Son sort est entre ses mains

L’élection à Fribourg de Pierre-André Page en constitue un symbole: l’UDC a réussi une démonstration de force hier lors des élections fédérales. Les projections la créditent d’un gain de onze sièges au Conseil national, alors qu’en termes de voix, elle battrait son record de 2007. Le premier parti de Suisse a donc visiblement capitalisé sur les craintes liées à l’immigration. La petite musique de chambre de la campagne électorale helvétique a en effet été recouverte par la grosse caisse de la crise migratoire en Europe. Ce 18 octobre résonne à cet égard en écho du 9 février 2014 et reprend le refrain populaire en faveur d’une meilleure maîtrise de l’immigration.

Ajoutée au bon score du Parti libéral-radical, dopé par les incertitudes économiques, la progression des populistes s’effectue aux dépens, à parts égales, du centre et de la gauche. Soit des soutiens d’Eveline Widmer-Schlumpf, dont la position au Conseil fédéral se trouve grandement fragilisée. Sans surprise, l’UDC a d’ailleurs revendiqué hier soir de pouvoir récupérer son second siège au gouvernement. Amnésique, elle feint d’oublier qu’elle ne l’aurait jamais perdu si elle n’avait pas exclu la Grisonne après son élection en 2007, aux dépens de Christoph Blocher.

Légitimée par l’histoire, Eveline Widmer-Schlumpf l’est aussi par son bilan. Mais comme toute ministre des Finances, elle sait compter. Elle aura donc constaté que sa marge de sécurité à l’Assemblée fédérale a fondu hier en vue de sa réélection. Il lui revient dès lors de décider si elle entend aller au combat, au risque d’échouer, ou s’il est temps pour elle de prendre sa retraite politique. Auquel cas Christian Levrat et Christophe Darbellay ne pourront plus contester son deuxième siège à l’UDC. A moins de réussir à transformer d’ici au 9 décembre la concordance arithmétique actuelle en système de coalition politique. La Suisse en semble hélas très loin.