Médias fribourgeois. Une plate-forme numérique commune pourrait voir le jour
St-Paul Médias et MEDIAparc annoncent leur intention d’unir leurs forces pour créer une plate-forme numérique commune. Les discussions ne font que commencer, mais les rédactions concernées expriment déjà leurs inquiétudes.
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17 avril 2024 à 18:07
St-Paul Médias et MEDIAparc envisagent de créer une plate-forme numérique unique pour leur offre francophone. L’annonce a été faite ce mercredi par les deux entreprises de médias fribourgeoises. Selon leur communiqué commun, «l’objectif est de mettre à disposition des Fribourgeois une offre de haute qualité avec des informations locales, du divertissement et des éléments de service».
Président du conseil d’administration du Groupe Saint-Paul, Martial Pasquier se veut rassurant. «L’objectif principal n’est pas de réaliser des économies, mais de trouver un modèle rentable», déclare-t-il. Les futurs partenaires partagent un double constat. Les recettes publicitaires des médias traditionnels fondent et il faut en capter de nouvelles sur les plates-formes numériques. De plus, les habitudes évoluent. Les jeunes notamment s’informent essentiellement sur les supports digitaux. Il s’agit de les toucher et de les fidéliser là où ils sont.
«Mais le marché fribourgeois est trop petit pour accueillir deux acteurs médiatiques dans le domaine du numérique», déclare Martial Pasquier, rappelant que dans ce secteur, le développement est constant, avec à la clé des investissements substantiels. Pour Damien Piller, président du conseil d’administration de MEDIAparc, cette future collaboration doit être perçue comme un «projet pour l’avenir, qui vise à pérenniser la place du canton de Fribourg dans l’espace médiatique romand».
Questions ouvertes
St-Paul Médias édite La Liberté, La Gruyère, Le Messager et La Broye. La société MEDIAparc a été créée par Radio Fribourg et La Télé. Elle a lancé en 2020 la plate-forme numérique Frapp. Les journaux, y compris sous leur forme e-paper, de même que les studios radio et TV de MEDIAparc, ne sont à ce stade pas concernés par ce projet de rapprochement numérique. Damien Piller estime d’ailleurs que chaque média doit conserver ses spécificités.
De nombreuses questions sont cependant encore ouvertes, notamment sur les conséquences pour les différents titres. «Nous allons analyser les forces de chacun afin de trouver le meilleur modèle», répond Martial Pasquier. Pour lui, il est trop tôt pour prédire ce qu’il adviendra de l’offre numérique actuelle et des investissements en cours. De même, le nom que prendra la plate-forme commune, son emplacement, son financement, son organigramme et la responsabilité de sa ligne éditoriale restent à définir et feront l’objet de prochaines discussions. Un projet concret sera élaboré dans les mois à venir.
Des inquiétudes
A ce propos, la Société des rédacteurs de La Liberté exprime son inquiétude. «Nous espérons que ce rapprochement ne se traduira pas, à terme, par des suppressions de postes et par une perte d’identité pour La Liberté et les autres titres de St-Paul Médias», écrit-elle dans sa prise de position, tout en annonçant qu’elle «veillera en particulier à ces deux points et à ce que la rédaction soit largement intégrée aux discussions qui auront lieu». La Société des rédacteurs de La Gruyère partage les mêmes craintes. «La rédaction a bien conscience du climat difficile dans lequel la presse doit évoluer, mais les décisions stratégiques ne peuvent pas être prises au seul détriment des rédactions», déclare-t-elle. Elle s’interroge par ailleurs de ce qui pourrait être un changement stratégique du Groupe Saint-Paul Médias SA, «alors même que de grands projets liés au numérique sont déjà en cours et qu’ils n’ont pas encore abouti». Impressum, le syndicat des journalistes, pointe également la menace que ce projet fait peser sur la diversité de la presse du canton et appelle les deux directions à intégrer les collaborateurs dans leurs travaux.
«Je peux comprendre que cette annonce puisse susciter des craintes dans les rédactions. Mais le fait que les deux principaux acteurs médiatiques fribourgeois essaient de trouver des solutions pour leur avenir doit être pris comme une bonne nouvelle. Il faut le voir comme une chance», assure Martial Pasquier. «Nous sommes des précurseurs. Un tel projet n’a été conçu nulle part ailleurs en Suisse romande», dit-il. «Nous prenons notre destin en main», poursuit Damien Piller.
En novembre dernier, MEDIAparc et les Freiburger Nachrichten ont déjà annoncé qu’ils menaient des discussions en vue d’une collaboration sur leur offre numérique. Damien Piller indique que ce projet avance. «Une convention est en préparation. Il y a de part et d’autre une volonté d’avancer, de dépasser le stade des querelles de clocher». Pour l’homme d’affaires, les esprits ont beaucoup évolué. «Il est temps de renoncer à la politique de prestige pour travailler ensemble», lâche-t-il.