Marcher à l’ombre: Tout sur Chris WareBâle » Voilà une réjouissante balade qui s’annonce sur les bords du Rhin. Avec la garantie de ne pas repartir avec un coup de soleil. De fait, à Bâle, la température est toujours fort agréable à l’ombre des murs du Cartoonmuseum. Cet été, le musée dédié à la bande dessinée consacre une rétrospective à Chris Ware, scénariste et dessinateur né en 1967 du côté d’Omaha. Figure majeure du neuvième art yankee, Ware a commencé très jeune à dévoiler ses croquis dans RAW, le magazine d’avant-garde créé par Art Spiegelman et Françoise Mouly. Révélé de ce côté-ci de l’Atlantique au début des années 2000 grâce au roman graphique Jimmy Corrigan, Ware a publié par la suite des œuvres essentielles comme le monumental album Building Stories, compilation de 15 ouvrages de formats divers (2013), ou encore Rusty Brown (2020).
Conçue en étroite collaboration avec l’artiste, l’exposition Chris Ware Borderlines présente de nombreux documents permettant de mieux comprendre une méthode de travail méticuleuse, mais aussi des planches originales, des maquettes, des sculptures et des constructions qui «complètent ses narrations dans la troisième dimension». Impossible de rêver un projet plus immersif JPB
» Chris Ware Borderlines, jusqu’au 29 octobre, Cartoonmuseum, Bâle.
Lire au frais: le Nord, tout un poèmeRécit déssiné » L’exploration est ici polaire et poétique. L’auteur bruxellois Frédéric Roussel, dont on apprend qu’il a animé des workshops de modèle vivant à la Faculté des arts et du design de l’Université de Laponie, en Finlande, est monté à bord du Knut, voilier transformé en résidences d’artistes cabotant au large des eaux groenlandaises.
De cette expérience, il a tiré ce récit illustré supérieurement original, que les Editions Hélice Hélas, à Vevey, ont eu le bon goût de publier en 2021. Long poème narratif agrémenté de vignettes dont le minimalisme virtuose suggère à l’encre noire l’immensité blanche, Grand Nord arpente une glace inexplorée sur les traces d’un géographe à la dérive. Mandaté pour cartographier le vide infini, l’esseulé Maldon progresse aux lisières du monde et de la folie, sillonnant une inconcevable étendue ponctuée de rares et mystérieux affleurements qu’il tente de situer pour ne pas perdre le nord.
«Il savait que ce rien / était quelque chose / puisqu’il en était le témoin.» A l’intersection du temps et de l’espace, du texte vertical et du dessin horizontal, sourd une atmosphère poétique et désespérément belle. Un ouvrage fascinant comme une terra incognita. TR
» Frédéric Roussel, Grand Nord, Ed. Hélice Hélas, 244 pp..