Russie. Poutine se dit prêt à rencontrer Trump «à n’importe quel moment»
Vladimir Poutine s’est dit jeudi, lors de sa séance annuelle de questions-réponses télévisée, prêt à rencontrer «à n’importe quel moment» le président élu américain Donald Trump, qui a récemment appelé à une trêve et des négociations entre l’Ukraine et la Russie.
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ATS et AFP
Aujourd’hui à 16:59, mis à jour à 17:29
«Je suis prêt à le faire, bien sûr. A n’importe quel moment», a affirmé le président russe, disant ne pas avoir parlé avec M. Trump «depuis plus de quatre ans».
Cette longue conférence en direct, bien que soigneusement mise en scène, constitue l’une des rares occasions de poser des questions délicates au président russe pour les journalistes et citoyens du pays.
L’émission, qui a duré cette année près de 4h30 et s’est conclue vers 14h40 suisses, a eu lieu à un mois du retour à la Maison Blanche de l’imprévisible Donald Trump.
Le républicain, déjà président de 2017 à 2021, a maintes fois promis de ramener la paix en Ukraine «en 24 heures» et a appelé à un «cessez-le-feu immédiat» ainsi qu’à des pourparlers.
Mais le flou qui entoure son plan suscite l’inquiétude de l’Ukraine.
«Si nous rencontrons un jour le président élu Trump, je suis sûr que nous aurons beaucoup de choses à nous dire», a dit Vladimir Poutine.
Avancées en Ukraine
Vladimir Poutine a assuré que la Russie était prête à un «dialogue» avec l’Ukraine, mais uniquement sur la base des «réalités du terrain», une façon de dire que son pays ne rendrait pas les territoires conquis.
Il a rejeté toute trêve, qui permettrait à l’armée ukrainienne de «faire une pause» et de se réarmer.
Son homologue ukrainien, Volodymyr Zelensky, a répondu jeudi que Vladimir Poutine n’était qu’un «vieux rêveur», en réagissant à sa conférence. «Il vit dans un autre monde. Dans son propre aquarium», a-t-il dit à l’occasion d’un déplacement à Bruxelles.
Volodymyr Zelensky, longtemps fermement opposé à des pourparlers, a récemment nuancé sa position mais demande à l’Occident de solides garanties de sécurité.
Vladimir Poutine a lui affiché jeudi sa confiance en estimant que la situation «changeait radicalement» sur le front en Ukraine, où ses troupes progressent à un rythme inédit depuis les premiers mois de 2022.
Le président Poutine a en revanche admis ne pas savoir quand son armée parviendrait à chasser les forces ukrainiennes de la région russe de Koursk, où elles occupent toujours plusieurs centaines de kilomètres carrés malgré des tentatives des troupes russes, épaulées selon Kiev par des soldats nord-coréens, de les déloger.
«Nous allons absolument les mettre en échec», a néanmoins assuré le président russe.
Cette offensive, la plus importante en territoire russe depuis la Deuxième Guerre mondiale, est source d’embarras pour le Kremlin, qui veut persuader que le conflit en Ukraine n’a pas d’impact sur la vie quotidienne des Russes.
Si c’était à refaire, Vladimir Poutine aurait lancé «plus tôt» son offensive contre son voisin, a-t-il assuré, sous-entendant que la Russie aurait dû mieux s’y préparer.
«Duel» avec l’Occident
Vladimir Poutine a aussi encensé son nouveau missile «Orechnik», une «arme moderne» qui peut porter une charge nucléaire et frapper à des milliers de kilomètres.
L’armée russe l’a utilisé pour la première fois le 21 novembre contre la ville ukrainienne de Dnipro, le présentant comme une réponse aux récentes frappes ukrainiennes contre le sol russe à l’aide de missiles américains et britanniques.
Le président russe a depuis menacé de frapper Kiev, et même directement les pays occidentaux qui arment l’Ukraine.
Jeudi, Vladimir Poutine a proposé à l’Occident un «duel de haute technologie du XXIe siècle» entre l’Orechnik russe et leurs moyens de défense antiaérienne.
«Qu’ils déterminent une cible. Disons: Kiev», a-t-il lancé. «On lancera une frappe là-bas, et on verra ce qui se passe.»
La Syrie, pas une «défaite»
Autre sujet international d’importance, M. Poutine a assuré que la chute en Syrie de Bachar al-Assad, allié proche de Moscou, n’était pas une «défaite» pour la Russie, qui a évité la création d’une «enclave terroriste».
Le sort des deux bases militaires russes en Syrie, cruciales pour les opérations russes en Méditerranée, est cependant en suspens.
Vladimir Poutine a affirmé n’avoir pas encore vu Bachar al-Assad, qui a trouvé refuge en Russie avec sa famille, mais avoir «l’intention» de s’entretenir avec lui.
Il a aussi appelé Israël à retirer ses troupes du «territoire syrien», celles-ci ayant été déployées dans une zone tampon contrôlée par l’ONU séparant les deux pays sur le plateau du Golan.
Sur le plan intérieur, le dirigeant russe a critiqué ses services spéciaux, qui n’ont pas pu empêcher l’assassinat mardi du général russe Igor Kirillov, tué mardi dans une explosion à Moscou revendiquée par Kiev.
«Nous ne devons pas permettre de telles failles», a-t-il martelé.
Le dirigeant a par ailleurs admis que l’inflation galopante en Russie, à 8,9% en novembre selon les chiffres officiels, était un «signal préoccupant».
L’économie russe, après avoir résisté ces trois dernières années, donne des signes d’essoufflement, avec notamment une envolée des taux d'intérêt qui handicape les entreprises, l’affaiblissement du rouble, et des perspectives maussades pour 2025.
La situation de l’économie est «stable», a toutefois tenté de convaincre Vladimir Poutine dans ce show regardé par des millions de Russes.