Que d’efforts pour un demi-rameur

Bons pour le sport » Depuis le 2 février, ce ne sont pas des points, mais des bons qui sont distribués à la caisse des magasins du géant orange. Un par tranche de vingt francs d’achats. Une petite goutte d’eau dans un océan pour les sportifs amateurs du pays. La campagne Support Your Sport a créé une déferlante sur les réseaux sociaux, les participants étant invités à relever des défis afin de renforcer leur visibilité sur la plateforme.

Deux millions de plus?

Les clubs sont 8824, selon le site internet consacré à l’opération, à pouvoir profiter des trois millions à partager. Sachant que chaque inscription validée permet de toucher 100 francs et que le reste de l’argent mis en jeu sera réparti au prorata des bons attribués, les possibilités de toucher un montant à quatre chiffres sont infimes. Même si la Migros, selon son porte-parole pour la Suisse romande Tristan Cerf, a décidé d’augmenter la cagnotte à cinq millions.

Les clubs ont été répartis en trois groupes, un million étant attribué au départ à chacun d’entre eux: ceux comptant jusqu’à 100 membres (A), puis ceux de 101 à 300 membres (B) et enfin, les moins nombreux, ceux de plus de 300 membres (C). Plus de 200 sociétés fribourgeoises et de la Broye vaudoise ont tenté l’aventure, qui se terminera le 12 avril. Dans le groupe C, le FC Sarine-Ouest pointait hier à 13 h 08 à la 90e position avec 13 819 bons sur son compte. Il était loin du leader, GC polysport et ses 34 095 bons, mais en bonne position dans un classement réunissant 897 sociétés de tout le pays. «Comme la période n’est pas facile, c’était un moyen d’obtenir un peu d’argent», explique Alexandre Devaud. «Notre club de 400 à 450 membres a l’un des plus importants mouvements juniors du canton de Fribourg.»

Le bouche-à-oreille

En charge du dossier pour Sarine-Ouest, Alexandre Devaud a rempli le formulaire d’inscription en ligne. «Nous avons reçu la confirmation de notre participation avec des affiches à placarder dans notre buvette. Mais comme il n’y avait pas d’entraînements, ni de matches et encore moins de spectateurs, nous nous sommes fait de la publicité sur les réseaux sociaux et nous avons opté pour le bouche-à-oreille.» Les clubs devaient présenter un projet. «L’argent sera investi dans les équipements pour les juniors. Mais nous ne savons pas quelle somme nous reviendra… Nous avons tout mis en œuvre pour récupérer les bons de ceux qui désiraient nous soutenir et ne savaient pas comment faire avec le QR code. Ce n’était pas évident pour les personnes plus âgées.»

Dans le même groupe C que Sarine-Ouest, le Club athlétique Belfaux occupait, également hier en début d’après-midi, le 184e rang avec 10 283 bons enregistrés à son nom. «Notre projet, c’est le financement de nouveaux équipements pour notre salle de force. Les engins se font vieux», explique la responsable de l’opération Cécile Hétault. «Nous avons mis en ligne une vidéo afin que les gens comprennent nos besoins et nous soutiennent. C’était plus dynamique que de poster des photos.» La présidente Solange Berset intervient dans cette capsule, mais aussi Christiane Berset, l’entraîneure d’Audrey Werro, ou Quentin Pierlet, moniteur du club. «Il ne faut pas se leurrer. On ne va pas pouvoir financer tant de choses. Aux 100 francs de départ se sont ajoutés 200 francs en un don, une possibilité supplémentaire de recevoir de l’argent. Trois cents francs, c’est un demi-rameur.» Cécile Hérault a régulièrement informé les membres du club de la situation et les bons ont continué à affluer. «Si nous parvenions à recevoir mille francs, ce serait super.»

«Nous avons des besoins»

Enthousiastes à l’annonce de l’opération, les clubs ont vite calmé leurs ardeurs. «Nous désirons changer nos tenues», annonce Marc Hirsbrunner, président d’Athletica Veveyse. «L’investissement est de 30 000 francs. Si nous obtenons 300 francs grâce à Support Your Sport, c’est bien, mais c’est loin d’être suffisant.» Athletica Veveyse figurait hier après-midi en 171e position dans le groupe A, avec 6249 bons sur son compte contre… 43 744 au club d’unihockey en fauteuil roulant d’Aarau, premier d’une classe de 4880 sociétés. «Notre club a neuf ans, il est le plus jeune de l’athlétisme fribourgeois. Nous comptons 89 membres de 7 à 20 ans», expose Marc Hirsbrunner.

«Tout ce qui rentre fait ventre», poursuit le président veveysan. «Nous avons des besoins en cette période de Covid-19 et c’est pour ça que la mobilisation a été importante au départ. Si la Migros était si gentiment prête à débourser pour le sport, nous étions prêts à accepter cet argent. Comme tout le monde doit faire des courses, autant que cela nous profite. Nos connaissances ont bien joué le jeu.» Avant que le soufflé ne retombe.

Si la Coop…

«On nous demande de l’action sur les réseaux sociaux, mais nous avons autre chose à faire que travailler pour la Migros, car le retour sur investissement est quasi nul», constate Marc Hirsbrunner. «Nous sommes reconnaissants envers l’entreprise pour son idée. Nous avons rivalisé avec les autres clubs de la région. C’était une petite bagarre amicale. Mais nous ne savons pas ce que nous aurons en retour. En plus, le scannage des bons était compliqué pour certains. Sur le principe, c’était chouette. J’espère que cela donne une idée à Coop», conclut le Veveysan.