5 mars 2021 à 02:01
«Les larmes quelquefois montent aux yeux / comme une source, / elles sont de la brume sur des lacs, / un trouble du jour intérieur, / une eau que la peine a salée» (Jaccottet).
Philippe Jaccottet, que l’Académie romande honora de son Prix de poésie en 2015 pour Œuvres (Bibliothèque de la Pléiade, Editions Gallimard), fut selon moi d’abord un philosophe descriptif de ses ressentis devant la nature (lire aussi LL du 26.2). Cherchant à en découvrir l’insondable pour en éclairer ses mystères de manière la plus objective, l’observateur attentif nous éclaira autant sur le monde qui nous entoure que sur nous-mêmes, sans chercher à nous éblouir.
Son amour de la beauté qu’il interrogea si souvent ne le poussa jamais à nous faire avaler des couleuvres. L’homme comprit que l’on n’entre pas en poésie pour en devenir le gourou, mais pour la servir de tout son être. Cette humilité poussa le poète à traduire les autres. Par-delà la barrière des langues, il sut restituer l’esprit avant la lettre de certaines fines plumes étrangères qui, sans lui, n’auraient pu s’exprimer aussi authentiquement auprès des lecteurs francophones.
Merci, cher Philippe, de m’avoir invité au fil de vos pages et de vos pas à goûter les irrésistibles charmes de votre Grignan dans la Drôme où vous vécûtes des jours heureux auprès de votre tendre épouse, artiste aussi discrète que vous, à laquelle j’adresse toute ma compassion.
Et bon voyage vers cette «Suprême harmonie, justice de l’Illimité» que vous avez su entrevoir «sous les ailes d’oiseaux invisibles»…
Pierre Alain,prés. Académie romande,
Cologny (GE)
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