sans satellite, sans ordinateur?

Que dire aussi de l’exploit technique de l’ingénieur Allan Becket? A 29 ans, c’est lui qui conçoit le port artificiel au large d’Arromanches. Après le «Jour-J», il fallait débarquer 12 000 tonnes de matériel et 2500 véhicules par jour, soit l’équivalent d’un grand port de commerce de l’époque. Or il n’existait pas de ports en eaux profondes dans ces zones. Qu’à cela ne tienne: on coule 50 navires pour faire rempart aux vagues. Et on assemble des chaussées flottantes capables de supporter le passage de chars de 40 tonnes.

Le documentaire «D-Day, ils ont inventé le débarquement» ne s’arrête pas à l’hommage rendu à tous ces hommes, soldats comme ingénieurs: «Le 70e anniversaire marque, hélas, la dernière cérémonie en présence des vétérans… Les épaves soumises à l’eau de mer vont peu à peu se dégrader. Force est de constater que la mémoire technique est en grande partie perdue. Les plans s’effacent ou ne sont pas inventoriés…», déplorent Jean-Pierre Bailly et Nicolas Deschamp, responsables de MC4 Productions.

Aussi, avec le soutien de Dassault Systèmes, le problème a été pris à bras-le-corps: grâce à ses logiciels, des reconstitutions du port d’Arromanches, d’une barge de débarquement et d’autres véhicules emblématiques de l’époque ont pu être possibles. «Grâce aux plans numériques, cette mémoire est préservée. A l’époque, c’étaient des inventions quasi révolutionnaires», saluent les deux producteurs.

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