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Lectrices et lecteurs en Liberté

Lecteur en liberté. Angelo Rossy, Givisiez

Angelo Rossy pour le Lecteur en Liberté Photo Lib/Charly Rappo, Givisiez, 05.05.2022Charly Rappo/Charly Rappo / La Liberté

Angélique Eggenschwiler

Angélique Eggenschwiler

13 mai 2022 à 15:22

Original » Passionné de bonsaïs, Angelo, 65 ans, fonde le Yama Sakura Bonsaï club en 1986. En parallèle, ce fleuriste de métier jongle avec les casquettes, ou plutôt les chapeaux, de sculpteur, apiculteur mais surtout chasseur de fossiles. Sa plus belle découverte? Des vertèbres d’Ichtyosaure qui ont depuis rejoint la collection du Musée d’histoire naturelle de Fribourg.

Vous faites un apprentissage de fleuriste dans les années 1970. Un métier peu prisé par les hommes à l’époque, non?

C’est un métier de femme, c’est vrai. Sur la trentaine que nous étions aux cours à Lausanne, nous étions deux garçons, et encore l’autre n’est pas arrivé au bout! C’est ma mère qui m’avait trouvé cette place, moi je voulais faire forgeron. Sellier ou forgeron. Je suis d’ailleurs allé voir le forgeron qui avait déjà une septantaine d’années et il m’a dit: «Écoute, je suis trop vieux, on ne sait pas ce qui peut arriver... En plus, j’ai plus de boulot!» C’est vrai que c’était déjà un peu la fin, il n’y avait plus grand-chose à réparer sur les nouvelles machines agricoles… Mine de rien, il a encore vécu 10 ou 12 ans, donc l’apprentissage, j’aurais eu le temps de le faire! (rires)

Finalement, les fleurs ça ne vous allait pas si mal quand on voit votre magnifique jardin...

C’est vrai, on peut dire que je m’y suis bien mis. Après, à la ville ce n’était pas du tout le même métier, je faisais beaucoup d’entretien et surtout des réparations, mais on finit toujours par se débrouiller.

Extrêmement créatif, vous êtes aussi bon bricoleur. Un don que vous tenez de votre papa, charpentier de métier?

Oui, papa il a 87 ans et il est en train de décaper une armoire à la cave! Et à la main! Ma sœur lui a acheté une ponceuse électrique mais il préfère faire à l’ancienne... (rires)

Vous avez travaillé durant 40 ans à la ville de Fribourg, dont 30 ans à l’entretien du cimetière Saint-Léonard. Vous étiez heureux parmi les morts?

Curieusement oui! En fait, j’aimais surtout le contact avec les gens, ceux qui étaient toujours vivants donc! (rires) Il y en a qui viennent tous les jours, pour finir on crée des liens. Bon, il y avait aussi certaines pipelettes qu’on tâchait d’éviter, on se tirait de côté quand on les voyait arriver. Et puis le boulot, en somme, ça n’allait pas trop mal, on faisait beaucoup de désherbages bien sûr mais pour finir moi j’aimais bien désherber. Le problème c’est qu’ils s’en sont vite rendu compte!

En parlant de ces visiteurs, il y a des choses qui vous ont ému en particulier?

Je me souviens d’une jeune fille qui est décédée. Ses camarades d’écoles sont venus longtemps, quatre ou cinq à la fois, ils s’asseyaient un moment autour de la tombe. On dit qu’il n’y a plus que des vieux au cimetière, ce n’est pas tout à fait vrai même s’il faut avouer qu’entre 20 et 40 ans on ne voit pas grand monde. Quand on est jeune, le cimetière on n’y pense pas, puis tout à coup c’est l’âge où on y est…

Et vous, il vous arrive d’y penser?

Mon souci c’est que généralement les hommes partent avant les femmes, je pense à Denise et je me dis: «Comment elle va faire après?» Bon, il y en a eu des millions avant elle… Autrement non, on en a assez vu pour savoir que de toute façon il n’y a pas moyen d’y échapper, on ne va pas encore se faire du mouron pour ça. Il y en a suffisamment à se faire dans la vie.

Vous avez une impressionnante collection de fossiles, elle remonte à quand cette passion?

À l’école déjà, il y avait une carrière sur le chemin vers le petit pont de Broc. J’en ai encore quelques-uns qui viennent de là. Et puis, je ne me suis jamais arrêté. C’est toujours la même chose, on rêve de trouver la belle pièce. Parfois, on tombe sur un simple bout de carapace mais on le trouve quand même joli. Bon, on ne peut pas tout ramener, il faut quand même trier un peu…

Et votre plus belle pièce à ce jour, qu’est-ce que c’est?

Ça reste l’ichtyosaure. Le jour où je suis tombé sur ce caillou avec ces espèces de croix, je me suis dit ça, c’est un ichtyosaure! J’en étais sûr et certain! Je me suis bagarré pendant des années avec l’équipe du musée d’histoire naturelle. On m’a d’abord dit: «C’est rien, ce sont des coulées de silices, sciez-le en deux et vous verrez!» Moi j’ai dit pas question que je scie ce machin, j’ai sorti une première vertèbre à l’acide chlorhydrique et je suis retourné au musée. Je demande Monsieur Berger qui me dit: «J’ai pas le temps, j’ai un cours!». Je lui demande de jeter juste un œil en vitesse, il s’arrête une minute… Ça a été fini, il n’a pas fait de cours de tout l’après-midi! (rires)

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