La vie, tant bien que mal

Salomé Kiner » L’auteure, qui sera présente ce dimanche à Fribourg, sort son premier roman, Grande couronne.

Les mots sont crus, le sujet est fort. Le premier roman de Salomé Kiner, Grande couronne, parle de l’adolescence, d’une période sauvage où l’éducation sentimentale et sexuelle cherche ses propres codes. Elle y raconte la prostitution, la banlieue parisienne et les années 90. Plusieurs fois le récit entrera en résonance avec un autre premier livre, celui de Rebecca Gisler, D’oncle. On trouvera des liens entre ces personnages à la frontière des âges et des sentiments. Et aussi un humour pince-sans-rire évitant au récit de tomber dans le sordide ou le drame. Interview de l’auteure, qui a grandi près de Paris dans une famille franco-russe et qui est également journaliste au Temps.

Vous amenez ce sujet de la prostitution avec beaucoup de simplicité, en entraînant le lecteur dans la tête de cette ado qui ne distingue pas vraiment le bien du mal…

Salomé Kiner: Je voyais l’adolescence comme un âge où l’on est confronté à des réalités d’adultes (problèmes familiaux, sexualité, premières expériences professionnelles) tout en ayant encore les ressources matérielles et psychologiques d’un enfant. Le manque d’indépendance et de recul réduit la marge de manœuvre. Pour moi, le vrai sujet du livre est là: comment cette confusion entre nos désirs et les risques qu’ils impliquent peuvent entraîner des adolescents dans des situations dangereuses ou dramatiques.

Comment avez-vous fait pour vous mettre à la fois à la place de cette adolescente éprise de liberté et de son opposé, sa mère, qui la considère comme une enfant?

Je ne l’ai pas fait en conscience, mais j’avais commencé à écrire à la troisième personne et cela ne fonctionnait pas. J’avais l’impression que moi, Salomé Kiner, je plaquais mes idées sur le personnage de la fille. Très vite, je me suis rendu compte que l’intérêt de parler d’adolescence était de parler depuis l’adolescence et pas du point de vue d’un adulte regardant, paniqué, cette période grouillante. La littérature est un moyen de se déplacer dans le temps et l’espace mais aussi dans la psyché d’autres personnes.