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Canton

Le patois se retrouve une jeunesse

De plus en plus de jeunes se rapprochent du patois gruérien. Que ce soit au CO ou sur les planches

A la grande salle d’Albeuve, le Groupe Choral Intyamon présente deux spectacles en patois. Il le fait tous les cinq ans.

 GUILLAUME CHILLIER

GUILLAUME CHILLIER

17 janvier 2018 à 05:00

Gruyère »   Et si c’était l’année du patois gruérien? A en croire Marlène Aeby, présidente du Groupe Choral Intyamon, 2018 pourrait bien être historique. Depuis un an, une dizaine de jeunes se sont inscrits dans son chœur, attirés notamment par le répertoire en patois qu’il propose. Ça tombe bien: cette année, il monte deux pièces de théâtre uniquement en patois, comme il le fait tous les cinq ans. Et trois jeunes de dix-sept ans se sont lancés dans l’aventure (lire ci-dessous).

«Le patois était devenu ringard il y a une quinzaine d’années. Mais nous avons tenu bon, nous avons gardé la ligne», se réjouit Marlène Aeby. Cette vague d’inscriptions est une première, elle qui avait davantage l’habitude d’accueillir des quadragénaires plutôt «posés». «Les enfants de membres ayant pris un peu d’âge ont commencé à rester avec nous après les répétitions. De fil en aiguille, ils se sont motivés à nous rejoindre», explique-t-elle. Tel un effet boule de neige, de plus en plus de jeunes ont ensuite pris goût au patois.

«Un vrai renouveau»

Dans les cycles d’orientation (CO) gruériens, on ressent depuis plusieurs années déjà un nouvel élan pour l’apprentissage du patois, comme en témoignent Bernard Chaney, 68 ans, et Charly Dafflon, 70 ans. Les deux professeurs, qui œuvrent depuis trois ans et demi, rappellent qu’au tournant du XXe siècle, le patois avait été interdit pendant longtemps par le Conseil d’Etat, «car les enfants arrivaient à l’école après avoir appris le patois à la maison. Ils ne parlaient presque pas un mot de français.»

«Le patois a été tellement dénigré! Certains ont été découragés par cette interdiction», relève Charly Dafflon. «Mais aujourd’hui, c’est différent», ajoute Bernard Chaney. Ensemble, ils constatent que l’image du patois a changé, tant chez les jeunes et les citadins que du côté des autorités. D’ailleurs, ce sont elles qui l’ont réintroduit au CO il y a quelques années, en option, lui offrant une nouvelle visibilité. «En 2017/2018, nous avons eu vingt-deux inscriptions, rien qu’au CO de La Tour. Nous avons donc dû diviser la classe en deux», se réjouissent-ils. L’an dernier, seuls cinq jeunes s’étaient inscrits.

Péouz et attardés

Mais comment expliquer un tel engouement? Pour eux, difficile à dire. Mais ils constatent que la gêne qui a pu peser sur cette langue a disparu. Les jeunes, et les plus vieux, osent à nouveau la parler. «Il y a aussi un effet de mode. Les jeunes viennent s’inscrire en groupe», relève Charly Dafflon. «Je sens qu’ils ont l’envie de revenir aux valeurs, aux coutumes. Je vois aussi que les jeunes se remettent à porter le bredzon. Avant, ceux qui s’habillaient comme cela étaient traités d’attardés de la montagne. Et ceux qui parlaient patois étaient des péouz», rigole Bernard Chaney.

Pour Romain Pittet, étudiant au Collège du Sud et membre de la troupe de théâtre, le temps où la population mettait de côté les traditions est aujourd’hui révolu. «C’est une évolution de la société. Je pense que les jeunes, avec la mondialisation et les natels, ont besoin de s’identifier à quelque chose. Car si on sait d’où l’on vient, on sait où l’on va», philosophe-t-il.

Partout dans le canton

Si personne ne peut prédire l’avenir, tous sont d’accord pour dire que le patois vit de remarquables moments de vigueur, avec des sociétés actives un peu partout dans le canton. «Le patois renaît de ces cendres», assure Charly Dafflon. Et Marlène Aeby de conclure: «Il y a des jeunes prêts à reprendre le flambeau. Avec cela, nous avons l’assurance que le patois va se perpétuer.»

Chin ke fô po na dzouta, de Nono Purro, et Lè roba-trabetsè, de Jean Charrière, les 19, 20, 26, 27 janvier à 20h15 et les 21, 28 janvier à 15h. Grande salle d’Albeuve.
Réservations: 079 707 16 41

 

Ils se sont récemment lancés

Romain Pittet

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