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Un Noël nippon

L’article en ligne » Quatrième épisode au pays du soleil levant. Cette fois-ci, notre chroniqueuse vous emmène avec elle en voyage pour (re)fêter Noël.  


Lise Schaller

Lise Schaller

8 janvier 2023 à 19:10

Ayant déjà assez écumé les marchés de Noël de Kumamoto et m’étant étonnée plus d’une fois de la créativité locale en matière de déformation de plats occidentaux et de recettes de vin chaud, je me suis décidée de sortir de la préfecture pour voir d’autres contrées. Le 31 décembre nous emmènera, moi et mes amies, à Hiroshima. À la japonaise, nous irons visiter un temple bouddhiste le 31 au soir, peut-être même y sonner la cloche – 108 fois, paraît-il – et au petit jour, admirer le lever de soleil à un temple shinto. La rumeur dit que la rénovation du célèbre torii (porte sacrée) flottant du sanctuaire shinto d’Itsukushima est terminée. À point nommé ! Le 31 au soir, dès 18h, les environs du sanctuaire accueillent également le chinkasai, un festival du feu (ou plutôt d’extinction du feu).

Mais à l’heure où je vous écris, nous avons à peine passé Noël. Que dis-je, passer Noël… Environ 2% de la population japonaise se déclare chrétienne et il n’est pas rare de tomber sur une église au coin d’une rue, mais les repas de famille, les montagnes de biscuits et les cadeaux sous le sapin sont une tradition étrangère à majorité de la population nippone. Inspirés des États-Unis, sapins, guirlandes lumineuses et chants de Noël américains accompagnent une « période de l’Avent » très commerciale au Japon, mais l’ambiance générale n’est pas comparable à celle qu’on peut vivre en Suisse. Voulant tout de même marquer le coup, mes amies et moi avons réservé une table dans un restaurant coréen à Kitakyushu, première destination de notre périple. Nous avons trinqué – « joyeux Noël ! » – et nous sommes régalées, sans pour autant avoir l’impression de fêter Noël. Dehors, de la pluie, pas de signe de neige.

En parlant de neige, le début de notre voyage, le 24 décembre, a failli être mis à mal par les conditions météorologiques. Neigeait-il, me demanderez-vous ? Non. Et pourtant, quel a été notre effarement, à Kumamoto, de voir que tous les bus en direction du nord avaient été annulés pour les prochaines 24 heures. Dans le bus qui nous avait amenées à la gare, aucune annonce des annulations. L’espace d’un instant, j’ai cru avoir à faire à la SNCF. Après avoir difficilement obtenu le remboursement de nos billets de bus, nous avons opté pour le train, plus cher mais aussi plus rapide. Un coup d’œil par la fenêtre du shinkansen laissait apercevoir quelques traces de neiges sur les toits plats – rien, cependant, qui pût être raisonnablement appelé « manteau blanc ». Après une courte investigation, nous avons atteint le second degré de l’effarement. Attachez vos ceintures, vous n’êtes pas prêt·e·s : les bus n’avaient pas de pneus d’hiver, d’où l’annulation prématurée de tous les trajets. Et au Japon, la procédure, c’est la procédure, et ce n’est pas discutable, quelle que soit la couleur de la neige. Qu’on ne vienne surtout pas me louer « l’efficacité japonaise ». C’est un mirage, quant à lui bien efficace.

Sur un coup de nostalgie européenne, je me suis aussi offert un billet de concert pour la neuvième de Beethoven, très appréciée au Japon et souvent jouée à cette période de l’année – comme en Suisse, d’ailleurs. Le temps d’un instant, comme une bulle dans l’espace, j’aurais pu me croire dans n’importe quelle salle de concert terrestre. La musique rassemble. Fin du concert, applaudissements, révérences. Je me suis prise à me dire qu’ici, les révérences paraissaient bien plus naturelles que chez nous, puisqu’on en fait tous les jours pour s’excuser, remercier, comme marque de respect ou pour prier, entre autres. Une fois sortie de la salle, la magie s’est vite estompée. Tout en longeant un canal, je suis passée devant de nombreux konbini (convenience stores), dans une rue marchande animée dont les heures d’ouverture semblaient tout sauf officielles, sur un pont emballé dans des kilogrammes de guirlandes lumineuses kitsch, et devant des locaux en taule côtoyant un monorail aérien futuriste. La ville me plaît. Je n’ai peut-être pas vraiment fêté Noël, mais en vacances, tous les jours sont jours de fête. Joyeux Noël, et bonne année !

 

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