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Sports de combat

Une couronne fédérale, c'est comme une médaille olympique

Une couronne fédérale change radicalement le statut d’un lutteur. «Car c’est une rareté», dit Rolf Wehren


Patricia Morand

Patricia Morand

27 août 2019 à 21:22

Lutte suisse » Cinquième représentant du club des lutteurs de La Gruyère à décrocher une couronne fédérale après Rolf Wehren (1995), Nicolas Guillet (1992), Michel Rouiller (1983, 1986) et Gaby Yerly (1983, 1986, 1989, 1992), Benjamin Gapany est entré dimanche dans un club très fermé. Pour avoir ramené des lauriers de Zoug, le Marsensois est désormais un Eidgenosse, statut signalé par trois étoiles à côté de son patronyme sur les listes de participants et de classements.

Benjamin Gapany (24 ans) a ramené une couronne, un toupin géant et des souvenirs pour la vie de son séjour en Suisse centrale. Il a choisi son prix en fonction de sa valeur sentimentale et non pécuniaire. C’est ainsi dans le milieu. «Je ne lutte pas pour m’enrichir», rappelait Philipp Roth, au lendemain de la couronne fédérale gagnée à Estavayer 2016 à la surprise générale.

Lire aussi » Benjamin Gapany: «Je n’ai quasiment plus de douleurs» (22.08.2019)

D’abord les félicitations

Philipp Roth avait 21 ans lorsqu’il terrassait sur la sciure broyarde, en 8e passe, le légendaire Arnold Forrer. Le Soleurois du club bernois d’Aarberg privait alors le roi de Nyon 2001 d’une septième distinction fédérale. Il a été, dans la canicule, l’un des 23 nouveaux couronnés – sur 46 en tout – fédéraux. Le seul à réussir pareil tour de force sans jamais s’être auparavant agenouillé au terme d’une fête alpestre ou d’association. Philipp Roth n’avait alors que trois couronnes cantonales à son actif. Ses lauriers ne lui avaient pas permis de décrocher le jackpot. Par contre, il avait reçu de nombreux messages de félicitations par téléphone, cartes postales ou même lettre. «En grande partie des gens que je ne connaissais même pas», précise-t-il.

De retour au travail, Philipp Roth avait obéi à ses collègues en prenant avec lui sa couronne afin qu’ils la voient. En toute simplicité. Il a pu constater par la suite que la distinction n’avait aucun pouvoir magique, enchaînant les pépins de santé.

«Un piment spécial»

Benjamin Gapany a obtenu une couronne fédérale 24 ans après Rolf Wehren, qui était, jusqu’à dimanche, le dernier Gruérien à vivre pareil aboutissement. «J’étais sûr de l’obtenir après ma septième passe. J’étais sur une autre planète», se souvient celui qui est directeur de l’école professionnelle artisanale et industrielle de Fribourg depuis bientôt deux ans. «La fête fédérale n’est organisée que tous les trois ans. Cela donne un piment spécial au rendez-vous. Les autres lauriers (cantonaux, alpestres ou d’associations, ndlr) sont distribués chaque année. Les fédéraux constituent donc une rareté après laquelle court chaque lutteur.» Une chose ne varie pas: la proportion des lutteurs honorés, de 15 à 18% du nombre de participants à la manifestation.

« Pour obtenir une couronne fédérale, les planètes doivent être alignées »

Rolf Wehren

«Pour obtenir une couronne fédérale, le lutteur doit être prêt le jour J», poursuit Rolf Wehren. «Les planètes doivent être alignées. La lutte a évolué, mais le ressenti, en s’agenouillant au terme d’une fête fédérale, n’a pas changé. Ce statut particulier est ancré dans les gènes de la discipline. Il fait partie de l’histoire de la lutte. Outre-Sarine, c’est une marque reconnue.»

Une couronne fédérale change-t-elle la vie? «C’est un grand mot», atténue Rolf Werhen. «Etre Eidgenosse, comme on dit dans le milieu, c’est comme gagner une médaille olympique: on l’est pour la vie. La seule chose qui a changé, par rapport à mon époque, c’est l’ampleur donnée à cette récompense au niveau médiatique. Car la popularité de la lutte suisse ne cesse de croître.» Benjamin Gapany jouira d’un nouveau statut, dès l’année prochaine sur les ronds de sciure. Il sera forcément l’une des attractions, mais aussi l’homme à battre.

Viande et boissons offertes

Rolf Wehren a profité de quelques gestes de reconnaissance. Tous matériels. «Dans le temps, il n’y avait pas de sponsoring car la publicité était interdite. Les règlements ont changé. Je me souviens qu’après avoir gagné ma couronne fédérale, un boucher m’avait offert les entrecôtes que je voulais lui acheter. J’avais aussi reçu un bon pour du Rivella gratuit durant six mois car j’avais parlé de cette boisson dans une interview. Les gens étaient généralement plus attentionnés. On me payait un verre si on me voyait au restaurant. Ou même un repas…»

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