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L’ancien parent pauvre du ski suisse

Six slalomeurs helvétiques ont rempli les critères pour les mondiaux. Une performance historique


K Christophe Spahr

K Christophe Spahr

20 février 2021 à 02:01

Mondiaux L C’est une époque que les quatre Valaisans, au départ du slalom, demain, n’ont pas connue. Parce que s’ils étaient six, les techniciens, à avoir atteint les critères pour se rendre à Cortina, cet hiver, il n’en a pas toujours été ainsi. Durant des décennies, le slalom était le parent pauvre du ski helvétique. Il était dans l’ombre des spécialistes de la vitesse, ces descendants de Roland Collombin et de Bernhard Russi, d’authentiques héros chez nous. «Les descendeurs étaient des dieux», se souvient le Fribourgeois Jacques Lüthy, un très bon technicien entre 1979 et 1988. «A leurs côtés, nous n’existions quasiment pas.»

«Ceux qui faisaient rêver le public, c’étaient Collombin et Russi», sourit le Valaisan Joël Gaspoz, sept victoires en Coupe du monde, dont un slalom (Wengen), entre 1980 et 1989. «En Suisse, tout le pays était branché sur la descente. Dans les bistrots, on s’agglutinait devant la télévision pour Kitzbühel ou Wengen, moins pour les épreuves techniques.»

Le pied de nez de Lüthy

Les anciens techniciens romands assurent qu’ils ne souffraient pas de ce relatif désintérêt pour les piquets courts. Ils reconnaissent toutefois aisément que la concurrence, dans cette discipline, n’était pas aussi dense dans les années 1980. Et plus tard. «Le groupe de slalomeurs était plutôt restreint mais nous avons quand même obtenu de bons résultats», apprécie Jacques Lüthy.

Une anecdote suffit à rappeler qu’à l’époque, le slalom n’était pas la priorité du ski suisse. Il n’y en avait, alors, uniquement ou presque pour les épreuves de vitesse. En 1980, avant les Jeux olympiques de Lake Placid, le Valaisan Martial Donnet aurait dû accompagner Jacques Lüthy aux Etats-Unis. Il avait réalisé les critères pour être au départ du slalom. Pourtant, il n’a pas effectué le voyage. «La Suisse avait préféré emmener six descendeurs, pour quatre places, alors même qu’ils n’avaient pas forcément tous réalisé les critères.»

Le Morginois était pourtant dans le coup, en slalom. «La fédération nous avait demandé de faire un top 10 lors du dernier slalom. J’avais terminé 10e et pris le meilleur sur mon concurrent direct, Peter Aellig. Mais ça n’avait pas suffi…» Là où l’histoire est drôle, c’est que la délégation masculine n’a ramené qu’une seule médaille de Lake Placid. Elle la doit, joli pied de nez, à Jacques Lüthy, un… slalomeur. «J’étais dans un bon jour», rappelle, timidement, le Fribourgeois, qui précise qu’il pratiquait «aussi la descente, dans l’optique des combinés notamment».

Le phénomène que l’on vit depuis quelques années tient à l’émergence de quelques leaders, lesquels ont créé une véritable émulation au sein des skieurs suisses. La descente est toujours aussi attractive. Mais le slalom est (re)devenu une discipline qui compte. «Il suffit que quelques slalomeurs émergent et arrivent tout devant pour stimuler les autres», analyse Joël Gaspoz. «Quand je remportais la Coupe du monde de géant, je ne survolais de loin pas la discipline en Suisse. A l’entraînement, je gagnais une manche sur trois, seulement. Le même phénomène se retrouve aujourd’hui en slalom.»

Slalom plus astreignant

Reste cette question. Pourquoi les skieurs suisses, à l’époque, étaient davantage attirés par la vitesse que par la technique? «Le slalom est plus astreignant que la descente ou le géant», avance Joël Gaspoz. «On se prenait des piquets derrière les cuisses, il fallait se faire violence à l’entraînement. Surtout, il y avait une tradition de la descente. C’est elle qui faisait rêver les gamins.»

«D’ailleurs, nous étions plutôt des géantistes que de purs slalomeurs», précise Jacques Lüthy. «Aujourd’hui, cette équipe de techniciens est blindée… C’est beau.»

Le Nouvelliste

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