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Économie Régionale

Veille intelligente chez Translait

L’entreprise a équipé son site de Bulle d’une technologie permettant d’anticiper les pannes

Nicolas Genoud, responsable du site bullois de Translait, Yvan Jacquat, directeur de GradeSens, et Thierry Deillon, responsable technique chez Translait, ont travaillé main dans la main sur ce projet.

 Thibaud Guisan

Thibaud Guisan

31 mai 2021 à 04:01

Industrie » Ce gigantesque moteur constitue le cœur de l’usine que possède la société Translait à Bulle. Cet équipement, d’une puissance de 315 kW, active tout le processus d’évaporation du petit-lait effectué sur le site de Planchy. Une grande partie de ce concentré est exportée en Europe pour servir à la fabrication de nourriture infantile. Le reste est livré à Chésopelloz, où une autre usine de Translait produit un lait de substitution pour l’alimentation des veaux.

Depuis un peu plus d’une année, ce moteur est surveillé par quatre capteurs. Leur mission: mesurer en permanence différents paramètres de l’équipement (vitesse, puissance, vibrations, température). Les données sont d’abord transmises à un serveur cloud, grâce à une technologie sans fil. Les algorithmes et l’intelligence artificielle prennent ensuite le relais pour traiter ce flot d’informations. Finalement, le dispositif sert à donner l’alerte en cas de valeurs anormales.

Diagnostic permanent

Ce système de surveillance intelligent constitue un exemple concret du concept d’industrie 4.0: il s’applique ici au domaine de la maintenance prédictive.

«Cet outil permet d’intervenir avant une casse et de prolonger la durée de vie d’un équipement. Grâce aux capteurs, nous pouvons gagner des mois, voire des années avant le prochain changement de moteur»
Thierry Deillon

Autrement dit, le dispositif analyse en permanence le fonctionnement d’une machine et permet de diagnostiquer des problèmes à venir avant qu’ils ne surviennent réellement. «Cet outil permet d’intervenir avant une casse et de prolonger la durée de vie d’un équipement. Grâce aux capteurs, nous pouvons gagner des mois, voire des années avant le prochain changement de moteur», apprécie Thierry Deillon, responsable technique chez Translait.

Avant la mise en place de cette surveillance intelligente, l’entreprise avait deux options: remplacer le moteur à intervalles réguliers – généralement cinq ans – ou attendre une casse pour intervenir. La première option était logiquement privilégiée, la seconde pouvant entraîner des dommages mécaniques et un arrêt prolongé de la production.

Un filtre suffit

L’automne dernier, le dispositif a permis d’identifier un problème de filtre. «L’installation fonctionnait correctement, mais les températures étaient trop hautes par rapport aux conditions habituelles. Cela aurait pu générer une grosse casse», rapporte Thierry Deillon. Finalement, le remplacement d’un filtre à poussière a suffi à retrouver des valeurs normales.

L’entreprise dispose d’un stock de pièces de rechange. «La production a été arrêtée moins d’une heure. Cette technologie apporte un confort de travail et une sécurité importante», complète Nicolas Genoud, responsable du site de Bulle, qui indique qu’un filtre revient à quelque 1500 francs, contre 50 000 francs pour un moteur neuf qu’il faut commander. Sans entrer dans les détails financiers, Thierry Deillon calcule que le coût de la technologie est amorti dès que la durée de vie du moteur est prolongée de trois mois.

Projet collaboratif

La mise en place de ce nouvel outil est intervenue dans le cadre d’une démarche collaborative, qui a réuni plusieurs entreprises et partenaires académiques. Les capteurs, également utilisés par Ascenseurs Menétrey, à Romont, ont été développés par la société Contrinex, à Corminbœuf. La start-up GradeSens, basée à Fribourg, a œuvré dans le domaine de la transmission des données. La Haute Ecole d’ingénierie de Fribourg et son homologue d’Yverdon ont apporté leur expertise, tout comme le centre de compétence Rosas, basé à Bluefactory et spécialisé dans la sécurité informatique.

Ce projet, lancé en 2018, a bénéficié de l’appui de la Nouvelle politique régionale, qui vise à soutenir des initiatives ayant un potentiel d’innovation pour le canton de Fribourg. Le budget, de 200 000 francs, a été alimenté pour une moitié par le canton et la Confédération et pour l’autre par les entreprises partenaires. Les acteurs du projet ont été mis en relation par la plateforme d’innovation Innosquare.

Au bon endroit

Directeur de GradeSens, Yvan Jacquat continue à accompagner Translait. Chargé de l’analyse des données, il livre une fois par semaine un rapport à l’entreprise. Le spécialiste estime que l’évolution est inéluctable dans l’industrie: «Un savoir-faire numérique se construit dans le temps. Les entreprises qui attendent qu’il soit indispensable vont rater le train. Par contre, avoir une usine truffée de capteurs n’a pas de sens. Il faut savoir cibler les équipements stratégiques où leur mise en place est pertinente. L’entreprise doit pouvoir comprendre ce qui se cache derrière les données et s’approprier les résultats», souligne celui qui mène des projets similaires pour des robots de La Poste et dans le domaine éolien, en Allemagne.

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