13e rente. Un non mais «pas de statu quo» pour autant
La conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider est socialiste, mais elle rejette l’idée qu’une 13e rente AVS soit une bonne solution pour combattre la précarité des seniors.
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2 février 2024 à 19:50
A peine arrivée au Département de l’intérieur qu’Elisabeth Baume-Schneider fait face à une double votation en matière de retraite. Pas facile pour la conseillère fédérale socialiste: elle doit s’opposer à son propre camp qui propose de gratifier l’ensemble des retraités d’une 13e rente AVS. Elle doit aussi se battre contre les libéraux-radicaux qui veulent relever l’âge de la retraite à 66 ans d’ici à 2033, puis de le coupler à l’espérance de vie. Pour la Jurassienne et le Conseil fédéral, ces propositions ne sont pas les bonnes. Il faut attendre un peu avant de mettre en œuvre d’autres améliorations plus intelligentes, estime-t-elle, même si une partie de la population souffre en raison de la hausse du coût de la vie.
Imaginons que vous êtes encore assistante sociale. Une retraitée se présente dans votre bureau et vous explique que malgré sa rente AVS et les prestations complémentaires, elle n’arrive pas à joindre les deux bouts. Que lui répondez-vous?
Elisabeth Baume-Schneider: Il faut tout d’abord prendre le temps d’écouter la personne, pour comprendre sa situation, d’où viennent ses difficultés et quels sont ses besoins. Il faut ensuite déterminer si les difficultés qu’elle traverse sont temporaires ou permanentes. L’important est surtout de l’accueillir avec beaucoup de respect, sans lui donner l’impression qu’elle est en situation d’échec parce qu’elle sollicite un soutien. Je ne nie pas qu’en Suisse, des personnes n’arrivent pas à joindre les deux bouts malgré l’aide de l’Etat. Certaines situations sont difficiles. Mais en règle générale, chacune et chacun doit pouvoir s’en sortir avec sa rente AVS et les prestations complémentaires auxquelles ils et elles ont droit.
Cette personne vous dit alors qu’elle est convaincue par l’utilité d’une 13e rente. Comment lui faire changer d’avis?
J’attirerais son attention sur le fait qu’il est primordial de maintenir un système AVS pérenne et que les rentes qu’elle reçoit aujourd’hui doivent continuer à être perçues par tout le monde à l’avenir.
Vrai que l’un de vos arguments, c’est de dire que si l’AVS est fragilisée par de nouvelles dépenses comme une 13e rente, ce sont les retraités les plus modestes qui souffriraient le plus. Ce n’est pas simple à comprendre…
Il ne faut pas culpabiliser les personnes en difficulté en leur disant qu’en acceptant cette initiative, elles mettraient l’AVS dans le rouge. Mais le Conseil fédéral doit être transparent: d’une manière ou d’une autre, cette 13e rente devra être financée. Avec une 13e rente, l’AVS devra être stabilisée bien plus rapidement que prévu. Faudra-t-il rehausser la TVA ou les cotisations sociales? On verra. Mais il est clair que ces augmentations toucheront les personnes avec un budget modeste, bien davantage en tous les cas que celles qui ont un peu de fortune, ou un bon 2e pilier, voire un 3e pilier.
Donc gagner une 13e rente, c’est être perdant…
Je ne sais pas s’il faut parler de gagnant ou de perdant. Mais il est clair qu’en fragilisant notre assurance sociale la plus importante, on fragilise sa dimension solidaire. Et cela, nous devons l’éviter.
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