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Rencontre à venir entre Trump et Poutine. Il n’y a aucune «trahison» selon Washington, les Européens sont inquiets

L’initiative prise par Donald Trump avec Vladimir Poutine sur l’Ukraine n’est pas une «trahison» de ce pays, a assuré jeudi le chef du Pentagone lors d’une réunion avec les alliés européens. Pris de court, ceux-ci réclament une place à la table des négociations.

Le président américain a créé la stupeur lorsqu’il a annoncé mercredi qu’il rencontrerait son homologue russe Vladimir Poutine en Arabie Saoudite.KEYSTONE/EPA/MAXIM SHIPENKOV

ATS
AFP

ATS et AFP

Aujourd’hui à 14:01, mis à jour à 14:50

Temps de lecture : 3 min

Le président américain a créé la stupeur lorsqu’il a annoncé mercredi qu’il rencontrerait son homologue russe Vladimir Poutine en Arabie Saoudite, peu après un échange téléphonique entre les deux dirigeants qui sont convenus d’engager «immédiatement» des négociations pour mettre fin à la guerre en Ukraine.

Face aux critiques nourries d’alliés européens, son ministre Pete Hegseth a réfuté toute «trahison» avant le début d’une réunion des ministres de la Défense de l’Otan.

Européens inquiets

Mais l’Allemagne, deuxième plus important contributeur d’aide militaire à l’Ukraine après Washington, est loin d’être rassurée. Son chancelier Olaf Scholz a dit refuser une «paix imposée» à Kiev.

Tout accord de paix sur l’Ukraine négocié «dans le dos» des Ukrainiens et des Européens est voué à l’échec, a renchéri la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas.

Elle n’a pas hésité à évoquer 1938 comme parallèle à la situation actuelle, quand Londres et Paris avaient entériné dans les accords de Munich l’annexion d’une partie de la Tchécoslovaquie par l’Allemagne hitlérienne.

Faisant écho aux critiques de Berlin, Mme Kallas a également critiqué la stratégie de négociations du président Trump. «Pourquoi nous leur donnons tout ce qu’ils veulent avant même que les négociations aient commencé?» a-t-elle ainsi interrogé.

Parmi différentes lignes rouges présentées par l’administration Trump mercredi, les Etats-Unis ont indiqué qu’une adhésion de l’Ukraine à l’Otan n’était pas réaliste, tout comme un retour de l’Ukraine dans ses frontières d’avant 2014, c’est-à-dire avec la Crimée, annexée par Moscou.

Les Américains ont aussi estimé qu’il appartenait désormais aux Européens d’assurer l’essentiel du soutien à Kiev.

«Sécurité de l’Europe»

Autant d’annonces qui ont provoqué la satisfaction des dirigeants russes, qui ont indiqué vouloir élargir la discussion à la «sécurité en Europe».

Le Kremlin souhaite, au-delà de l’Ukraine, un «débat approfondi» sur «la sécurité sur le continent européen» dans son ensemble et les «préoccupations liées à la sécurité» de la Russie, a affirmé son porte-parole Dmitri Peskov.

La Chine, partenaire et soutien objectif de la Russie, s’est dit de son côté «contente de voir» Washington et Moscou «renforcer leur communication».

En revanche, dans le camp ukrainien, la prudence est de mise, dans un contexte de fortes incertitudes.

«Là maintenant, le message est que nous continuons. Nous sommes forts, nous sommes capables», a affirmé le ministre ukrainien de la Défense Roustem Oumarov depuis Bruxelles, sans donner davantage de détails.

«Moment de vérité»

L’annonce de l’ouverture «immédiate» de négociations de paix sur l’Ukraine, et le discours de vérité du nouveau secrétaire américain à la Défense exigeant des Européens qu’ils se prennent en main, a eu l’effet d’un coup de tonnerre au siège de l’Alliance.

«C’est un grand moment de vérité» pour l’avenir de l’Otan, a ainsi jugé le ministre français de la Défense Sébastien Lecornu.

«On dit que c’est l’alliance militaire la plus importante, la plus robuste de l’histoire. C’est historiquement vrai, la vraie question c’est: est-ce que dans 10 ou 15 ans c’est toujours le cas? », a-t-il ajouté.

Balayant doutes et critiques, le secrétaire américain à la Défense Pete Hegseth a assuré jeudi que Donald Trump était le «meilleur négociateur de la planète», et le seul capable d’assurer une paix «durable» en Ukraine.

«Cas de figure classique»

Pour Frédéric Encel, maître de conférences à Sciences Po Paris, «c’est un cas de figure extrêmement classique», qui renvoie à l’époque de la guerre froide.

«Moscou et Washington, à la fin des fins, lorsqu’il y avait conflit, lorsqu’il y avait tension, réglaient de manière systématique la question entre eux», a-t-il expliqué à l’AFP.

Dans ce contexte, «les Européens, tant qu’ils ne constitueront pas un pôle de puissance, (…), ne compteront pas pour grand-chose», a-t-il assuré.