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Revanchard

Absent l’an passé, Novak Djokovic aborde l’Open d’Australie, qui commence lundi, en superfavori


 Pierre Salinas

Pierre Salinas

14 janvier 2023 à 02:01

Tennis » Il n’est toujours pas vacciné, pas que l’on sache en tout cas. Mais ses convictions fortes, celles-là même qui l’avaient contraint à dormir dans un hôtel miteux avant d’être expulsé du territoire l’an passé à pareille époque, ne devraient pas empêcher Novak Djokovic de célébrer le 29 janvier prochain un dixième titre à l’Open d’Australie. L’entrée en matière paraît trop péremptoire? Elle défie les lois d’un sport trop complet pour faire l’économie de surprises, souvent plus nombreuses «down under» qu’ailleurs? C’est vrai. Il n’empêche: vainqueur à Adelaïde il y a deux semaines, le Serbe de 35 ans, retombé au 5e rang mondial, aborde cette première levée du grand chelem en super-archi-méga-favori.

«Ça va être compliqué de trouver quelqu’un qui vous dise que «Djoko» n’est pas l’homme à battre», souffle au bout du fil le Français Arnaud Clément, finaliste malheureux à Melbourne en 2001 (battu par Andre Agassi) et consultant pour Eurosport. Notamment. «Quand on pense Open d’Australie, on pense obligatoirement Djokovic, parce qu’il l’a déjà gagné neuf fois», abonde le Genevois Marc Rosset, champion olympique en 1992, qui juge Stéfanos Tsitsipas (ATP 4) et Daniil Medvedev (ATP 8) les plus capables de disputer la victoire à «Nole». Le Grec et le Russe sauront-ils se montrer à la hauteur d’un trentenaire qui a mille et une raisons, trois pour le moins, de vouloir briller dès lundi, dans la nuit de dimanche à lundi en Suisse?

1 Un champion fier et revanchard

Novak Djokovic a atterri sur l’île-continent sans aucun point ATP à défendre pour la simple et bonne raison qu’il n’avait pu exercer son métier il y a une année, faute d’être vacciné. Jouera ou jouera pas? Longtemps, les annonces s’étaient faites contradictoires, avant que le Gouvernement australien ne mette un terme à ce feuilleton judiciaire en annulant son visa et en renvoyant le joueur à la maison, manu militari ou presque. La manière avait choqué certains. Nul doute qu’elle est restée au travers de la gorge de l’ancien N°1 mondial, que l’on devine revanchard et qui n’en sera que plus dangereux. Le «Djoker» n’a-t-il pas le pouvoir de se nourrir de l’adversité?

«Quand il affrontait Roger (Federer) à Wimbledon ou Nadal à Roland-Garros, les gens pouvaient effectivement prendre fait et cause pour l’autre. Pas en Australie, je ne crois pas. Le public l’a au contraire très bien accueilli», nuance Marc Rosset. Arnaud Clément ne parle pas de vengeance ni de ressentiment non plus. «Djokovic aussi a fait des erreurs. S’il a été meurtri, c’est au niveau sportif seulement. Parce qu’il avait été privé de son tournoi préféré et, pire, avait vu Nadal s’imposer et prendre ses distances au niveau des titres du grand chelem», observe le natif d’Aix-en-Provence. Et de rappeler: «Les meilleurs ont cette capacité à rebondir après un échec. C’est ainsi qu’ils se construisent.»

2 Le roi de Melbourne est en forme

Melbourne, mon amour. Depuis 2011, Novak Djokovic présente un bilan de 73 victoires contre 3 défaites sur les bords du Yarra. L’homme aux 21 titres majeurs part d’autant plus confiant qu’il a remporté son premier tournoi de l’année début janvier à Adelaïde. Logiquement, la manière n’a pas toujours été au rendez-vous. Mais en matant un client tel que Daniil Medvedev puis en sauvant une balle de match en finale face à l’Américain Sebastian Korda (ATP 31), le héros serbe a ajouté une couche d’invincibilité à une armure qui n’a été prise à défaut que deux fois depuis Wimbledon, en juillet dernier.

«On l’a vu à Adelaïde ou à Paris-Bercy en novembre, où il perd devant (Holger) Rune: sur un format en deux sets, Djokovic est vulnérable. Mais dans un match au meilleur des cinq, je trouve qu’il a toujours, de par son expérience, un léger avantage sur les autres», estime Marc Rosset. «Il a connu une année 2022 tronquée à cause de son statut vaccinal qui ne lui a pas permis de jouer partout. Mais à chaque fois qu’il a repris, il était tout de suite à son meilleur niveau. Preuve qu’il sait se préparer», constate Arnaud Clément.

3 Une place de N°1 à aller chercher

Blessé à une jambe, le roi Carlos Alcaraz Ier a dû déclarer forfait. Sa place de N°1 mondial est remise en jeu et trois hommes peuvent la lui prendre: Casper Ruud (ATP 2), Stéfanos Tsitsipas ainsi que… Novak Djokovic pardi! Comme le grand Grec, «Nole» n’a d’autre choix que de gagner le tournoi pour récupérer le trône qu’il avait quitté le 6 juin dernier. Si les deux derniers nommés échouent dans leur tentative, le Norvégien, qui avait déjà raté le coche en septembre à l’US Open au profit de Carlos Alcaraz, n’aura qu’a atteindre la finale, et la finale seulement.

Six matches séparent Casper Ruud du trône, contre sept aux autres prétendants. Sauf qu’une fois encore, Novak Djokovic semble avoir une longueur d’avance, lui qui a hérité d’un tirage au sort que l’on qualifierait de clément s’il ne souffrait pas des ischio-jambiers. Vraie gêne ou simple précaution d’usage? Les spéculations vont bon train. Elles ne doivent pas empêcher le Serbe de suivre son petit bonhomme de chemin comme il l’avait fait en 2021, lorsqu’il avait conquis son 9e sacre «melbournien» alors qu’il s’était fait une déchirure musculaire aux abdominaux dès le 3e tour. «A 35 ans, Djokovic reste l’un des meilleurs athlètes du circuit. Mais il n’est pas interdit de penser qu’avec la répétition des efforts il puisse être fatigué ou connaître un jour pas top, top», ose Arnaud Clément. «Plus les années vont passer et plus l’écart va diminuer: c’est mathématique. Il ne faut pas enterrer les «anciens», Rafael Nadal le premier. Jamais. Mais en tennis, tout va très vite. Dans un sens comme dans l’autre», renchérit Marc Rosset.

Le discours devient soudain moins péremptoire. Novak Djokovic peut-il être battu?

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