Des cours avant d’accueillir toutou
Fribourg réintroduit des mesures pour les futurs détenteurs de chiens et les chiots. Suffisant?
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Magalie Goumaz
9 février 2023 à 02:01
Animaux » Les nouveaux détenteurs de chien ainsi que ceux qui n’en ont pas détenu depuis dix ans auront l’obligation de suivre des cours théoriques avant même d’accueillir leur toutou dans leur foyer. A cela s’ajoute une obligation pour tous les jeunes chiens, indépendamment du profil du propriétaire, de passer un test dans un délai de dix-huit mois afin que le comportement de l’animal puisse être évalué.
Le Grand Conseil a accepté hier par 95 voix contre 4 et 1 abstention d’introduire ce dispositif afin d’améliorer le bien-être des humains et des animaux, et de diminuer le risque d’agressions. Par contre, l’obligation de disposer d’une autorisation pour un chien de races listées et pour la détention de plus de quatre chiens adultes est supprimée.
Combler un vide
Acceptée en mai 2021, la motion de Bertrand Morel (le centre, Lentigny) et de Romain Collaud (plr, Massonnens), élu depuis au Conseil d’Etat, n’a pas été fondamentalement remise en question hier. Elle comble un vide après la décision prise en 2016 par les Chambres fédérales de supprimer les cours obligatoires pour tous les détenteurs de chiens. D’autres cantons ont légiféré à leur niveau, dont Neuchâtel et le Valais.
La socialiste Rose-Marie Rodriguez (Estavayer-le-Lac) estime qu’«un chien mal dressé est un animal qui souffre et qui peut avoir un comportement agressif». Achim Schneuwly (udc, Oberschrot) revient pour sa part sur la crise sanitaire. «Combien de personnes ont acheté un chien pour s’occuper, puis s’en sont débarrassées? Un cours théorique permet à chacun de prendre conscience de ses responsabilités», estime-t-il.
Annick Remy-Ruffieux (le centre, Charmey) s’est également penchée sur la question, se demandant si tous les chiens devaient être mis dans le même panier. Mais elle rappelle ces statistiques officielles selon lesquelles ce sont les chiens croisés qui mordent le plus.
La sanction à infliger aux contrevenants a fait l’objet d’un amendement. Bertrand Morel a en effet repéré une incohérence entre le sort réservé à ceux qui échouent aux tests et ceux qui se soustraient aux nouvelles obligations. Il a obtenu du Grand Conseil la peine maximale pour tous: à savoir le retrait de l’animal. Une mesure jugée disproportionnée par le conseiller d’Etat Didier Castella. «Si vous savez qu’on peut vous retirer le chien, vous serez moins enclin à éviter les cours», estime cependant Bertrand Morel.
Le Conseil d’Etat doit encore fixer la date de l’entrée en vigueur du niveau dispositif, mais ce sera probablement au 1er janvier 2024. Les clubs cynologiques contactés y sont en tout cas favorables. «Ça ne peut qu’être positif», estime par exemple Jean-François Gobet, président de Cyno-Gruyère, même si pour lui, le délai de 18 mois pour passer le test d’évaluation est long. «Nous proposons toute une panoplie de cours. La demande est grande, mais nous constatons qu’une partie des gens arrivent lorsque la situation est déjà compliquée. Ils auraient dû faire cette démarche dès le départ.»
Aller plus loin
Présidente de l’Association romande des éleveurs de chiens de race, Danièle Waeber trouve également dommage, à titre personnel, que l’obligation ne concerne que les cours théoriques. «On croise quand même pas mal de gens qui ne maîtrisent pas leur chien», constate-t-elle.
Vétérinaire comportementaliste, la doctoresse Colette Pillonel reste sur la réserve. «Une information avant de prendre un chien est nécessaire. Toutefois un test pour tous les nouveaux chiens est contraignant et coûteux. Quels sont les résultats escomptés de cette législation? Comment seront fixés les critères du test? Seront-ils adaptés le cas échéant? Quid des chiens en cas d’échecs répétés? Séquestre? Cette législation reste délicate et ne devrait pas faire peur aux propriétaires de chien, mais les motiver. Il faut d’autre part être conscient qu’une conductibilité parfaite ne garantit ni la non-dangerosité, ni le bien-être du chien: une telle loi n’empêchera pas un nouvel Auboranges», répond-elle par écrit.
Selon les statistiques du Service cantonal de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (SAAV), publiée par le Conseil d’Etat en réponse à la motion, il y a à Fribourg près de 18 000 détenteurs pour près de 22 000 chiens. Il y a environ 1500 nouveaux chiens par an.
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