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La Russie mise au ban du sport

Les instances internationales ont décidé de frapper fort. Pas de Coupe du monde pour les footballeurs


1 mars 2022 à 02:01

Temps de lecture : 1 min

Sanctions » Le Comité international olympique recommande un bannissement historique des Russes et des Bélarusses du sport mondial, la FIFA lui donne immédiatement satisfaction: la Russie a été exclue hier de la Coupe du monde de football, compétition planétaire qu’elle avait accueillie il y a quatre ans.

Les différentes sélections comme les clubs russes sont privés «jusqu’à nouvel ordre» de toute compétition internationale, une décision conjointe de la FIFA et de l’UEFA, cette dernière confirmant par ailleurs la résiliation de son contrat de sponsoring avec le géant gazier Gazprom, estimé à 40 millions d’euros annuels. Pour l’équipe nationale, cela signifie qu’il n’y aura pas de barrage le 24 mars contre la Pologne qui avait de toute façon dit sa détermination à boycotter la rencontre.

Recommandation du CIO

L’Euroligue a également suspendu les trois clubs russes qui prennent part à la compétition phare du basket européen, mais les sanctions annoncées par la FIFA et l’UEFA sont la concrétisation la plus spectaculaire à la recommandation du CIO qui rompt avec sa longue tradition de neutralité dans les domaines politiques et géopolitiques: un bannissement pur et simple des Russes et des Bélarusses du sport mondial pour prix de l’invasion de l’Ukraine. Si la puissante FIFA devait être imitée par les autres fédérations internationales, la Russie rejoindrait la Yougoslavie de Slobodan Milosevic et l’Afrique du Sud de l’apartheid dans l’histoire des grands parias du sport international.

Les autres fédérations vont être mises sous pression, comme celle de volley-ball, qui ne s’est pas exprimée, mais a été prévenue par la France et la Pologne, respectivement championnes olympique et du monde, qu’elles boycotteraient le Mondial l’été prochain s’il restait organisé en Russie. De même, plusieurs joueuses de tennis ukrainiennes ont mis en demeure la WTA de réagir, s’étonnant de son silence quand elle avait été prompte à voler au secours de la Chinoise Peng Shuai.

Mesure symbolique

Pour justifier sa recommandation, qui intervient à quelques jours du début des Jeux paralympiques de Pékin (4-13 mars), le CIO met en avant un «dilemme»: «Alors que les athlètes de Russie et du Bélarus pourraient continuer à participer à des événements sportifs, de nombreux athlètes ukrainiens sont empêchés de le faire en raison de l’attaque contre leur pays.» Pour le résoudre, elle «recommande aux fédérations internationales de sport et aux organisateurs de manifestations sportives de ne pas inviter ou de permettre la participation d’athlètes et de représentants officiels russes et bélarusses aux compétitions internationales».

Autre mesure, symbolique mais forte, le CIO a aussi retiré «l’ordre olympique» – distinction honorifique attribuée à des personnalités «ayant illustré l’idéal olympique» – à tous les hauts responsables russes, à commencer par le président Vladimir Poutine, qui s’emploie depuis deux décennies à faire du sport un outil de promotion intérieure et internationale. Stanislav Pozdniakov, président du comité olympique russe, a estimé dans un communiqué que la décision du CIO allait «à l’encontre des réglementations et de la charte, en premier lieu l’esprit du mouvement olympique qui a vocation à unir et pas à diviser, surtout quand il s’agit de sportifs ou d’égalité des participants au mouvement olympique».

Question urgente

La question est particulièrement urgente pour les Jeux paralympiques, qui débutent vendredi à Pékin. «Lorsque, dans des circonstances très extrêmes», mettre en place ces mesures «n’est pas possible à court terme pour des raisons organisationnelles ou juridiques», le «CIO laisse à l’organisation concernée le soin de trouver sa propre voie». Il renvoie donc la décision au Comité international paralympique, lui réitérant son «plein soutien». Celui-ci a prévu de s’exprimer demain.

Autre aspect spectaculaire de la communication du CIO lundi, sa rupture avec sa tradition d’exigence de neutralité des sportifs. Le CIO a ainsi salué «les nombreux appels à la paix lancés par les athlètes, les responsables sportifs et les membres de la communauté olympique mondiale». Il «admire et soutient en particulier les appels à la paix des athlètes russes», a-t-il poursuivi. Le tennisman russe Andrey Rublev comme ses compatriotes Alex Ovechkin (hockey sur glace) ou Pavel Sivakov (cyclisme), ont clairement dit leur opposition à la guerre engagée par leur pays. Ils sont désormais menacés de devoir en payer un prix professionnel élevé si leurs fédérations suivent les recommandations du CIO. Pour le footballeur international Fedor Smolov, c’est déjà le cas.

Grand Prix annulé

Sans attendre le CIO, plusieurs pays avaient déjà dit leur refus d’accepter la présence de Russes sur leur territoire pour y disputer des compétitions. La finale de la Ligue des champions a été retirée à Saint-Pétersbourg par l’UEFA et le Grand Prix de Russie de F1 prévu à Sotchi a été annulé, sept mois avant sa tenue prévue. Deux mesures très fortes touchant des événements symboliques du soft power sportif russe.

Interrogé par l’AFP avant même la nouvelle déclaration du CIO, Pim Vershuuren, chercheur en géopolitique du sport à l’Université de Rennes, estimait déjà que les «décisions prises cette semaine étaient historiques, à la mesure du choc». Et de prévenir: celles à venir, et qui sont donc tombées hier, «feront précédents et histoire». ats


La grande tristesse du Fribourgeois René Fasel

Le comité exécutif de la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF) a décidé hier soir d’exclure la Russie et le Bélarus de toutes ses compétitions jusqu’à nouvel avis.

Le mondial M20, qui devait se tenir en fin d’année à Novosibirsk, a été retiré à la Russie. Celle-ci ne pourra pas participer au mondial M20 2021 qui a été reporté au mois d’août. L’IIHF doit encore se décider de la tenue ou non du championnat du monde 2023 (des grands) à Saint-Pétersbourg. Président de l’IIHF durant 27 ans, de 1994 à l’automne dernier, René Fasel (photo Keystone-archives) a répondu à nos questions hier soir. Le Fribourgeois de 72 ans a avoué avoir mal au cœur et peiné à trouver le sommeil ses derniers jours. «La guerre, c’est un drame. C’est terrible.»

Que ressentez-vous en apprenant les décisions de l’IIHF?

René Fasel: C’est la première fois dans l’histoire que l’IIHF exclut deux pays. Je ne comprends pas. Je comprends, oui, mais on punit qui? Des athlètes. Je repense aux paroles du Baron Pierre de Coubertin… Je suis peut-être naïf et romantique, mais c’est d’une grande tristesse. Il y a huit ans que le drame existe en Ukraine. Il faudrait une lueur d’espoir. Aujourd’hui, la Russie, c’est le diable. Il y a tant de gens qui souffrent autour de nous. Je ne suis pas bien.

René Fasel
«Aujourd’hui, la Russie, c’est le diable. Il y a tant de gens qui souffrent autour de nous.»
René Fasel

Pouvez-vous comprendre les décisions?

Je ne comprends pas. Je pense qu’il faut encore une décision du Congrès. En mai, il y aura les mondiaux en Finlande. Je pense que la situation aura changé d’ici là. Et qu’on aura corrigé le tir. On punit des jeunes en les empêchant de participer aux mondiaux en août. Cela n’est jamais arrivé dans l’histoire. Même aux pires moments de la guerre froide et d’autres conflits aussi sérieux, il y a eu des matches avec les Etats-Unis, le Canada et la Russie. Là, cela devient l’hystérie.

Vous êtes proche de Poutine…

Personne n’arrive à comprendre. Durant huit ans, personne ne s’est préoccupé du Donbass. Il y a eu 14 000 morts. On a laissé… Tout a sauté! Cela m’attriste. Nous sommes au XXIe siècle et nous n’avons toujours pas compris que la guerre n’était pas une solution. L’ouest est aussi responsable. Cela ne change pas mon amour pour la Russie. J’aime ces gens. Ce qui se passe n’a rien à voir avec le sport.

« Nous sommes au XXIe siècle et nous n’avons toujours pas compris que la guerre n’était pas une solution. »

N’êtes-vous pas à contre-courant?

Je cherche quelqu’un qui puisse calmer cette hystérie. Jusqu’où va-t-on? Certains parlent: «Nous avons aussi la bombe atomique». Cela fait peur. J’ai des enfants et des petits-enfants. Je ne suis pas à contre-courant. Qu’ils se mettent autour d’une table, qu’ils discutent, cherchent des solutions et arrêtent la guerre! PAM

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