Les glaciers perdent leur initiative
Les initiants ont retiré leur texte, sous condition. Mais le contre-projet sera attaqué par référendum
Partager
Bayron Schwyn
6 octobre 2022 à 04:01
Environnement » Ses drapeaux multicolores ont essaimé dans toute la Suisse ces dernières années. Mais on ne devrait finalement pas voter sur l’initiative pour les glaciers, qui voulait acter la sortie du pétrole, du gaz et du charbon au plus tard en 2050. Le texte a été retiré hier, sous condition, près de trois ans après le dépôt de plus de 100 000 signatures.
Depuis, le parlement a fait son œuvre et a élaboré un contre-projet indirect à cette initiative. Cette loi-cadre a été largement approuvée par les deux Chambres vendredi dernier en vote final. Son but principal reprend celui de l’initiative: atteindre le zéro net carbone en 2050. Pour ce faire, la Suisse ne devra plus rejeter dans l’atmosphère davantage de gaz à effet de serre que ce que les réservoirs naturels et artificiels du pays sont capables d’absorber. Ce sont les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat, que la Suisse a ratifié en 2015.
Pour y parvenir, il est prévu que la Confédération investisse 2 milliards de francs sur dix ans pour subventionner notamment le remplacement des chauffages fonctionnant au gaz et au mazout, et qu’elle débourse 1,2 milliard sur six ans pour doper l’innovation en faveur du climat dans les entreprises. Le gaz, le pétrole et le charbon ne seront pas interdits, contrairement à ce que voulaient les initiants.
Mais cette alternative les a tout de même convaincus de retirer leur texte. Il le sera définitivement si le contre-projet est accepté par le peuple. L’UDC, seul parti opposé, a en effet déjà annoncé un référendum (lire l’encadré). Cela ne fait pas trembler la Vaudoise Isabelle Chevalley, membre du comité de l’initiative et ancienne conseillère vert’libérale. Entretien.
Pourquoi retirer le texte aujourd’hui?
Isabelle Chevalley: C’est pour aller de l’avant aussi vite que possible. Nous sommes en pleine urgence climatique et nous avons déjà reculé avec l’échec de la loi CO2 devant le peuple en juin 2021. Le contre-projet indirect est pertinent, ambitieux et prévoit des éléments qui n’étaient pas dans l’initiative, comme les aides financières.
En retirant l’initiative aujourd’hui, nous espérons un vote rapide en juin 2023. Cela mettra aussi la pression quelques mois avant les élections fédérales de l’automne prochain. Les candidats devront se positionner clairement. Sans compter que nos chances de succès sont plus grandes avec un référendum, qui ne nécessite pas la double majorité du peuple et des cantons.
De votre propre aveu, le contre-projet ne permettra pas d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris…
Oui, mais il s’agit d’une première étape qui ne nous empêchera pas d’être réactifs à l’avenir et de nous adapter à l’évolution du monde. En Suisse, on préfère les petits aux grands pas. Vouloir en faire trop est le meilleur moyen de reculer.
Après le refus de la loi CO2, ne va-t-on pas vers un nouvel échec avec le référendum de l’UDC?
Je n’ai pas peur de cette votation. Je suis persuadée que nous gagnerons. En obtenant l’assentiment du peuple sur cet objet, cela nous permettra de ne pas rester sur l’échec de la loi CO2. Cela validera aussi les objectifs du net zéro en 2050 et donnera un socle solide pour une nouvelle loi CO2, qui pourrait ainsi être plus ambitieuse.
Comprenez-vous la position de l’UDC?
J’ai de la peine à comprendre pourquoi un parti nationaliste, qui veut défendre les intérêts de la Suisse, se bat pour que l’on continue à dépendre des énergies fossiles. Celles-ci proviennent de pays autocratiques, qui font parfois même la promotion d’un islam extrémiste. A quelque part, l’argent des Suisses sert ainsi à payer des mosquées salafistes à l’autre bout du monde. Je rappelle que chaque année, nous dépensons huit milliards de francs pour acheter des énergies fossiles à l’étranger. Je ne vois donc pas la cohérence politique de ce combat. Mais il faut dire que ce n’est pas la première fois que l’UDC se montre incohérente.
ESH Médias
Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus