L’ambitieuse qui rêve de Palais fédéral
A seulement 31 ans, Johanna Gapany s’attaque au siège du sortant Beat Vonlanthen au Conseil des Etats
Partager
Guillaume Chillier et Nicolas Maradan
29 octobre 2019 à 20:33
Portrait » Malgré son jeune âge, elle est devenue une figure de la politique fribourgeoise. Johanna Gapany apparaît sur les radars en 2010. A 21 ans, elle devient vice-présidente des Jeunes libéraux-radicaux fribourgeois, dont elle reprend la présidence peu après. Puis tout s’enchaîne. En 2012, elle entre au Conseil général de Bulle, avant de devenir conseillère communale quatre ans plus tard. Dans la foulée, elle accède également au Grand Conseil. La libérale-radicale est partout, y compris dans les médias romands, friands de sa fraîcheur et de son éloquence. Aujourd’hui, la Gruérienne ambitionne d’égaler un autre record de précocité, celui d’un certain Alain Berset: devenir sénatrice à seulement 31 ans.
Mais, sur les bancs du parlement cantonal, elle est une députée discrète. En presque trois ans, elle n’y a pris la parole qu’à une dizaine de reprises. Soit près de quatre fois moins, par exemple, que le socialiste Elias Moussa, élu en même temps qu’elle. Son principal fait d’armes est une motion en faveur de l’assouplissement des horaires nocturnes des bars, restaurants et autres discothèques. Acceptée quasiment à l’unanimité, cette proposition devrait bientôt se concrétiser, pour le plus grand bonheur des tenanciers et des noctambules. Parmi ses autres combats, la lutte contre l’abstentionnisme chez les jeunes et les défis de l’open data.
Lire aussi » Fribourg soigne ses noctambules (11.06.2019)
Toutefois, il manque encore à la Bulloise une véritable personnalité politique. Ou, à défaut, un cheval de bataille qui lui permettra de se profiler. Cheffe de projet à l’hôpital Daler, elle paraît souvent effacée sur les questions de santé, restant dans l’ombre de son collègue de parti Jean-Daniel Schumacher, ancien président de la Société de médecine du canton de Fribourg.
De plus, issue d’une famille de paysans, elle ne se mêle guère de politique agricole, pourtant un enjeu majeur. «Je ne propose pas des thèmes mais une manière de faire de la politique», répond la principale intéressée. Elle ajoute: «J’aimerais amener aux citoyens mon indépendance. Je défends une politique de proximité, et j’ai la volonté de toujours mettre l’être humain au centre.»
Un libéralisme théorique
Membre de la peu influente commission des affaires extérieures du Grand Conseil, Johanna Gapany devra en outre élargir son réseau pour devenir une élue qui pèse réellement sur la destinée cantonale. Sa récente élection à la présidence de l’association des Remontées mécaniques Alpes fribourgeoises (RMAF) lui ouvre en tout cas de nouveaux horizons. Et la Gruérienne a la réputation d’être une travailleuse acharnée, maîtrisant les dossiers tant communaux, cantonaux que fédéraux. Elle s’inscrit parfaitement dans la ligne défendue par son parti, jusqu’à en réciter presque par cœur les prises de position. A tel point que ses détracteurs lui reprochent d’être l’avocate dévouée d’un libéralisme trop théorique, loin de ce que vit la population au quotidien.
Elle s’inscrit dans la ligne de son parti, jusqu’à en réciter presque par coeur les prises de position
Pourtant, dans sa commune, la libérale-radicale est confrontée tous les jours à la realpolitik. Celle des fleurs au coin de la rue, des jardins publics, des zones sportives ou de la voirie. Dans cet aquarium bullois, loin des concepts théoriques, l’élue chargée des sports et des espaces publics nage avec audace. Sans trop en faire non plus. Ferme, exigeante et travaillant avec intelligence, elle préside plusieurs commissions d’une main de maître, n’hésitant pas à prendre conseil dans les dossiers où elle se sait plus fragile. Bref, elle est quasiment irréprochable même si, à l’instar de son activité au Grand Conseil, elle reste plutôt discrète à Bulle. Dans la retenue, elle ne se prononce presque jamais sur les dossiers de ses collègues.
Notre dossier » Elections fédérales 2019
Ses hauts faits locaux? La prochaine rénovation de la piscine, pour huit millions de francs, qu’elle a défendue tant face à ses collègues de l’exécutif que devant le Conseil général. Si ce projet est dans le pipeline communal depuis bien avant son élection, c’est quand même elle qui l’a pris en main pour le faire aboutir. Ou la poursuite du projet des Jardins de la cité, un réseau de parcs publics au centre-ville, dont le premier a été inauguré en septembre. Enfin, depuis son arrivée, ça semble bouger sur la question des infrastructures sportives du chef-lieu gruérien, nombreux saluant son dynamisme et son soutien aux activités physiques.
Un train à haute vitesse
Reste que la meilleure élue PLR en 2016 à Bulle a les dents longues. Et le don d’agacer, de susciter la jalousie, même dans son propre camp. Elle fait de la politique une activité de tous les jours. Comme si elle était en campagne permanente. Une ambitieuse (d’autres diront carriériste) qui irrite certains acteurs locaux qui n’ont pas ou plus les mêmes ambitions. Ils n’apprécient guère de voir passer le train Gapany à haute vitesse. Son prochain arrêt sera-t-il la gare de Berne? Certains estiment qu’il est encore trop tôt pour qu’elle accède à la plus haute fonction politique à laquelle elle pourrait être élue par le peuple. Mais la Gruérienne sait qu’elle a aujourd’hui ses chances.
Bio express
1988: Naissance à La Tour-de-Trême. Son père, Jean-Carlo, y est conseiller communal radical entre 1996 et 2005.
2010: Election à la présidence des Jeunes libéraux-radicaux du canton de Fribourg.
2011: Bachelor d’économiste HES à la Haute Ecole de gestion de Fribourg.
2012: Election à la vice-présidence des Jeunes libéraux-radicaux suisses.
2012: Entrée au Conseil général de Bulle, qu’elle préside en 2015.
2016: Election au Conseil communal de Bulle ainsi qu’au Grand Conseil.
Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus