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Économie Régionale

Swissmeca s’attaque aux bactéries

L’entreprise de Kleinbösingen a élaboré une nouvelle solution pour effectuer des tests par coloration


 Thibaud Guisan

Thibaud Guisan

12 avril 2021 à 04:01

Technique » Par sa polyvalence, cette entreprise ressemble à un couteau suisse. Basée à Kleinbösingen, où elle domine le lac de Schiffenen et fait face aux Alpes bernoises, Swissmeca SA développe des solutions mécaniques et mécatroniques (avec des composants électroniques) pour des clients actifs dans les domaines de l’horlogerie, du secteur médical ou de l’industrie des machines.

L’entreprise, fondée en 2012, a par exemple développé une pompe utilisée par des laboratoires de microbiologie, industrialisé un encreur pour l’impression de gobelets à très haute vitesse ou encore mis au point un système pour remonter les montres mécaniques. «Nos clients sont des industriels basés dans toute la Suisse», présente André Brülhart, 59 ans, l’un des trois associés de la société, avec son fils Maxime Brülhart, 32 ans, et Roger Lepore, 55 ans, un ancien collègue de travail côtoyé alors qu’il était employé par une entreprise industrielle du Grand Fribourg.

Méthode de 1884

A côté des projets menés pour ses clients, Swissmeca s’est lancé un défi l’an dernier. L’entreprise lacoise a mis au point une nouvelle solution pour effectuer un test de bactéries par coloration. La méthode, dite coloration de Gram, a été mise au point en 1884 par le bactériologiste danois Hans Christian Gram. Quatre réactifs à base d’eau, d’alcool et d’acétone sont appliqués sur des bactéries fixées sur une lame de verre. Cette coloration reste utilisée dans les laboratoires du monde entier. «C’est un premier test, qui permet de déterminer les grandes familles de bactéries et de prescrire un premier traitement antibiotique avant des analyses plus fines. Par exemple, une coloration de bactéries doit être effectuée rapidement pour détecter une méningite bactérienne et la combattre. C’est une question de minutes», explique Roger Lepore.

Aujourd’hui, les colorations de Gram s’effectuent manuellement à l’aide d’une pipette ou au moyen d’appareils automatiques. «Mais les systèmes actuels ne donnent pas satisfaction. Ils manquent de fiabilité et consomment beaucoup de colorants, des substances dangereuses à manipuler», affirme André Brülhart.

La solution fribourgeoise se présente sous la forme d’une petite carte, comprenant des canaux contenant les quatre colorants. Pour effectuer une coloration, le dispositif est relié à un système de pompe qui aspire les fluides vers l’échantillon bactérien déposé sur une lame de verre. «Notre système utilise 1000 fois moins de colorants que les méthodes actuelles. Il est plus fiable, plus économique et plus écologique», énumère André Brülhart, qui note que les cartes sont recyclables.

Alors qu’un brevet international a été déposé en juin 2020, l’innovation de Swissmeca a déjà reçu une forme de reconnaissance. L’entreprise lacoise explique avoir déjà réuni plus de 500 000 francs pour financer la recherche et le développement. Une manne qui provient d’Innosuisse, l’agence de promotion de l’innovation de la Confédération, de la Promotion économique du canton de Fribourg, et d’un partenaire industriel, Axonlab, une société basée à Baden (AG) active dans la distribution de matériel microbiologique et biomédical. «Si vous avez une bonne idée en Suisse, vous trouvez les moyens de la financer», relève André Brülhart, qui indique que l’argent récolté a permis d’engager trois collaborateurs, qui travaillent sur le projet à la Haute Ecole d’ingénierie et d’architecture de Fribourg. Les professeurs Gioele Balestra, spécialiste en microfluidique, et Bruno Bürgisser, expert en injection plastique, sont également associés au projet.

L’entreprise est ambitieuse. «Si tout va bien, les premières cartes seront mises sur le marché l’an prochain, avec une production en petite série. Dès 2022, nous pourrions lancer la phase d’industrialisation», expose André Brülhart, qui estime que la production des cartes pourrait déboucher sur la création d’une dizaine d’emplois dans le canton de Fribourg.

Le cofondateur de Swissmeca est en tout cas convaincu du potentiel de l’innovation. Des dizaines de millions de colorations Gram sont effectuées chaque année dans le monde, dont 24 millions par an rien qu’en Suisse et en Allemagne. «Si notre technologie gagne 30% de parts de marché, 7,2 millions de cartes seraient nécessaires par année pour la Suisse et l’Allemagne», calcule André Brülhart, qui note que le projet a démarré en mars 2020, en même temps qu’une certaine pandémie. «La crise a été une opportunité pour innover et mettre des ressources pour développer cette idée», résume-t-il.

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