Sciences » Un lieu commun veut qu’au Moyen Age, on croyait que la Terre était plate et qu’il a fallu attendre les explorateurs Colomb et Magellan et les astronomes modernes Copernic et Galilée pour comprendre qu’elle était ronde. Cette idée fausse, qui permettait d’affermir le triomphe de la modernité face à un soi-disant «obscurantisme moyenâgeux», s’est répandue aux XVIIIe et XIXe siècles et est restée vivace jusqu’à nos jours.
Constatant que des enseignants, journalistes, politiques et même «éminents chercheurs» véhiculaient encore aujourd’hui, «par ignorance ou par confort», cette théorie d’une croyance médiévale en la platitude de la Terre, la professeure d’histoire des savoirs Violaine Giacomotto-Charra et la chercheuse en histoire et philosophie des sciences Sylvie Nony ont entrepris de casser le mythe. «De petits sondages pratiqués auprès d’étudiants nous ont permis de prendre la mesure de l’emprise de ce lieu commun: les deux tiers à trois quarts des étudiants y croient», observent-elles dans La Terre plate (voir couverture ci-dessous), un ouvrage bien vulgarisé sur la question. Avant elles, d’autres scientifiques se sont essayés à pareille démythification, à commencer par le médiéviste américain Jeffrey Burton Russell récemment décédé. Dans L’invention de la Terre plate (1991), il démontait la «légende noire» du Moyen Age chrétien.
1 - La Terre est ronde depuis l’AntiquitéContrairement à ce qu’on peut lire parfois, la connaissance des théories de l’Antiquité ne s’est pas perdue à travers les siècles, l’astronomie a continué de se consolider sur les bases grecques et a été complétée par l’apport arabe et les observations propres au monde européen. Au Moyen Age, «la sphéricité était bien la doctrine officielle enseignée dans les universités et n’était pas condamnée par l’Eglise», soulignent les deux spécialistes, précisant que cette connaissance était aussi utilisée hors des sphères académiques.