L’héritage de Pierre Dreyer, le «Kennedy fribourgeois»
L’historien Jean-Pierre Dorand consacre un ouvrage à Pierre Dreyer, conseiller d’Etat de 1966 à 1981
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3 mai 2022 à 15:44
Interview » Passé maître dans l’art de dresser le portrait biographique des figures politiques du canton de Fribourg, l’historien Jean-Pierre Dorand, lui-même ancien député PDC, consacre un ouvrage au démocrate-chrétien Pierre Dreyer (1924-2005), conseiller d’Etat de 1966 à 1981 et sénateur entre 1972 et 1987.
Longtemps, l’économie fribourgeoise stagne, restant tournée vers l’agriculture. Dans les années 1950, les habitants quittent le canton par milliers. Sans Pierre Dreyer, Fribourg serait-il parvenu à sortir de ce marasme?
Jean-Pierre Dorand: En 1941, les agriculteurs représentent 43% des actifs. En 1960, ils n’en constituent plus que 27%, et 13% en 1980. Ces chiffres sont intéressants, car ils illustrent l’évolution qu’a connue Fribourg. Sous Paul Torche (conseiller d’Etat entre 1946 et 1966, ndlr), le canton passe de l’agriculture à l’industrie. Et sous Pierre Dreyer, il passe de l’industrie aux services. Ce sont ces deux hommes qui permettent de sortir du marasme. Paul Torche lance le mouvement et Pierre Dreyer le poursuit, même s’il ne faut pas oublier que Pierre Dreyer est le chef de service de Paul Torche au sein du Département de l’Economie entre 1956 et 1961. Cela montre la filiation entre les deux hommes.
Pierre Dreyer est donc l’héritier spirituel de Paul Torche?
Oui. En mars 1966, Paul Torche démissionne, ce qui donne lieu à une élection partielle. Il aurait aimé que le Parti conservateur chrétien-social (devenu ensuite le PDC, puis le Centre, ndlr) présente Pierre Dreyer pour lui succéder. Mais il y a une intrigue en Gruyère, et c’est finalement Jacques Morard qui se lance. Cet épisode montre chez les conservateurs un fossé entre ceux qui sont ouverts au progrès comme Paul Torche ou Pierre Dreyer et les catholiques intégristes tels que Jacques Morard. Visiblement, la population fribourgeoise a déjà bien intégré les préceptes du concile Vatican II, et Jacques Morard est battu par le radical Paul Genoud, ce qui est quand même le signe d’un changement profond. Pour Pierre Dreyer, ce n’est que partie remise, car il est finalement élu en novembre 1966 dans le cadre d’élections générales.
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