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Modification du du code civil: mariage pour tous

La Suisse se met au diapason

Deux tiers des votants acceptent le mariage pour tous et le don de sperme pour les lesbiennes. La Suisse rejoint la plupart de ses voisins européens. Un jour de joie intense pour la communauté homosexuelle


 Philippe Boeglin

Philippe Boeglin

26 septembre 2021 à 23:34

Temps de lecture : 1 min

Egalité » «Mon pays me dit: tu es égal!» Damien Cottier, conseiller national libéral-radical (NE), ne cache pas son émotion. Le résultat ne souffre aucune discussion, c’est un «oui» qui claque. Quelque 64,1% des Suisses légalisent le mariage civil pour tous – comprenez: ils l’étendent aux homosexuels, probablement au 1er juillet 2022. Dans le même élan, ils autorisent la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples de lesbiennes, qui pourront désormais bénéficier du don de sperme, comme certains hétérosexuels depuis des années. Les donneurs seront inscrits dans un registre, afin que les enfants qui le désirent puissent les rechercher.

La Suisse rattrape un certain retard, si on la compare aux pays d’Europe de l’Ouest. Dans cette aire culturelle, seule l’Italie, avec la proximité du Vatican qui la caractérise, se contente du partenariat enregistré et refuse l’union civile aux homosexuels. Les Etats entourant la Confédération ont tous franchi le pas du mariage pour tous. C’est le cas de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne, de l’Irlande, du Portugal, de l’Autriche, de la Belgique, des Pays-Bas. Entre autres.

Même les fiefs catholiques

64,1%

des Suisses ont dit «oui» au mariage pour tous

Tous les cantons suisses approuvent la modification du Code civil. Même dans les régions conservatrices de Suisse centrale et orientale, ou dans les fiefs catholiques latins (Fribourg, Valais, Jura, Tessin), le mariage pour tous et la PMA passent l’écueil des urnes. Avec parfois des scores plus partagés: 56,5% à Schwytz, 55,5% en Valais et 52,9% au Tessin. Le canton le plus tangent est Appenzell Rhodes-Intérieures, avec 50,8% de «oui». Le plus enthousiaste, Bâle-Ville avec 74% de soutien.

Les partisans du changement récoltent donc une double majorité symbolique, du peuple et des cantons. Double majorité dont ils n’avaient formellement pas besoin, mais qui n’est pas sans intérêt, quand on se souvient que des parlementaires conservateurs avaient tenté de conditionner l’objet à une modification de la Constitution, afin précisément de rendre obligatoire la majorité des cantons.

«La Suisse rattrape son retard avec la manière, et l’unanimité des cantons dénote une unité nationale. Cela confère une énorme légitimité au résultat, et facilitera aussi le quotidien des homosexuels dans certains cantons plus conservateurs», salue Nicolas Walder, conseiller national vert (GE).

«L’approbation est massive», sourit Olga Baranova, directrice nationale de la campagne. «C’est un peu une surprise, car les opposants ont servi des arguments très déstabilisants à la population. La procréation médicalement assistée a été présentée comme une innovation, alors qu’elle existe depuis de nombreuses années pour les hétérosexuels.»

Damien Cottier relève les aspects positifs du tempo helvétique. «Les choses prennent parfois plus de temps en Suisse en raison du système politique. Mais l’ancrage et la force de la décision n’en sont que plus formidables. Dans d’autres pays, où le parlement avait légiféré seul, des tensions étaient apparues dans la société.»

Joie de mise

La joie est de mise. «J’ai ressenti une grande émotion aujourd’hui: la société reconnaît la normalité des personnes LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres)», se réjouit le Neuchâtelois. «J’ai souvent pensé étant adolescent que j’étais en partie hors de la société, que je n’y appartenais pas complètement. Le message envoyé aujourd’hui dit au contraire que l’homosexualité est normale et acceptée. C’est extrêmement puissant, d’autant que cela vient du peuple.»

Le cheminement suisse trouve une incarnation parlante dans Le Centre, ex-Parti démocrate-chrétien. Encore opposé au mariage homosexuel il y a cinq ans, lorsqu’il écrivait, dans une initiative populaire, que le mariage était l’union d’un homme et d’une femme, le parti a cette fois accepté majoritairement la nouvelle loi, malgré des dissensions internes.

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