Vers un combat fratricide à gauche
A Fribourg, un siège du Conseil communal sera particulièrement disputé lors des élections de mars
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François Mauron et Anne Rey-Mermet
23 juillet 2020 à 23:36
Fribourg » La crise du Covid-19 a bouleversé la marche du monde. Dans la capitale cantonale, elle a aussi pris de court les états-majors politiques, qui pensaient avoir un délai supplémentaire pour préparer les élections communales de 2021, puisque celles-ci auraient normalement dû se tenir en automne, après le vote sur la fusion du Grand Fribourg prévu en mars. Seulement voilà, la pandémie en a décidé autrement. Le scrutin sur la fusion est reporté à 2022 dans le meilleur des cas, si bien que les élections auront lieu le 7 mars, comme dans les autres communes du canton.
«Nous avons été chamboulés dans la préparation de cette échéance», reconnaît Matthieu Loup, président du PS de la ville de Fribourg.
Les enjeux de l’élection
La gauche plurielle (Parti socialiste, les Verts, Centre gauche-PCS), on le sait, tient solidement les rênes du pouvoir dans la cité des Zaehringen. Disposant de trois sièges sur cinq au Conseil communal depuis 2006, elle est également majoritaire au Conseil général, avec 43 élus sur 80.
En ce qui concerne l’exécutif, les enjeux sont assez clairs: la gauche veut maintenir ses positions, tandis que la droite rêve, sans trop y croire, de renverser l’ordre établi. Il faut dire que les cinq sortants – le syndic socialiste Thierry Steiert, Andrea Burgener Woeffray (ps), Pierre-Olivier Nobs (cg-pcs), Laurent Dietrich (pdc) et la vice-syndique Antoinette de Weck (plr) – se représentent. Du moins, contactés par La Liberté, tous se déclarent à la disposition de leur parti. Or cela leur confère un avantage indéniable par rapport aux autres candidats, ce qui laisse augurer d’un statu quo.
Si elles sont réélues, Antoinette de Weck et Andrea Burgener Woeffray, qui auront toutes deux 65 ans l’an prochain, pourraient éventuellement se retirer en cours de législature et céder la place au premier des viennent-ensuite de leur liste (l’élection aura lieu à coup sûr à la proportionnelle, comme c’est le cas depuis longtemps).
La gauche plurielle semble par ailleurs avoir le vent dans le dos à Fribourg. Si chaque scrutin répond à des logiques différentes – il faut donc prendre les résultats avec des pincettes –, on constate néanmoins que PS, Verts et CG-PCS sont passés d’un score global de 51,3% des voix en 2016 (élection au Conseil général) à 56% des suffrages aux fédérales de 2019, un résultat d’ensemble dopé par celui des Verts (+10,7 points à 20,9%).
La gauche en ordre dispersé?
Les trois partis de gauche veulent donc garder la majorité. Mais vont-ils partir au combat avec un ticket unique – une stratégie payante depuis 2011 – ou en ordre dispersé, à savoir avec une liste pour chaque formation? «Nous devons mener des discussions avec les Verts et le Centre gauche-PCS, de façon à élaborer la meilleure stratégie pour obtenir au moins trois fauteuils à l’exécutif», note Matthieu Loup. «Nous devons trouver la meilleure synergie au sein de la gauche plurielle pour conserver une majorité qui a fait ses preuves depuis 2006, au grand bénéfice de la population de la ville de Fribourg», fait remarquer Pierre-Olivier Nobs. Les Verts tiennent un discours peu ou prou similaire.
La liste commune semble le moyen le plus sûr d’atteindre ce but. Mais ce scénario n’est pas le plus vraisemblable. En effet, gonflés à bloc par leur succès de l’an dernier et las de jouer les porteurs d’eau, les écologistes sont tentés cette fois de partir en solo, ce qui leur assurerait davantage de chances de décrocher enfin un siège au Conseil communal. En tel cas, PS, CG-PCS et Verts présenteraient chacun leur liste de cinq postulants. La gauche est suffisamment forte pour se permettre une telle tactique, mais cette dernière mettrait en péril le siège de Pierre-Olivier Nobs. Bénéficiant de la prime au sortant, ce dernier serait toutefois directement menacé par des prétendants verts – la députée Mirjam Ballmer? Le conseiller général Julien Vuilleumier? Oliver Collaud, président des Verts de la capitale cantonale et déjà candidat en 2011?
«Il est prématuré de parler de listes uniques ou séparées. L’important, c’est le but commun», indique Pierre-Olivier Nobs. «L’alliance de gauche a toujours bien fonctionné. L’enjeu principal est de maintenir notre majorité», lui fait écho Oliver Collaud. «Que ça soit trois listes ou une seule liste, il existe une volonté de continuer à travailler ensemble», ajoute Matthieu Loup.
A noter que si les Verts partent en solitaires, Pierre-Olivier Nobs sera tenté de demander l’asile sur la liste socialiste, de manière à former un ticket PS-CG-PCS. Mais le parti à la rose n’a guère intérêt à jouer cette carte-là, car elle pourrait mettre en danger la position d’Andrea Burgener Woeffray. Le scénario des trois listes séparées est donc celui qui a le plus de consistance.
La droite sans illusions
A droite aussi, les grands partis devraient faire cavalier seul. Selon la vice-syndique Antoinette de Weck, la liste définitive des candidats libéraux-radicaux au Conseil communal sera annoncée lors de l’assemblée générale de la section, fin septembre. «Nous sommes en train d’établir nos listes, rien n’est encore déterminé», abonde Océane Gex, présidente de la section PLR de la ville de Fribourg et conseillère générale. «Il n’est pas exclu de conclure des alliances, à voir ce qui est faisable, mais rien n’est décidé dans un sens ou dans l’autre», ajoute-t-elle.
Comme les démocrates-chrétiens, les libéraux-radicaux expliquent vouloir proposer une alternative à la majorité de gauche, sans pour autant convoiter franchement un des trois sièges occupés par celle-ci au Conseil communal. «Nous nous sommes construit une identité d’alternative, nous voulons capitaliser sur nos succès et faire la différence par rapport à la majorité de gauche engourdie», relève Simon Murith, président du PDC de la ville de Fribourg et conseiller général. La locomotive de la section locale, le conseiller communal Laurent Dietrich, sera «évidemment candidat à la candidature» pour une deuxième législature. «Il va repartir, c’est sûr. Nous sommes très contents d’avoir un homme qui représente ainsi le dynamisme et le renouveau. Il est motivé et obtiendra ce siège, alliance ou pas», estime Bernhard Altermatt, chef du groupe PDC au Conseil général.
«Lors de la dernière élection, nous avions obtenu un siège plein. Avec notre stratégie, nous pourrions gagner un deuxième siège grâce au plus fort reste», imagine Simon Murith. Une alliance avec les Vert’libéraux, qui comptent actuellement une représentante au Conseil général, est aussi en discussion. Cette stratégie avait déjà été appliquée lors de l’élection de 2016.
Si l’UDC n’a pas non plus arrêté sa stratégie pour le moment, le groupe travaille également à constituer une liste pour tenter de remporter une des cinq places du Conseil communal. «Pour l’instant, tout est encore ouvert. Il n’y a pas encore eu de discussions en vue d’une éventuelle alliance», indique Pascal Wicht, chef du groupe démocrate du centre au Conseil général. Ce serait une première pour ce parti, entré au législatif de la ville en 2006. «Comme lors des dernières élections, nous organiserons peut-être une assemblée électorale au début 2021, mais rien n’est encore décidé», précise Pascal Wicht. Ce qui laissera ensuite quelques semaines à peine à l’UDC avant le dépôt des listes, fixé au 25 janvier à midi.
Les petits partis sont de retour
Quelques petites formations présenteront également un candidat au Conseil communal. Comme en 2016, Claudio Rugo va faire acte de candidature au nom du parti des artistes. «Pour l’instant, je suis seul sur la liste», déclare-t-il. Le mouvement Libre et indépendant y réfléchit également. «Nous aurons probablement une liste. Reste à voir qui y figurera», indique son fer de lance Jean-Jacques Métrailler.
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