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Politique

Russie. Plus d'un millier de personnes sur la tombe de Navalny à Moscou

Un an après la mort en prison du principal opposant au Kremlin, Alexeï Navalny, plus d'un millier de ses partisans se sont recueillis dimanche sur sa tombe à Moscou malgré le risque de représailles judiciaires.

En début d'après-midi, la tombe d'Alexeï Navalny était recouverte d'une petite montagne de fleurs, ainsi que de messages laissés par la foule.KEYSTONE/AP

ATS
AFP

ATS et AFP

16 février 2025 à 11:25, mis à jour à 22:02

Temps de lecture : 3 min

A Berlin, Ioulia Navalnaïa a appelé lors d'une cérémonie à la mobilisation des exilés russes. "Nous devons sortir" et manifester "pour ceux en Russie qui ne peuvent le faire", a déclaré la veuve du célèbre opposant.

"Soyons leur voix", car les Russes restés dans leur pays "ont peur de finir en prison", a ajouté celle qui est déclarée "extrémiste" en Russie et qui a repris la tête du mouvement d'Alexeï Navalny depuis l'étranger.

Punir les responsables

Férocement réprimée en Russie, divisée et affaiblie en exil, l'opposition russe tente de se relancer à l'étranger, jusqu'ici sans grand succès. Mais au moins 1500 personnes ont défilé dimanche pour déposer des fleurs sur la tombe de l'opposant au cimetière Borissovskoïé de Moscou, formant une file de plusieurs centaines de mètres.

Lors d'une brève prise de parole au cimetière, la mère d'Alexeï Navalny a dit vouloir que les responsables du "meurtre" de son fils soient "punis". "Le monde entier connaît le commanditaire. Mais nous voulons que les exécutants soient connus", a ajouté Lioudmila Navalnaïa.

Par un temps glacial, des dizaines de familles avec enfants sont venues. Le dispositif sécuritaire était discret, avec principalement des policiers en civil déployés autour du cimetière.

Diplomates occidentaux

En pleurs, Anna, une psychologue pour enfants de 63 ans, dit à l'AFP qu'elle ne s'attendait pas "à voir autant de gens" alors que, selon elle, "la peur est présente chez tous". Alexandre, un étudiant de 18 ans, explique qu'il a surmonté ses craintes "pour ne pas avoir honte" de lui-même.

Plusieurs diplomates occidentaux, notamment des représentants des ambassades américaine, française, espagnole, norvégienne et de l'Union européenne, sont aussi allés sur la tombe de l'opposant, a constaté l'AFP. En début d'après-midi, celle-ci était recouverte d'une petite montagne de fleurs, ainsi que de messages laissés par la foule.

Charismatique militant anticorruption et ennemi politique numéro un de Vladimir Poutine, M. Navalny avait été déclaré "extrémiste" par la justice russe. Evoquer en public l'opposant ou son organisation, le Fonds de lutte contre la corruption (FBK), sans préciser qu'ils ont été décrétés "extrémistes", expose les contrevenants à de lourdes sanctions.

Cette menace reste en vigueur malgré sa mort dans des circonstances troubles dans une prison de l'Arctique le 16 février 2024 et malgré l'exil hors de Russie de la quasi-totalité de ses collaborateurs.

Hommages hors de Russie

Les collaborateurs en exil de l'opposant ont annoncé la tenue de commémorations dans le monde entier. Une quarantaine de personnes se sont rassemblées dimanche devant l'ambassade de Russie à Berlin. Alexeï Navalny a "changé ma vie", a confié Iouri Korolev, 32 ans, saluant "un homme qui est mort pour ses idées".

Le chancelier allemand Olaf Scholz a salué un homme qui a perdu la vie "parce qu'il s'est battu pour la démocratie et la liberté en Russie". Vladimir Poutine et les autorités russes "portent l'ultime responsabilité" de la mort d'Alexei Navalny, a souligné la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas.

Un avis partagé par la France, qui a adressé "un message de soutien et de solidarité à toutes celles et ceux qui défendent avec courage en Russie les libertés individuelles et l'Etat de droit".

Méthodiquement démantelé

Des chaînes Telegram favorables au Kremlin avaient pour leur part averti les partisans du défunt opposant, leur déconseillant d'aller au cimetière.

Les autorités russes ont méthodiquement démantelé le mouvement d'Alexeï Navalny, envoyant nombre de ses partisans en prison. Quatre journalistes sont actuellement jugés en Russie pour "participation à un groupe extrémiste", accusés d'avoir réalisé des images pour l'équipe de l'opposant.

En janvier, trois des avocats qui défendaient l'opposant ont été condamnés à des peines allant de trois ans et demi à cinq ans de prison pour avoir transmis ses messages alors qu'il était en détention. "Un rappel brutal de la volonté des autorités russes de faire taire toute voix dissidente", a souligné Paris dimanche.

Mort en prison

La mort d'Alexeï Navalny à l'âge de 47 ans n'a toujours pas été entièrement expliquée. Les autorités russes affirment qu'elle est survenue pendant qu'il se promenait dans la cour de la prison, tandis que ses soutiens accusent le pouvoir de l'avoir tué.

Il avait été arrêté en janvier 2021, à son retour en Russie après avoir été soigné en Allemagne d'un empoisonnement en Sibérie dont il avait imputé la responsabilité au Kremlin, qui a rejeté cette accusation. En décembre 2023, il avait été transféré dans une colonie pénitentiaire isolée au-delà du cercle polaire arctique afin d'y purger une peine de 19 ans pour "extrémisme".