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Suisse

Des éoliennes par voie express? Le Conseil national en débat aujourd'hui

Le Conseil national débat aujourd’hui d’une accélération des procédures pour la construction de parcs éoliens. Tout le monde, sauf l’UDC et les communes du pays, est favorable au projet, appelé Windexpress

Pour la plupart des élus fédéraux, on ne peut plus tergiverser avec l’éolien face à un approvisionnement en électricité toujours plus compliqué.

 Guillaume Chillier

Guillaume Chillier

8 mars 2023 à 02:01

Energies renouvelables » Les parlementaires surnomment le projet «Windexpress». Un petit nom plutôt explicite pour un changement de loi qui vise à accélérer drastiquement la construction de parcs éoliens en Suisse, à l’instar de ce qui a été fait pour le solaire alpin. Le Conseil national en débat ce mercredi et tout indique que c’est un «oui» clair qui sortira des discussions. Tout le monde s’en réjouit, sauf les fervents opposants aux éoliennes et les communes, qui pourraient perdre un peu de pouvoir décisionnaire.

Pour la plupart des élus fédéraux, il n’est plus possible de procrastiner face à un approvisionnement en électricité toujours plus compliqué depuis le début de l’invasion de l’Ukraine. «Ne rien faire serait irresponsable», gronde le président de la commission de l’énergie, Jacques Bourgeois. Pour le PLR fribourgeois, «l’énergie éolienne peut apporter une contribution significative en cas de situation critique. Toutefois, le processus démocratique doit être respecté.»

L’Autriche en avance

«Ce changement de loi est urgent, bien qu’il n’accélère qu’une partie des projets qui sont déjà en route depuis dix à quinze ans. Mais nous ne pouvons pas attendre 25 ans comme c’est le cas pour le parc éolien de Sainte-Croix», renchérit la porte-parole de Suisse Eole, Anita Niederhäusern. Elle compare: «L’Autriche a construit 90 éoliennes en une année. En Suisse, c’est 41 mâts dans toute son histoire.» C’est d’ailleurs la vice-présidente de cette association, la conseillère nationale Priska Wismer-Felder (Le Centre, LU), qui est à l’origine de Windexpress.

En 2022 en Suisse, les éoliennes ont généré 153 gigawattheures d’électricité, un record. Selon un récent rapport de la Confédération, la Suisse pourrait en produire 29,5 térawattheures par an grâce à l’énergie éolienne, dont 19 TWh pendant le semestre d’hiver. «Si 30% de ce potentiel était exploité, soit 1000 installations éoliennes, la Suisse pourrait produire 6 TWh d’électricité d’origine éolienne en hiver», calcule Pierre Oberson, secrétaire général de Groupe E, qui porte plusieurs projets de parcs éoliens. «Pour l’heure, on estime à 10 à 12 TWh le manque d’électricité à combler en hiver à l’horizon 2040. L’éolien fait donc clairement partie de la solution. Windexpress est une première étape. Mais, à long terme, ça ne suffira pas», estime-t-il.

Dans le détail, le projet de loi prévoit une procédure simplifiée pour la construction d’un certain nombre de parcs éoliens d’intérêt national. Pour un plan d’affectation entré en force, il vaudra autorisation de construire, délivrée par le canton et non plus par la commune. Ensuite, un recours contre cette autorisation sera possible, mais uniquement auprès du Tribunal cantonal. Windexpress serait par ailleurs en vigueur jusqu’à ce que la Suisse produise 1 TWh supplémentaire par an par rapport à 2021.

Favorable au projet, le Conseil fédéral estime qu’il permettra d’accélérer de deux à trois ans six projets totalisant 39 mâts, pour une production annuelle de 250 GWh. Quatre autres projets renvoyés au Tribunal fédéral, d’une production annuelle de 250 autres gigawattheures, pourraient aussi en bénéficier. Selon les interprétations, les parcs éoliens vaudois de Sur Grati, du Mollendruz, d’EolJorat Sud ou de Bel Coster sont les premiers concernés. A Neuchâtel, le conseiller d’Etat Laurent Favre est content car le projet de la Montagne de Buttes et ses 100 GWh par an «est clairement concerné». «Le Conseil d’Etat soutient donc pleinement cette initiative qui va dans le sens de sa politique d’approvisionnement», se réjouit-il.

Lors des travaux de commission, seule l’UDC s’est opposée au projet. Officiellement, le premier parti du pays évoque la perte d’autonomie des communes (lire ci-contre). Mais dans les faits, il est aussi question de paysage et de tourisme. «Ces éoliennes ne sont pas belles sur les montagnes, qui sont une de nos attractions. Je pense qu’il y a d’autres moyens de développer les énergies renouvelables», estime le conseiller national Pierre-André Page. Pour lui, il ne faut pas que la guerre fasse perdre le sens de la mesure. «Des erreurs ont été commises par le passé en matière d’approvisionnement énergétique. Et maintenant, on arrive avec de telles propositions extrêmes. Ce n’est pas acceptable», tonne le Fribourgeois.

Fribourg pas concerné

Si le projet semble suivi par une majorité solide, c’est aussi car les Verts et Pro Natura le soutiennent. Selon la présidente de l’organisation, Windexpress est acceptable, contrairement au solaire alpin qui «marche sur la protection de l’environnement». «Mais il faut faire très attention où on construit les éoliennes et au maintien de la possibilité d‘une pesée d’intérêts», affirme Ursula Schneider Schüttel, par ailleurs conseillère nationale socialiste. La Fribourgeoise poursuit: «Nous avons une position de compromis: il faut être attentif à ce que les parcs éoliens aient un impact limité sur l’environnement. Sauver le climat, oui, mais pas au détriment de la biodiversité.»

Les projets éoliens fribourgeois ne seraient pas concernés par Windexpress. Par contre, ils bénéficieraient d’un autre projet d’accélération de procédure prévu dans le cadre des discussions sur la sécurité de l’approvisionnement, appelé «Mentelerlass». Il sera discuté au parlement la semaine prochaine.

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