Trésors du cinéma. les bandits pas manchots de «Time Bandits»
En pleine période des Monty Python, Terry Gilliam, le ricain de la bande, se lance en solo et signe avec Time Bandits un petit bijou d’aventure
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Olivier Wyser
21 juillet 2023 à 15:02
Trésors du cinéma (3/7) » Alors qu’Indiana Jones revient cet été pour une ultime aventure, La Liberté sort sa boussole et sa vieille carte pour partir à la recherche des films de chasse au trésor. Au bout du voyage, des épopées mythiques qui ont marqué le septième art d’une grande croix.
Mine de rien, Terry Gilliam peut se vanter d’avoir autant apporté aux cinéphiles de matière à rêver que généré de cauchemars. Le cinéaste américain, pièce rapportée mais ô combien maîtresse des très british Monty Python, est un as de l’illustration, de l’animation et du burlesque. Pas étonnant qu’il se soit tourné vers les univers enfantins à ses débuts derrière la caméra. D’abord avec Jabberwocky, film médiéval inspiré d’un poème de Lewis Carrol, puis avec le génial Time Bandits, dont le titre français à sa sortie, en 1981, était curieusement abscons: Bandits bandits.
Imaginez ce qui se serait passé si Dorothy n’avait pas cheminé le long de la route de briques jaunes en compagnie d’un lion, d’un épouvantail et d’un homme en boîtes de conserve mais plutôt avec H.G. Wells, Roald Dahl et John Cleese? Comme dans un rêve fiévreux, Time Bandits vous fait couler la sueur le long de l’échine, mélangeant l’excitation de l’aventure onirique et la crainte d’un réveil douloureux. C’est agréable à regarder, mais on sent bien que derrière le divertissement pointe un questionnement existentiel aussi inquiétant qu’amusé.
Des nains dans le placard
Kevin est un gamin de 11 ans comme les autres. Passionné d’Histoire et notamment de mythologie grecque, il vit dans son coin pendant que ses parents sont occupés à remplir la maison avec les derniers gadgets ménagers à la mode – Une satire sociale douce-amère que Terry Gilliam ne cessera de mettre en scène, notamment dans son film suivant, Brazil. Une nuit, un chevalier en armure montant un fier destrier sort du placard de la chambre. Fasciné, Kevin croit à un rêve. Mais tout de même, il prépare un baluchon juste au cas où cela se reproduirait. Le lendemain, alors qu’il s’approche du fameux placard, il surprend une joyeuse bande de nains gouailleurs qui n’ont rien à voir avec les niaiseux de Blanche-Neige. Ces petits bonshommes sont des pillards purs et durs, des voleurs de tombes sans vergogne. Ils viennent de dérober une carte au trésor et voyagent dans le temps à la recherche du magot du roi Agamemnon.
L’apparition de l’Etre suprême – la tête flottante du comédien Ralph Richardson – fait déguerpir la bande de gredins qui emmènent Kevin avec eux. En route pour un périple qui les conduira en Italie à l’époque de la bataille de Castiglione (coucou Napoléon Bonaparte, fantastique Ian Holm), dans la forêt de Sherwood à la rencontre d’un Robin des Bois pas exactement aussi preux que dans nos souvenirs (merci John Cleese pour les fous rires) ou encore à bord du Titanic à quelques minutes du grand plouf. Sans oublier une virée à Mycènes, où le grand Sean Connery interprète un Agamemnon puissant lorsqu’il affronte un Minotaure terrorisant mais d’une naïveté sans borne lorsque nos héros de petite taille s’amusent à le faire tourner en bourrique.
Le Bien et le Mal
On l’aura compris, Time Bandits n’est pas une comédie d’aventure comme les autres. Entre les mains expertes de Terry Gilliam, elle devient une réflexion sur le pouvoir et un plaidoyer en faveur du Bien dans son combat perpétuel contre le Mal – incarné à l’écran par le Génie du Mal, un David Warner jubilatoire. Le tout avec cet humour absurde et ce sens du rythme slapstick qui ont toujours fait les grandes heures du cinéma burlesque, de Buster Keaton à Jackie Chan. Première pierre cinématographique méconnue de la trilogie de l’imagination, avec Brazil et Les Aventures du Baron Munchausen, qui eux sont passés à la postérité, ce film est pourtant en tout point remarquable.
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