La Suisse avec toujours plus de loups
Vingt-cinq ans après le retour du premier loup en Valais, le pays abrite plus de 150 prédateurs
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Xavier Lambiel
5 novembre 2021 à 02:01
Faune » Dans le Jura vaudois, les gardes-faune sont à l’affût. Ces derniers mois, une quinzaine de veaux ont été tués par les loups. En août, l’Etat de Vaud a demandé à abattre deux des individus de la meute du Marchairuz, qui a pu en compter jusqu’à 11, dont 6 de taille adulte. Cette force de frappe inédite leur a permis d’attaquer des bovins pesant jusqu’à 300 kilos. Approuvée par l’Office fédéral de l’environnement, l’autorisation restera valable jusqu’en mars.
Biologiste et éthologue mandaté par le canton, Jean-Marc Landry soupire: «Ce qui est préoccupant, c’est que les loups pourraient bientôt s’intéresser à des troupeaux installés plus bas. J’ai plaidé pour un tir dans le but d’enrayer les prédations.»
Des activistes ont tenté d’empêcher l’opération. Pour l’instant, les gardes-faune ne sont pas parvenus à abattre les animaux. «Cette expérience montre qu’il faudrait assouplir les conditions très strictes de la Confédération.»
Quinze meutes en Suisse
Depuis quelques jours, la présence du prédateur est attestée dans le canton du Jura. Eradiqué il y a plus d’un siècle, le loup a débuté son retour en Suisse en 1995. Il avait alors été observé en Valais, sa principale porte d’entrée dans le pays
Les canidés arrivent du sud et des montagnes franco-italiennes, où se concentrent l’immense majorité des 160 meutes observées dans les Alpes. Dans le pays, seuls deux loups viennent d’Allemagne, et quatre de l’est. L’animal peut parcourir 1000 kilomètres en trois mois.
150
loups ont été identifiés en Suisse
Selon les chiffres de référence de la fondation KORA, chargée du suivi des grands prédateurs, il y avait 2 meutes et 34 loups dans le pays en 2015, et 11 meutes et 105 loups en 2020. Cette dernière année, ils ont tué 815 animaux de rente, contre 362 cinq ans plus tôt. Depuis janvier, plus de 150 individus ont déjà été identifiés en Suisse. Le biologiste Ralph Manz compte 15 meutes. Il relativise les chiffres: «Pour un tiers, la population est composée de louveteaux, qui peuvent avoir un taux de mortalité de 50% la première année.» Selon lui, «le comportement des loups n’a pas changé avec le nombre, il reste déterminé par la biologie».
Pour Raphaël Arlettaz «tous les micro-événements des derniers mois sont les conséquences d’un méga-événement, la recolonisation du territoire suisse par le gibier sauvage, qui a entraîné le loup dans son sillage». Sa fertilité lui permet d’augmenter ses effectifs de 30 à 40% par année. Selon le Valaisan, «c’est énorme, mais cette progression va progressivement s’estomper». Il explique: «La dynamique de sa population ne suit pas un modèle exponentiel, mais logistique. Elle croît lentement au début, puis très rapidement, avant de se stabiliser, un peu comme poussent les arbres.»
Peut-on calculer ce seuil de saturation à partir duquel le nombre de loups va se stabiliser? «Ce serait théoriquement possible, mais personne n’a encore tenté cette projection, notamment parce que tous les cantons ne disposent pas de données très précises sur la distribution des cerfs et des chevreuils.» Pour le biologiste, l’avenir dépendra de l’attitude et de la tolérance des humains: «Le loup cherchera toujours à coloniser les territoires qui lui permettent de se nourrir sans trop d’efforts. Si nous coopérions au lieu de nous chamailler, nous trouverions plus vite des solutions.»
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