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Canton

Politique et administration. Il y a de moins en moins de conseillers communaux

Le nombre de conseillers communaux chute dans le canton. En cause: fusions, efficacité administrative et organisation. Pour autant, les spécialistes n’estiment pas qu’il y a un désintérêt pour la fonction. Explications.

Estavayer passera de neuf conseillers communaux à sept lors de la prochaine législature.Jean-Baptiste Morel-archives

Rémi Alt

Rémi Alt

28 janvier 2025 à 16:49, mis à jour à 18:06

Temps de lecture : 4 min

A Estavayer, il n’y aura plus que sept conseillers communaux au lieu de neuf lors de la prochaine législature. La commune de Gibloux envisage d’en faire autant: le Conseil général a demandé à son exécutif d’étudier la possibilité d’une telle démarche. Plus globalement, au cours des dernières années, le nombre de conseillers communaux dans le canton a drastiquement baissé. Entre 2016 et 2021, le nombre de conseillers communaux a chuté de 111 unités, dégringolant de 987 à 876 postes.

Pour expliquer cela, il convient d’abord de prendre en compte les processus de fusion. Rien qu’en Sarine, avec les trois fusions qui ont eu lieu entre la législature de 2016 et celle de 2021 (Corminbœuf, Prez et Bois-d’Amont), 23 postes au sein d’un exécutif communal ont disparu. Pour autant, au début de la législature de 2016, on comptait 211 conseillers communaux dans le district, contre 182 en 2021, soit une différence de 29 postes.

Une autre logique

Dès lors, comment expliquer ces 6 places en moins qui ne peuvent être justifiées par une fusion? «Lorsqu’un changement a lieu en cours de législature, c’est uniquement en raison d’une fusion», explique Christophe Maillard, chef du Service des communes (SCom). «Mais lorsqu’il a lieu avec le début d’une nouvelle législature, cela peut aussi provenir d’une volonté de la commune de se réorganiser.» Et de préciser toutefois que «dans les deux cas, de telles modifications dans le nombre de représentants de l’exécutif communal devraient conduire à un remaniement de l’administration».

D’après le chef de service, les obligations toujours plus nombreuses d’un rôle au sein d’un Conseil communal pourraient également expliquer ce phénomène de diminution du nombre de représentants. «Pour les cas hors fusion, il s’agit en général de la prise de conscience des exécutifs de la nécessité de faire évoluer les structures communales avec les exigences toujours plus importantes qui sont fixées, assure-t-il. Dans les plus grandes communes, l’idée est souvent de réorganiser par la suite l’administration afin de la rendre plus efficace et agile, ceci afin de permettre aux conseillers communaux de se concentrer à terme sur des tâches autres qu’opérationnelles.»

Compter sur l’administration

Pour la législature 2021-2026, la commune de Marly a fait l’exercice de diminuer le nombre de conseillers communaux de 9 à 7. Selon Lise-Marie Graden, cela n’implique pas nécessairement une professionnalisation de la fonction: «Cela dépend entièrement de l’autonomie communale, mais une diminution de la représentativité au sein de l’exécutif peut parfois exiger une augmentation du taux de travail pour la commune», relate la préfète de la Sarine. «La réelle professionnalisation se fait au sein de l’administration communale, dès lors que la commune a atteint une taille critique suffisamment grande pour engager du personnel.»

L’objectif serait donc d’éviter un gonflement continu des responsabilités et du taux d’activité des conseillers communaux en favorisant la milice. Mais d’un autre côté, augmenter le taux de travail pourrait revenir à une meilleure rémunération du poste. Une tendance que n’exclut pas Christophe Maillard, qui est aussi syndic de Marly: «Cet argument inverse pourrait peut-être porter au contraire sur une plus grande attractivité du poste», estime-t-il.

Pas de désintérêt

Présidente de l’Association des communes fribourgeoises (ACF), Micheline Guerry confirme que la diminution du nombre de conseillers communaux ne provient a priori pas d’un désintérêt de la population envers le rôle. «Les motifs exprimés pour justifier une diminution du nombre de représentants de l’exécutif touchent généralement à l’efficacité de la gouvernance et de la gestion des affaires communales», soutient-elle. Et de préciser que «le nombre de membres d’un Conseil communal de cinq, sept ou neuf, ainsi que la composition des dicastères est pensée de manière à optimiser le fonctionnement communal au cas par cas».

Souvent, ces décisions vont de pair avec l’évaluation de l’organisation de l’administration, avec les responsabilités stratégiques et opérationnelles. «En déchargeant les élus des tâches administratives et techniques, ils peuvent davantage se consacrer à leur mandat politique», appuie la présidente de l’AFC.

« L’idée est souvent de réorganiser l’administration afin de la rendre plus efficace et agile »
Christophe Maillard

Et ce n’est pas Eric Chassot, syndic d’Estavayer, qui dira le contraire. Car la commune fusionnée diminuera lors de la prochaine législature le nombre de représentants au sein de l’exécutif, le délai d’opposition étant désormais terminé. «Ce nouveau fonctionnement assurera une meilleure répartition des dicastères en fonction des services», indique-t-il. Pour autant, le taux d’occupation des conseillers restera inchangé, tout comme leur rémunération.

«Il s’agit avant tout de rationaliser les rapports entre les chefs de service, au nombre de sept, et les conseillers communaux. Cela impliquerait donc une réorganisation de l’administration pour compenser cette nouvelle répartition», détaille le syndic. Le Conseil général d’Estavayer gardera 60 membres, mais délaissera le système des cercles électoraux au profit d’un fonctionnement par partis.

A noter qu’en 2019, l’Etat et l’ACF avaient lancé une campagne de mesures pour revaloriser la fonction de conseiller communal, à la suite de nombreuses démissions à travers le canton. La Direction des institutions, de l’agriculture et des forêts (DIAF) s’est ainsi chargée de présenter des vidéos de promotion du rôle de conseiller communal et de mettre en place des statistiques de suivi à ce propos.

«Le nombre de candidats lors des dernières élections communales (2021, ndlr) a été le plus élevé de l’histoire alors que le nombre de communes ne fait que diminuer», note Aurélie Haenni. La porte-parole de la DIAF spécifie tout de même qu’il n’est pas possible de confirmer que ce résultat découle des mesures entreprises.

Discussions en cours: on parle de fusions en Sarine Ouest

Si les fusions sont en baisse dans le canton, c’est parce que le nombre de communes ayant déjà fusionné est grand. Les avantages d’une telle démarche sont nombreux, à l’heure où la politique communale fait face à une augmentation des exigences. Mais l’une des répercussions, qui peut passer inaperçue au cours de ce processus, est la diminution du nombre de conseillers communaux (lire ci-dessus). Et Sarine Ouest risque d’en perdre quelques-uns au cours des prochaines années, des projets de fusion dans la région étant actuellement en discussion.

Des représentants des communes d’Autigny, Chénens, Cottens et La Brillaz tiennent d’ailleurs ce mercredi une réunion pour discuter des scénarios envisageables pour l’avenir, Neyruz étant également invité à suivre les échanges. L’impulsion a été donnée par la préfète de la Sarine: «Il y a un enjeu clair à évoquer et discuter de la chose entre communes, mais je ne suis pas formellement impliquée comme meneuse de projets dans le district», indique Lise-Marie Graden.

« Nous souhaitons établir un calendrier de travail afin d’éviter de repousser l’échéance »
Bernard Oberson

C’est la commune de La Brillaz qui a relancé l’idée, à la suite de plusieurs refus d’investissements, qui pourraient être contournés avec une potentielle fusion. «Nous souhaitons établir un calendrier de travail afin d’éviter de repousser l’échéance», soutient le syndic Bernard Oberson.

A noter que l’Association des communes fribourgeoises (ACF) encadre généralement les processus de fusion et mène les séances d’information pour aiguiller les communes sur les bénéfices et désavantages de ce processus. Belfaux et Neyruz ont également évoqué en séance de Conseil général une certaine ouverture à la fusion.

RA