Proche-Orient. Des habitants retournent dans le sud du Liban
Les habitants du sud du Liban rentrent mardi dans leurs villages dévastés par plus d'un an de conflit après le retrait d'Israël. L'Etat hébreu a toutefois maintenu cinq positions frontalières, une décision dénoncée par l'ONU et Beyrouth.
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ATS et AFP
18 février 2025 à 07:45, mis à jour à 12:56
A Kfar Kila, près de la frontière nord d'Israël, de nombreuses voitures étaient garées à l'entrée du village, les habitants revenant à pied après l'expiration de la date limite pour qu'Israël se retire, dans le cadre d'un accord de cessez-le-feu avec le Hezbollah pro-iranien, entré en vigueur le 27 novembre.
Mais beaucoup, dont Alaa al-Zein, découvrent des maisons détruites ou gravement endommagées. Certains cherchent à récupérer les corps ou les restes de proches parmi les dépouilles de combattants laissés depuis des mois.
"Le village entier a été réduit en ruines. C'est une zone sinistrée, comme Hiroshima et Nagasaki", assure M. Zein à l'AFP depuis la localité frontalière.
Malgré la dévastation, il affirme que les villageois sont déterminés à se réinstaller: "le village entier revient, nous installerons des tentes et nous assoirons par terre".
Samira Jomaa est arrivée tôt ce matin pour chercher le corps de son frère, un combattant du Hezbollah tué il y a cinq mois. "Nous n'avons aucune nouvelle d'eux jusqu'à maintenant. Nous sommes certains qu'ils sont morts en martyr", dit-elle.
D'autres attendent à l'entrée du village accompagnés de l'armée libanaise. Celle-ci a annoncé s'être déployée mardi dans une dizaine de villages frontaliers après le retrait des troupes israéliennes.
Tandis que des ambulances sont prêtes à entrer pour récupérer les corps sans vie, des dizaines de voitures attendent aussi à un point de contrôle de l'armée libanaise pour entrer dans les localités de Taybeh et Odaisseh, a constaté un photographe de l'AFP.
A proximité, des femmes brandissent des photos de leurs proches, tués en combattant pour le Hezbollah ou le drapeau jaune du mouvement islamiste libanais.
"Temporaire"
"L'armée israélienne s'est retirée de tous les villages frontaliers à l'exception de cinq points", a déclaré à l'AFP une source de sécurité libanaise, le ministre de la Défense israélien, Israël Katz, confirmant ensuite le maintien de forces dans cinq postes de contrôle.
Israël avait prévenu lundi compter "laisser temporairement un petit nombre de soldats déployés sur cinq points stratégiques le long de la frontière libanaise", malgré l'exigence des autorités libanaises d'un retrait total.
L'ONU a averti mardi que tout retard dans le retrait israélien violait la résolution 1701 du Conseil de sécurité, qui avait mis fin en 2006 à la guerre entre Israël et le Hezbollah, et sur laquelle repose l'accord de cessez-le-feu actuel.
"Occupation"
Le Liban a lui affirmé que toute présence israélienne sur son sol constituait une "occupation", et qu'il allait saisir le Conseil de sécurité de l'ONU pour "obliger Israël à un retrait immédiat". Il a réaffirmé que son armée était prête à remplir son rôle dans la zone frontalière avec Israël.
Quand l'armée libanaise sera entièrement déployée dans tout le sud du Liban, Israël "devrait achever son retrait du Liban, à condition que le Hezbollah continue de respecter l'accord" de cessez-le-feu, anticipe pour l'AFP Jonathan Conricus, ancien porte-parole de l'armée israélienne et analyste.
Cet accord a mis fin à deux mois de guerre ouverte entre Israël et Hezbollah, pendant lesquels les troupes israéliennes ont pris position dans le sud du Liban, à la frontière du nord d'Israël.
Il prévoyait qu'Israël achève le 26 janvier - une échéance ensuite reportée au 18 février - son retrait du sud du Liban, où seuls l'armée libanaise et les Casques bleus de l'ONU devaient être déployés.
Le Hezbollah devait pour sa part démanteler ses infrastructures et se retirer au nord du fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres de la frontière israélienne.
Le Hezbollah affaibli
Puissant mouvement armé ayant dominé pendant des années la vie politique au Liban, le Hezbollah a été fondé et financé par l'Iran, ennemi juré d'Israël.
Mais plus d'un an d'hostilités contre Israël, "en soutien" au mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza, ont considérablement affaibli la formation, dont la direction a largement été décimée.
Depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, Israël a mené des frappes aériennes dans le pays voisin, qui ont fait plus de 60 morts. Une vingtaine de personnes ont été tuées le 26 janvier, alors que des habitants tentaient de retourner dans leurs villages frontaliers.
Plus de 4000 personnes ont été tuées au Liban depuis octobre 2023, selon le ministère de la Santé. Côté israélien, plusieurs dizaines de soldats et civils ont péri, d'après les autorités.