Un petit air de Robin des Bois

Fiscalité » Certains la nomment l’initiative «Robin des Bois». Une appellation que ses auteurs manient avec prudence. «On peut y voir cette dynamique de redistribution des richesses accaparées par le 1% des plus riches de la population», reconnaît Thomas Bruchez, vice-président de la Jeunesse socialiste, à l’origine du texte. D’où son appellation un peu mystérieuse d’«initiative 99%», car il s’agit de taxer davantage le 1% des plus riches de la population pour en faire bénéficier tous les autres.

Le peuple suisse votera sur ce texte le 26 septembre. Ses partisans ont lancé ce mardi à Berne la campagne. La rhétorique est bien huilée: «Les loyers et les primes augmentent, alors que les salaires stagnent», martèle Ronja Jansen. Et ces 17 dernières années, les 300 plus riches de Suisse ont doublé leur fortune, celle-ci passant de 352 à 707 milliards, souligne la présidente de la Jeunesse socialiste. Un enrichissement qui s’est fait sur le dos des travailleurs, selon elle: «L’argent ne travaille pas. Ce sont les humains qui travaillent».

Manne de 10 milliards

L’initiative vise un rééquilibrage de la fiscalité entre les revenus du travail et les revenus du capital. Concrètement, à partir d’un certain montant, les revenus du capital seraient taxés à 150%. Le texte ne précise pas ce montant, mais ses auteurs proposent de le fixer à 100’000 francs. Concrètement, si votre fortune (immobilier et actions) vous rapporte 300’000 fr. par an, les premiers 100’000 fr. resteraient imposés comme aujourd’hui, les autres 200’000 fr. seraient taxés 1,5 fois plus. Ou pour le dire autrement, vous seriez taxés comme si vous gagniez 400’000 francs aujourd’hui.

Pour bénéficier d’un revenu du capital de 100’000 fr. par an, il faut être à la tête d’une fortune d’au moins 3 millions de francs, estiment les initiants, ce qui leur fait dire que seuls le 1% des plus riches sont concernés. Ce nouvel impôt pourrait rapporter jusqu’à 10 milliards de francs, toujours selon leurs calculs.

Et que ferait-on de cette manne supplémentaire? Le texte de l’initiative parle d’amélioration de la couverture sociale et de baisse de la fiscalité individuelle des petits et moyens revenus, sans toutefois fixer de clé de répartition. Cela fait dire à ses auteurs que les 99% de la population en bénéficieraient.

Rééquilibrage souhaité

Président de l’Union syndicale suisse, Pierre-Yves Maillard vient apporter le poids des travailleurs dans cette campagne: «Ces dernières décennies, nous avons pratiqué une politique fiscale qui a soulagé ceux qui gagnent déjà beaucoup d’argent. Cette initiative essaie de corriger un peu cette évolution en introduisant un supplément de progressivité.»

Le conseiller national vaudois a dressé une liste des réformes allant dans ce sens depuis l’abolition de l’impôt fédéral sur le capital en 1997, et les nombreuses réductions de l’impôt sur la fortune qui ont suivi dans les cantons. Ils sont nombreux aussi à avoir réduit ou supprimé l’impôt sur les successions. En 2008, la 2e réforme de la fiscalité des entreprises a conduit à une réduction de la taxation des dividendes. Le droit de timbre a également été revu plusieurs fois à la baisse, pour la dernière fois il y a moins d’un mois, un référendum ayant d’ailleurs été lancé par la gauche contre cette réforme.