Gaza, de l’orangeraie à la poudrière

Conflit » Carrefour commercial depuis l’Antiquité, l’oasis idyllique de Gaza subit depuis sept décennies une terrible plongée en enfer. Comment en est-on arrivé là? Spécialiste du Moyen-Orient, le diplomate Yves Besson, professeur émérite à l’Université de Fribourg et ancien responsable de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens à Jérusalem (UNRWA), livre quelques clés pour mieux comprendre la situation dramatique que vit Gaza aujourd’hui. Entretien.

La bande de Gaza a été dessinée en 1947 dans le cadre du Plan de l’ONU pour le partage de la Palestine. Quels sont ses fondements?

Yves Besson: Il faut se souvenir qu’au départ, la bande de Gaza est égyptienne. Gaza était située sur une ligne de chemin de fer ottomane importante, qui longeait tout l’est de la Méditerranée. Depuis l’Antiquité, cette oasis marquait l’entrée de la péninsule du Sinaï. C’était une cité idyllique, relativement peu peuplée, avec de magnifiques orangeraies. Lorsque les Britanniques se retirent de Palestine, elle est soumise à un Gouvernement militaire égyptien. Mais alors qu’en 1950, le roi de Jordanie inclut la Cisjordanie dans son royaume, l’Egypte se contente de faire de Gaza un protectorat militaire. La première occupation israélienne intervient en 1956 dans le contexte de la crise du canal de Suez, mais ne dure que quelques mois. Suit un climat d’«entre-deux» qui permet l’émergence du Mouvement de libération de la Palestine, le Fatah, puis de l’Organisation de libération de la Palestine, l’OLP. C’est à cette époque aussi que des commandos fedayins palestiniens, basés à Gaza, se mettent à lancer des raids dans les territoires israéliens. Tsahal réplique en 1967, lors de la guerre des Six Jours, occupant non seulement Gaza, mais toute la péninsule du Sinaï.