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Forum/Courrier des lecteurs

Bonnes résolutions, J+22


Yves-Alexandre Thalmann

Yves-Alexandre Thalmann

22 janvier 2020 à 02:01

Opinion » Perdre du poids, manger plus sainement, pratiquer régulièrement de l’exercice, diminuer sa consommation d’alcool… Peut-être reconnaissez-vous l’une de vos bonnes résolutions pour cette nouvelle année? Ou plutôt ce qu’il en reste: un goût d’échec amer. Vous vous fustigez alors de ne pas avoir eu assez de volonté, tout en jurant de faire mieux la prochaine fois.

Pourquoi avez-vous craqué? Sans doute avez-vous surestimé votre volonté. Ce qui vous a amené à négliger les facteurs issus du contexte. Quand vous décidez de faire du sport trois fois par semaine, vous êtes confortablement installé dans votre fauteuil. Alors que lorsqu’il s’agira de se rendre à la salle de fitness, vous aurez déjà une éprouvante journée de travail derrière vous. Et une envie folle de voir le film programmé à la télévision…

Puisqu’il nous est difficile de prévoir toutes les tentations qui jalonneront notre route, autant faire preuve d’humilité: celles-ci auront vraisemblablement raison de notre détermination. Considérons notre volonté comme vaincue d’avance. Mais sans sombrer dans le pessimisme pour autant. Car cette humilité peut être la clé de notre succès. Comment? Laissons-nous inspirer par Ulysse, héros de la mythologie grecque.

Ulysse aspire à écouter le chant des sirènes, mais il sait qu’il risque de se faire envoûter comme tous les navigateurs avant lui. Il ne commet pas l’erreur fatidique de surestimer sa force. Au contraire, il anticipe sa chute: il demande à ses marins de le ligoter au mât du navire, de se boucher les oreilles et de ne plus obéir à ses ordres. Et cela ne manque pas: à la première note, Ulysse devient fou, sa détermination vole en éclats. Il hurle qu’il faut qu’on le libère… en vain.

Si même un héros tel qu’Ulysse voit sa volonté flancher, il serait prétentieux de penser que nous résisterons mieux aux sirènes des barres chocolatées, succulents alcools et sofas si accueillants! Considérons notre volonté comme l’une des voix de notre parlement intérieur. A l’image des Chambres fédérales, différentes alliances se font jour pour prendre les décisions. Devant cette vitrine où trônent d’excellentes pâtisseries, il y a certes la volonté qui nous enjoint de ne pas céder. Mais il y a aussi l’envie qui nous titille, les émotions qui s’époumonent, et notre intelligence qui tisse déjà mille justifications à notre futur laisser-aller. Conscients de notre faiblesse, nous choisissons d’anticiper notre probable défaillance et changeons d’itinéraire pour ne pas croiser ces maudites pâtisseries. Il est beaucoup plus facile d’éviter une tentation que d’y résister, foi d’Ulysse!

D’aucuns trouvent cette stratégie – baptisée contrat d’Ulysse – dévalorisante. Ils préfèrent croire au renforcement de la volonté qui pourrait s’entraîner comme un muscle. Pour ma part, j’y vois une certaine noblesse: reconnaître nos limites, anticiper nos défaillances et s’y préparer. La véritable force, n’est-ce pas de tenir compte de nos points faibles?

Sur ce, je dois vous laisser, c’est déjà l’heure d’aller à la salle de sport… Si je me désiste, je me suis engagé à payer un souper au Pérolles à mon ami.

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