Salaires » C’est une polémique récurrente. Comment peut-on justifier que les patrons des anciennes régies fédérales et des entreprises dont la Confédération est la principale propriétaire soient mieux payés qu’un conseiller fédéral?
Les difficultés rencontrées par l’ancienne directrice de La Poste Susanne Ruoff dans le cadre de l’affaire Carpostal et la nomination prochaine du nouveau directeur des CFF, ont relancé le débat. La commission des affaires politiques du Conseil national espère le clore avec une modification de la loi sur le personnel de la Confédération qui plafonnerait à un million de francs la rémunération annuelle des membres de la direction. Elle l’a envoyée ce jeudi en procédure de consultation jusqu’au 28 février 2020.
Les conseillers fédéraux ne gagnent pas un million par an. Leur salaire se monte à quelque 450 000 francs, mais leur rémunération brute atteint environ un million si l’on tient compte de leur retraite. Après leur démission, ils touchent en effet la moitié de leur traitement ministériel jusqu’à leur décès. «Pendant les discussions en commission, il a toujours été clair qu’on engloberait dans le revenu la prévoyance professionnelle», explique la socialiste fribourgeoise Valérie Piller Carrard. Elle a repris à son compte l’initiative parlementaire de l’ancienne conseillère nationale Susanne Leutenegger Oberholzer qui est à l’origine du projet de loi.
1,83 million » Le salaire en 2018 du directeur de Swisscom, Urs Schaeppi
Sept entreprises touchées
Le texte approuvé en commission par 14 voix contre 5 concerne sept sociétés: les CFF, Ruag, Skyguide, la Suva, la SSR, Swisscom et La Poste. Celui qui dépasse le plus sensiblement le plafond d’un million de francs est le directeur de Swisscom Urs Schaeppi dont la rémunération s’est élevée à 1,83 million de francs en 2018. C’est bien pourquoi Swisscom s’inquiète d’un projet qui pourrait rendre plus difficile le recrutement de ses cadres dans une branche très concurrentielle. Ce souci est partagé par la minorité de la commission (deux PLR, deux PDC et un PBD) pour qui il n’appartient pas au législateur de fixer des limites supérieures de rémunération. A ses yeux, le plafond retenu ne tient pas compte des besoins propres à chaque entreprise.
Pas de cadeau de départ
La majorité tient par contre à émettre un signal à l’intention de la population. Elle le complète d’ailleurs par l’interdiction de verser une indemnité de départ aux cadres du plus haut niveau et aux membres des conseils d’administration.
Publié en juin, le rapport du Conseil fédéral sur le salaire des cadres en 2018 montre qu’en dehors de Swisscom, ce sont les patrons des CFF et de La Poste qui tirent la couverture à eux avec une rémunération d’environ 1,2 million de francs englobant le salaire fixe, la composante variable, les prestations annexes et la prévoyance professionnelle. Suivent les CEO de Ruag (876 000 francs), de la Suva (781 000), de Skyguide (662 000 francs) et de la SSR (625 000 francs).
«Le but n’est pas que tous touchent un million de francs mais de fixer un plafond impératif», précise Valérie Piller Carrard. Le Conseil fédéral gardera la compétence de fixer les rémunérations maximales des autres entreprises et établissements de la Confédération.
Le projet devrait être soumis à la première Chambre lors de la session d’été 2020. Il entrera en vigueur au plus tôt en 2021.