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Tennis

La patronne tire sa révérence

Serena Williams dispute à l’US Open, qui débute aujourd’hui, le dernier tournoi d’une intimidante carrière


 Pierre Salinas

Pierre Salinas

29 août 2022 à 04:01

Temps de lecture : 1 min

Tennis » Quand, en juin dernier, près d’un an après son abandon sur blessure à Wimbledon, Serena Williams a retrouvé à Eastbourne les joies du circuit WTA, sa sœur Venus a posté sur les réseaux sociaux ce gazouillis riquiqui mais révélateur: «La patronne est de retour.» Moins de trois mois plus tard, après être venue, avoir vu mais si peu vaincu, cette même patronne s’apprête à tirer sa révérence, elle qui dispute à l’US Open, lequel commence aujourd’hui à New York, le dernier tournoi d’une carrière entamée en 1997. Déjà.

Programmée cette nuit face à la Monténégrine Danka Kovinic (WTA 80), l’ancienne No 1 mondiale, retombée au-delà de la 400e place, ne manquera pas d’électriser les foules, comme elle l’a toujours fait. Nul doute qu’elle brandira le poing aussi, en extériorisant des «come on» rageurs et ravageurs. N’est-elle pas la «guerrière ultime», jamais battue avant qu’elle ne tende délicatement la main à son adversaire pour une poignée toujours franche et sans rancune?

Ce jeudi-là

«Serena Williams a traversé les époques et contribué à démocratiser notre sport»
Timea Bacsinszky

Son âge – 41 ans le 26 septembre –, l’état de son épaule, l’état de ses genoux, l’état de ses poumons et son état civil – mariée, un enfant – ne lui permettent plus d’envisager une victoire en finale, et c’est avec 23 titres du grand chelem, pas un de plus, que l’Américaine tirera un trait sur plus de deux décennies au plus haut niveau. Avec 24 couronnes «majeures», Margaret Court, la reine des «sixties» et des «seventies», peut pousser un «ouf» de soulagement et dormir sur ses deux oreilles, mais personne n’est dupe. De John McEnroe à Chris Evert en passant par Timea Bacsinszky, les avis sont unanimes: record ou non, la plus grande joueuse de l’histoire n’est pas une octogénaire australienne qui a défrayé la chronique pour avoir tenu des propos racistes et homophobes.

«Du temps de Margaret Court, le tennis n’était pas aussi populaire qu’aujourd’hui, mais réservé à une catégorie de gens aisés. Serena (Williams), elle, a traversé les époques et contribué à démocratiser notre sport. En plus d’avoir poussé le jeu à un niveau physique inégalé, son impact a été à nul autre pareil, vis-à-vis des personnes de couleur notamment. Il y a eu Althea Gibson, Arthur Ashe et, désormais, il y a aussi, et même surtout, Serena Williams», applaudit Timea Bacsinszky qui, retour au terrain, a affronté la cadette des deux sœurs à trois reprises. Sans jamais réussir à s’imposer, sa défaite en demi-finales de Roland-Garros en 2015 restant à jamais le point culminant de leur rivalité, si rivalité il y avait.

23

Le nombre de tournois du grand chelem remportés par Serena Williams

Ce jeudi-là, la Vaudoise, qui menait 6-3 3-2 break face à une adversaire diminuée par la grippe et qui l’avait ostensiblement fait savoir, trop au goût de certains, était passée près de l’exploit. Avant d’écoper d’un sec et trébuchant 6-0 dans la troisième manche. «On me reparle souvent de ce match, qui est celui dont le public suisse se souvient le plus, d’autant que Stan (Wawrinka) était cette année-là en demi-finales lui aussi, sourit Timea Bacsinszky. On me rappelle aussi l’attitude… théâtrale de Serena entre les points ou lors des changements de côté. A chaque fois, je dis la même chose: non, cela ne m’a pas déstabilisée. Et si, ce jour-là, c’était la seule façon de me battre, ben voilà, bravo à elle!» Et de préciser: «Elle n’avait rien fait d’interdit et, en sport, tous les coups sont permis, pour peu qu’ils soient donnés dans le respect de l’autre. De mon côté, je ne lui en ai jamais voulu et ne lui avais pas cassé du sucre sur le dos non plus. Je crois qu’elle a énormément apprécié que je ne le fasse pas.»

Aucun mépris

«Une fois sortie du court, elle était extrêmement gentille. Marrante, même»
Timea Bacsinszky

Ne pas se fier au sourire toujours poli, souvent détaché, parfois indifférent, qu’elle affiche en conférence de presse: Serena Williams n’est jamais aussi à l’aise que lorsqu’elle est dans le feu de l’action, et Dieu sait si la touffeur d’un fin d’été à Flushing Meadows sait attiser les passions. «Certaines championnes affichaient clairement leur mépris, ce dans les vestiaires déjà. Une façon pour elles de marquer leur territoire. Pas Serena, reprend Timea Bacsinszky. On ne peut pas blâmer quelqu’un de combatif ou d’agressif, même à outrance. Finalement, notre job n’est-il pas de gagner un maximum de matches? Serena faisait tout pour arriver à ses fins mais, une fois sortie du court, elle était extrêmement gentille. Marrante, même.»

«Mon incroyable service»

L’entreprise d’intimidation commençait dès le «pile ou face», à même le court. Selon, le règlement, qui gagne peut décider de servir ou de recevoir. «Elle m’a fait le coup et l’a aussi fait à Belinda Bencic récemment, rigole la jeune retraitée, médaillée d’argent aux Jeux olympiques de Rio en 2016. Lorsqu’elle remportait le tirage au sort, elle avait l’habitude de dire, l’air de rien: je crois que je vais choisir mon incroyable service…» Serena Williams, une main de fer dans un gant de velours, de latex, de cuir ou même en jeans, autant de matières qui ont garni ses tenues. «Guerrière ultime», oui. «Fashionista ultime» aussi.

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